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Hébron - 29 octobre 2004
Par Char
Feras a parlé de la manière dont il avait été traité alors : les postures éreintantes qu’il avait été contraint de subir : les sacs trempés d’urine dont on lui avait recouvert la tête.
J’ai immédiatement pensé à l’Irak, et me suis rappelée qui étaient ceux qui avaient entraînés l’armée états-unienne à ces tactiques.
Il y a actuellement plus de 7000 prisonniers politiques palestiniens dans les prisons israéliennes, et environ mille d’entre eux se trouvent en détention administrative. Plus de 200 ont moins de dix-huit ans.
La torture des "suspects de terrorisme" est légale selon la loi israélienne.
Vous aurez pu remarquer que, comme la presque totalité de la communauté internationale, j’ai ces derniers temps négligé Gaza dans ma pensée et mes écrits.
Au cours de l’opération « Jours de Repentir » de l’armée israélienne (du 29 sept. au 15 octobre) 133 palestiniens ont été tués.
Selon B’Tselem, organisation israélienne des droits de l’homme, au moins 50 de ces tués étaient des civils parmi lesquels 26 enfants.
Peut-être avez-vous vu aux informations, l’uniforme d’écolière trempé de sang de Samah Nassar, neuf ans, liquidée dans sa maison. Mais à part ça, on m’a dit qu’ici qu’on n’avait pas vu les media occidentaux se précipiter pour couvrir l’invasion.
Toujours les mêmes vieilles infos, les mêmes chiffres anonymes.
J’ai rencontré un certain nombre d’anonymes l’autre jour. J’étais dans une banlieue d’Hébron où je rendais visite à une militante politique d’une quarantaine d’années pour discuter de projets d’activités culturelles dans la Vieille Ville.
J’étais sous le charme d’être en compagnie d’une féministe palestinienne et je m’en félicitais quand son fils, Feras, est entré dans la pièce pour débarrasser le plateau de thé..
Il devait avoir la vingtaine, et il semblait très timide, bien différent de sa mère confiante et sociable.
Ibrahim, l’ami qui m’avait accompagnée, a reconnu Feras rencontré en prison au cours de la première Intifada (1987-1991) et ils se sont mis à discuter. Sa mère m’a alors raconté son histoire.
Quand Feras avait 14 ans, au début de la première Intifada, on lui a tiré dessus alors qu’il revenait de l’école.
Quelques semaines plus tard, au milieu de la nuit, l’armée israélienne a fait irruption au domicile familial et l’a tiré de son lit.
Sa mère est sortie dans la rue en criant dans le noir, au moment où la jeep l’emmenait.
Elle n’a plus entendu parler de lui pendant six mois. Il a été emmené dans un camp de prisonnier du désert du Negev où il a passé les quatre années suivantes
Treize ans plus tard, sa voix s’étrangle toujours et ses yeux luttent contre les larmes quand elle raconte cette histoire courante chez les Palestiniens. J’imaginais mon propre frère quand il avait quatorze ans et ma mère rendue folle de ne pas savoir où il était pendant six mois. D’une certaine manière, ne rien savoir c’est encore pire.
Feras a parlé de la manière dont il avait été traité alors : les postures éreintantes qu’il avait été contraint de subir : les sacs trempés d’urine dont on lui avait recouvert la tête.
J’ai immédiatement pensé à l’Irak, et me suis rappelée qui étaient ceux qui avaient entraînés l’armée états-unienne à ces tactiques. Mais cette part de la conversation n’a duré que quelques minutes. Feras s’est mis à plaisanter avec Ibrahim au sujet des gens qu’ils avaient rencontrés en prison, mais ce ne fut pas une conversation triste, une conversation très détachée, plutôt.
Il n’était pas encore adolescent quand ils l’ont arrêté, m’a dit sa mère en anglais, un anglais que ne parle pas Feras, comme ça il ne pouvait pas savoir exactement ce que sa mère me disait. Il avait besoin de sa mère, de sa famille, m’a-t-elle dit.
Et pendant quatre ans, ils ne les a pas vus.
Quant il a été relâché, il a passé beaucoup de temps seul dans sa chambre dans le noir. Il n’était plus la même personne.
Il n’avait pas eu sa famille quand il était devenu un homme. Elle l’avait encouragé à s’intéresser à quelque chose, lui avait acheté des oiseaux.
Maintenant, il ne vit plus avec elle mais de l’autre côté de la rue, avec sa famille à lui, des chevaux et une volière.
Chaque nuit pendant des mois après sa libération, sa mère s’asseyait sur la terrasse devant la maison, dans l’attente de ce qu’elle ferait pour protéger son fils s’ils venaient de nouveau le chercher.
Il y a actuellement plus de 7000 prisonniers politiques palestiniens dans les prisons israéliennes, et environ mille d’entre eux se trouvent en détention administrative (emprisonnés sans charge ni procès).
Plus de 200 ont moins de dix-huit ans. La torture des "suspects de terrorisme" est légale selon la loi israélienne.
Cette semaine à Khan Younis, l’armée israélienne a tué dix sept Palestiniens en moins de trente heures
Source : www.palsolidarity.org/
Traduction : CS pour ISM-France
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