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ISM France - Archives 2001-2021

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Vallée du Jourdain -

"Ce devrait être le paradis" - le "sous-équipement" stratégique de la Vallée du Jourdain

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La Vallée du Jourdain fait partie de la Vallée du Grand Rift afro-asiatique, et le point le plus bas de la planète. Elle s'étend sur 2.400 km², couvre plus d'un quart de la Cisjordanie palestinienne et jouit d'une terre riche et fertile, un climat tropical toute l'année et d'abondantes ressources en sources naturelles. C'est le paradis de l'agriculture.

'Ce devrait être le paradis' - le 'sous-équipement' stratégique de la Vallée du Jourdain


La clinique de Jiftlik, pour 20.000 habitants de la Vallée du Jourdain

La vallée est également frontalière du Royaume de Jordanie, et selon un récent rapport d'enquête réalisé par le Centre de Développement Palestinien MA'AN, ce sont précisément les raisons pour lesquelles "Israël a maintenu à toute force son occupation sur le secteur, et pourquoi la Vallée du Jourdain est un tel point de contentieux dans le conflit entre Israël et les Palestiniens."

MA’AN affirme qu'Israël a resserré son emprise sur la Vallée du Jourdain depuis 2000, en confisquant et en occupant la terre palestinienne aux motifs de "Sécurité nationale", en même temps qu'il offrait aux colons israéliens des primes massives pour qu'ils aillent s'installer dans la vallée.

Les habitants palestiniens de la Vallée du Jourdain ont besoin de permis spéciaux pour vivre dans leurs propres maisons et la presque moitié de la vallée leur est interdite d'accès.

Isaël a établi presque 1.100 km² de "zones fermées" à travers toute la vallée. Les Palestiniens du reste de la Cisjordanie se voient fréquemment interdire l'entrée à n'importe quelle partie de la Vallée du Jourdain, dont l'isolement n'a pas cessé de croître. Des infrastructures comme les transports publics, l'éducation ou les soins de santé ont toutes été, de façon stratégique, sous aménagées.

Jiftlik, à quarante minutes de Jéricho, est un village de la Vallée du Jourdain, en piteux état mais pittoresque. La clinique locale du Palestinian Medical Relief Services est dirigée par le Dr. Yosef Saada, qui, à part pendant les sept années de sa formation médicale en Russie, a toujours vécu à Jiftlik. Il est connu sur place pour être un défenseur passionné de la santé publique.

"Nous ne pouvons pas simplement traiter les gens avec des médicaments", dit-il. "Nos communautés sont isolées et très traditionnelles, et beaucoup de personnes ont aussi besoin d'aide pour changer leurs habitudes qui ont des impacts négatifs sur leur santé. Alors nous nous servons le plus que nous pouvons de l'éducation à la santé."

Jiftlik abrite environ 5.000 personnes, mais le Dr. Yosef et les deux infirmières de la clinique reçoivent des patients d'une demi-douzaine de villages environnants. Le Dr. Yosef estime que sa clinique sert à plus de 20.000 personnes.

Il souligne que la clinique locale créée par l'Autorité Palestinienne n'est ouverte que deux jours par semaine, pendant deux heures par jour. Pendant ce temps, le Dr. Yosef reçoit personnellement environ 40 patients par jour.

Ceci serait un nombre de dossiers remarquable dans une clinique moderne bien équipée en médicaments, mais la clinique de Jiftlik, comme le reste du village, n'a ni électricité ni internet. Le petit bureau du Dr. Yosef sert de salle d'opération pour la petite chirurgie, et lorsque les patients doivent être transférés à l'hôpital, il se sert de sa propre voiture, parce qu'il n'y a pas d'ambulance dans le secteur. La clinique a l'eau courante mais selon le Dr. Yosef, la qualité de l'eau est si mauvaise qu'elle contribue aux problèmes de santé locaux.

"Il y a deux réseaux d'eaux locaux", dit-il, "et les deux sont contrôlés par la compagnie israélienne Mekorot. A cause de la mauvaise qualité de notre eau, nous avons des problèmes récurrents d'amibes, de giardiase, de gastroentérites et de diarrhées. Mais l'eau qui alimente les colonies vient de réservoirs séparés, avec des canalisations de meilleure qualité."

Il y a 36 colonies israéliennes dans la Vallée du Jourdain, hébergeant plus de 6.000 colons, presque tous des fermiers. Les colonies Hamra, construite en 1971, et Mekhora, construite en 1973, entourent Jiftlik.

La combinaison stratégique des checkpoints israéliens, des permis, des saisies de terre, des colonies illégales et du sous-équipement ont conduit des centaines de milliers de Palestiniens à quitter leur propre terre. Il y a eu jusqu'à 350.000 palestiniens dans la Vallée du Jourdain. La population, aujourd'hui, est tombée à environ 52.000 personnes.

Les Accords de Paix d'Oslo de 1993 ont constitué un tournant majeur pour les communautés palestiniennes, partout dans les Territoires palestiniens occupés. Sous Oslo, les Territoires ont été divisés en zone A, B et C.

. La Zone A, qui représente 10,8% de la Cisjordanie , a été placée sous le contrôle de l'Autorité Palestinienne.

. La Zone B, 28% de la Cisjordanie , a été placée sous administration civile palestinienne mais sous contrôle sécuritaire israélien.

. Les 61,2% restants, plus 20% de la Bande de Gaza, sont devenus la Zone C, sous contrôle exclusif d'Israël.

Près de 95% de la Vallée du Jourdain sont maintenant contrôlés par Israël. "Après Oslo, notre district a été placé en Zone C", dit le Dr. Yosef, "et depuis, nous vivons sous contrôle israélien. Ils nous ont refusés les permis de construire de nouvelles maisons et des écoles, et même d'installer l'électricité ! Il y a des villages, à seulement 8 kilomètres d'ici, qui ont des équipements corrects, mais ils sont en Zone B, et ici, nous n'avons aucune infrastructure."

Pour le Dr. Yosef, la comparaison la plus rude de toutes est entre les conditions à Jiftlik et les colonies israéliennes qui surplombent. "Les colons reçoivent des maisons toute neuves, plus l'enseignement et les soins de santé gratuits", dit-il. Les colons de la Vallée du Jourdain bénéficient également de 75% de réduction sur leurs factures d'électricité et autres fournitures, et des emprunts à long terme de 20.000 $ par famille.

"Le gouvernement israélien offre aux colons des incitations de toutes sortes pour venir ici vivre sur notre terre", dit le Dr. Yosef. "Mais l'Autorité Palestinienne ne fait rien pour nous. Alors que cette terre est à nous, ils ne nous aident en aucune manière à rester ici, dans nos propres communautés."

L'éducation aussi a été peu développée dans la Vallée du Jourdain. Jusqu'à il y a 4 ans, il n'y avait pas d'école secondaire à Jiftlick. Les enfants allaient à l'école secondaire de Beit Hassan. Mais après que l'armée israélienne ait installé un checkpoint à Hamra, près de Beit Hassan, il y a eu des accusations de harcèlement des filles de la part des soldats, et de nombreuses familles ont cessé d'envoyer leurs filles à l'école. Comme il n'y avait pas, et qu'il n'y a toujours pas, de transports publics locaux, il est devenu impossible pour la plupart des enfants d'aller à l'école un peu plus loin.

Le Dr. Yosef et les autres militants de la communauté de Jiftlick savaient que les jeunes seraient obligés de quitter le secteur pour recevoir un enseignement correct, à moins qu'il y ait une bonne école locale. Ils se sont donc organisés pour installer une école. Ils savaient qu'un permis de construire en Zone C leur serait refusé, alors ils ont monté six grandes tentes derrière le village, et ont invité les parents à envoyer leurs enfants à l'école. 40 écoliers se sont inscrits, et l'école secondaire de Jiftlik a ouvert en 2003.

Le Dr. Yosef nous a emmenés rencontrer la femme qui a métamorphosé l'enseignement secondaire à Jiftlik. Nawal Khair Kanari était en train de finir la classe lorsque nous sommes arrivés à l'école, qui n'est plus sous tente, mais dans un bâtiment de brique. Les fenêtres sont sans vitre, le toit est en tôle ondulée et l'électricité vient d'un générateur, mais, comme le dit le Dr. Yosef, c'est une amélioration considérable par rapport à une rangée de tentes.

Après sa classe, Nawal nous a emmenés dans la salle du personnel, qui était vide à l'exception de quelques chaises, deux bureaux et une étagère de livres.

"Nous avons donné les cours à tous nos étudiants sous des tentes, pendant deux années", dit-elle. "Nous ne voulions pas prendre le risque de construire une école sans permis, parce qu'elle aurait été démolie. Quelquefois, le temps était terrible et les tentes ont été endommagées, mais nous avons toujours continué à enseigner. Aujourd'hui, nous avons plus de 130 étudiants, dont beaucoup de filles."

Il y a deux ans, en 2005, une délégation française de l'Unesco est arrivée à Jiftlik pour une étude de terrain. Le chef de la délégation, Marcel Babosa, a visité l'école de tentes et a immédiatement proposé à Nawal et à ses collègues de les aider à obtenir un permis de construire. "Cela lui a pris presque deux années – mais nous avons fini par recevoir le permis ! ", nous dit Nawal rayonnante. Elle explique que le bâtiment dans lequel nous nous trouvons a été construit à la hâte, comme école provisoire. Mais une école toute neuve a été payée par le gouvernement malaisien, et elle est actuellement en construction.

"Venez voir", dit-elle.

"Cette école est vitale pour notre communauté, parce qu'elle permet aux jeunes d'avoir un enseignement et de rester à Jiftlik", explique-t-elle.

"Nous luttons toujours pour vivre ici. Je n'ai pas l'électricité chez moi, et je dois utiliser un générateur, et nous continuons à devoir nous battre pour le moindre permis de construire. Mais cette école va transformer notre village."

Nous nous sommes dirigés vers l'école en construction, avons fait un tour improvisé pour aller parler aux ouvriers. L'un d'entre eux, Jihad, nous a dit combien il était choqué par les conditions de vie à Jiftlik. "Vous savez, je suis du Camp de Balata", dit-il, se référant au grand camp de réfugiés juste à la sortie de Naplouse. "La vie à Balata est dure, nous avons vraiment de gros problèmes. Mais la situation ici est encore pire qu'à Balata. Les gens ici sont réellement stupéfiants."

Voir d'autres photos de Jiftlik.

Source : Palestine Monitor

Traduction : MR pour ISM

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