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Cisjordanie - 22 juin 2009
Par Abed Alrahim Khalil
Le 7 juillet 2007 est la date à laquelle ma jeune famille a été créée et que j’ai commencé à construire mon avenir avec la femme que j’aime. J’ai attendu longtemps que la divine coïncidence me fasse rencontrer la femme que j’avais cherchée toute ma vie, et c’est ainsi qu’avec joie et confiance, j’ai compris que c’était avec elle que je voulais partager ma vie.
Nous ne manquions ni d’amour, ni de compréhension ni de compatibilité pour qu’elle accepte ; au contraire, les jours qui ont suivi notre rencontre n’ont fait que renforcer notre amour et notre entente, au point de faire des jaloux.
Le seul obstacle que nous avons rencontré est le fait que mon amour habite Jérusalem Est, et dès que nos familles se sont rencontrées pour organiser le mariage, des signes de mécontentement sont apparus parmi les membres des familles, et même quelques tentatives de la part de certains pour que nous abandonnions notre projet à cause de la distance, des checkpoints, etc. En dépit de tout, ma femme et moi sommes restés unis dans notre amour authentique.
Les efforts négatifs, des deux familles, ont augmenté et nous nous sommes retrouvés face à un nouveau défi : vivre ensemble en dépit des familles et des barrières politiques.
Après un gros travail de médiation, la date et le lieu du mariage ont été choisis, à mi-chemin entre nos familles. Dès le début, nous avons essayé de trouver une solution. Ma femme passe la plupart de son temps à Jérusalem, jusqu’à présent, pour garder le droit de résidence qu’elle a des autorités israéliennes, mais nos familles ont utilisé aussi ce temps pour essayer de la faire changer d’avis et la faire douter, comme ma propre famille l’a fait envers moi. Les pressions ont continué, d’un point de vue social comme politique. Tandis que les barrières se faisaient plus nombreuses, la pression de mes parents aussi pour annuler le mariage – mais nous sommes restés fermes et nous nous sommes mariés.
Comme je voulais maintenir ma femme loin de ces problèmes, nous sommes convenus qu’elle resterait à Jérusalem la plupart du temps, pour nous conformer aux demandes de l’Etat d’Israël et que ses droits à résidence ne soient pas annulés, bien que cette séparation me déchire le cœur.
Le 7 octobre 2008, ma femme est allée à l’hôpital pour accoucher, et les membres de sa famille ont déclaré qu’ils étaient occupés, et ne l’ont pas accompagnée, ce qui m’a énormément préoccupé. Je suis arrivé au checkpoint de Qalandya et j’ai essayé de persuader les soldats de me laisser passer. Je leur ai expliqué la situation, mais un soldat m’a menacé : « Si tu restes ici, je t’arrête. »
Je suis reparti à Ramallah mais je n’arrivais pas à soulager mon inquiétude. Une demi-heure après, je suis revenu au checkpoint de Qalandya espérant trouver un soldat qui me laisserait passer, mais sans succès, et j’ai continué à aller et venir comme un fou entre Ramallah et Qalandya.
Chaque fois que j’imaginais ma femme accouchant toute seule pour la première fois, sans moi à ses côtés, j’étais déchiré de chagrin et de soucis. A 21h, j’ai appelé l’hôpital et l’infirmière m’a annoncé que ma femme avait accouché d’une petite fille, et qu’elle et sa mère se portaient bien. Cela m’a calmé, mais je continuais à me demander pourquoi je ne pouvais pas voir mon bébé et partager ces moments avec ma femme. Lentement, des sentiments de paternité ont commencé à émerger, et le désir encore plus fort de les embrasser toutes les deux, le rêve d’une famille et de bonheur qui éloignait la tristesse et me réchauffait le cœur.
J’ai parlé à ma femme après l’accouchement, elle pleurait et disait que tout le monde l’avait abandonnée, qu’elle n’avait personne auprès d’elle, en particulier dans ces moments difficiles. Le fait que je ne sois pas là la rendait très triste, mais elle restait optimisme à notre sujet. Nous avons terminé la conversation, parce qu’elle souffrait des douleurs de l’accouchement.
L’infirmière m’a dit plus tard que la mère de ma femme était venue la voir et cela m’a apaisé et m’a donné de l’espoir. J’ai discuté avec des amis à la « Maison de la Paix » - une association palestinienne à Ramallah active dans la promotion de la non violence, de la paix et des droits des femmes. J’ai consulté de nombreux amis et j’ai réalisé que je devais discuter avec des militants pacifistes israéliens pour obtenir un permis d’entrée.
Je leur ai écrit :
« 30 jours ont passé depuis la naissance de ma fille et je suis sûr que la plupart d’entre vous savent combien les sentiments d’un père sont forts de voir sa famille, de la prendre dans ses bras, en particulier lorsque c’est la première fille. Vous connaissez mon travail pour la paix et combien d’événements j’ai organisé pour la promouvoir, et vous savez que je ne fais pas courir de risque à la sécurité israélienne. Tout ce que je veux, c’est un permis de quelques heures pour voir ma femme et ma fille. »
Bien qu’ils n’aient pas pu m’aider, beaucoup était d’accord pour aller rendre visite à ma femme, ce qui m’a soulagé et m’a donné de l’espoir et renforcé ma foi en la paix. Je les ai remerciés par téléphone ou par email pour leur empathie avec la douleur de ma famille.
Ma crise a continué et naturellement, le besoin urgent de voir ma femme. Nos deux familles n’ont pas ménagé leurs efforts pour utiliser la situation et déclarer que ce mariage ne menait nulle part et que nous ferions mieux de nous séparer tout de suite.
Je ne savais pas vers qui me tourner. S’échapper ne résoudrait pas le problème de ma femme, qui ne peut pas quitter le domicile de ses parents, en particulier après la naissance.
Ce n’est que 77 jours après que j’ai enfin pu voir ma femme et ma fille, et il est impossible de décrire mon bonheur à ce moment là. Lorsque je les ai prises dans mes bras, j’ai tout oublié. Ma femme et moi avons discuté des difficultés que nous venions de traverser, et seule la vue de notre maison nous a donné un espoir nouveau, plus grand, et du bonheur.
10 jours plus tard, la mère de ma femme l’a appelée et lui a demandé de revenir, de peur qu’elle ne perde ses droits. J’ai failli demander à ma femme de ne plus y revenir, mais j’étais inquiet pour elle et je souhaitais que la déclaration de naissance du bébé soit faite.
C’est pour cela que je me tourne vers vous.
Amis, gens de conscience, militants pour la paix qui me connaissez, ainsi que ceux qui ne me connaissent pas, je me tourne vers vous au nom de ma famille, au nom des plus hautes valeurs de l’humanité ; tout ce que je demande, c’est de vivre en paix et dans l’amour avec ma famille, parce que je crois dans les valeurs de paix et d’amour. Je ne demande pas la lune, ni l’impossible – juste une vie de famille simple, dans ces temps si difficiles pour nous, des jours où l’inquiétude et la crainte de l’avenir sont si grands, et les dangers existentiels auxquels nous sommes confrontés grandissent constamment, des jours qui s’effilochent sans notre réunion tant désirée.
Je ne perds pas espoir – il n’y a pas de vie sans espoir. Je tire ma force du doux sourire de mon enfant. Il me donne la force, l’espoir et la foi dans un futur meilleur, pour moi et ma famille, et l’amour de ma femme, aussi vrai qu’il est possible.
Je n’ai pas le moindre doute que je recevrai une réponse humaine et utile de votre part pour la réunification de ma famille, ou pour obtenir un permis permanent qui résoudrait le problème une fois pour toutes et réunirait ma famille pour toujours.
Sincèrement,
Abed Alrahim Khalil
abed2003a@hotmail.com
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