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Gaza - 30 octobre 2006
Par Mona El-Farra
Mona El-Farra est médecin et militante des droits de l'homme dans la Bande de Gaza. Elle écrit sur la vie dans Gaza at : http://fromgaza.blogspot.com/.
En tant que médecin, je pleure chaque fois qu'un patient meurt.
Mais je sais que cela vient de mes origines. La médecine moderne ne peut pas traiter tout le monde.
Mais regarder un patient mourir d'une maladie curable par manque de médicaments ou par manque d'électricité est une souffrance que j'apprends seulement maintenant à supporter.
Photo Rafah Today : Gaza : des familles sans abris, une population affamée, un pays détruit, des milliers de morts et des dizaines de millers de blessés ....
La bande de Gaza, ma patrie, est confrontée à un désastre humanitaire catastrophique. Pas un désastre naturel, mais un désastre créé par l'homme. 1.4 million de Palestiniens dans Gaza vivent dans ce qu'un envoyé des droits de l'homme des Nations Unies a récemment appelé "une prison".
Les incursions militaires destructrices d'Israël et la fermeture totale de Gaza au monde extérieur étranglent notre fragile économie et démoralisent notre société.
Les tanks et les bulldozers israéliens ont rasé nos maisons, ont détruit nos écoles et ont déraciné nos vergers. Pas même un sac de farine ne peut entrer dans Gaza sans l'approbation d'Israël.
Je suis confrontée quotidiennement aux conséquences de ces politiques.
Je vois des patients mourir d'un cancer parce que nous manquons de médicaments pour les traiter et Israël leur interdit d'aller à l'étranger pour se soigner.
Je vois des patients dialysés devenir de plus en plus malades parce que nous manquons d'électricité pour les appareils de dialyse après qu'Israël ait bombardé la seule centrale électrique de Gaza.
J'agonise devant la diminution de mes réserves de l'hôpital qui ne peuvent pas être réapprovisionnées en raison de la fermeture et de la crise financière.
J'entends l'artillerie ou les tirs israéliens et je sais que mon hôpital sera débordé avec des hommes gravement blessés, des femmes et des enfants, nécéssitant désespérément d'une attention médicale que nous ne pouvons pas fournir.
Les jeunes amies de ma fille sont terrorisées de quitter leurs maisons.
Elles sont traumatisées par les bombardements israéliens et craignent de devenir les innocentes victimes de la journée. Alors que je me rends au travail, je passe devant des marchés vides et des magasins fermés, et je vois des familles à la recherche de nourriture juste pour pouvoir passer la journée.
Selon l'ONU, les trois quarts des 1.4 million habitants de Gaza sont dépendants de l'aide alimentaire, et plus des deux-tiers vivent sous le seuil de pauvreté. Des récents sondages montrent que plus de 85% des gens souffrent de dépression. Ces chiffres décrivent un Gaza que je n'aurais jamais pu imaginer.
Bien que nous ayons vécu sous occupation pendant des décennies, nous n'avions jamais été affamés.
Les liens sociaux étaient forts ; les familles, les voisins et les amis venaient à l'aide des autres.
Pourtant après des mois de bombardements, de fermeture et de coupure de l'aide internationale, la société est au bout de ses capacités.
Je ne peux pas être la seule à craindre où mèneront ce désespoir et cette misère. Sûrement que d'autres doivent se demander ce qu'Israël espère gagner en transformant Gaza en la plus grande prison à ciel ouvert au monde.
Est-ce que l'économie d'Israël est menacée par les pauvres pêcheurs de Gaza, qui n'ont pas le droit de pêcher au delà de 100 mètres du littoral, ou par ses fermiers qui tirent le diable par la queue et dont les vergers sont rasés au bulldozer ?
Est-ce que les Israéliens mangent mieux en sachant qu'un million de Palestiniens sont au bord de la famine ?
Est-ce que la destruction de l'infrastructure de Gaza, de ses écoles, de ses hôpitaux, de ses petites entreprises apportera une paix durable à Israël?
Est-ce que tuer nos enfants apportera plus de sécurité aux enfants israéliens ?
Tragiquement, Israël n'a toujours pas appris que son peuple ne vivra jamais en paix tant que ses voisins, les Palestiniens, souffriront de l'injustice et de l'oppression.
En dépit des signes clairs d'une crise humanitaire, et de l'évidence qu'Israël exécute une punition collective à grande échelle, le monde reste en grande partie silencieux.
Les dirigeants du monde parlent souvent de la nécessité de s'occuper de la crise humanitaire au Darfour, mais ils sont muets devant la campagne implacable d'Israël destinée à mettre à genoux la population de Gaza.
Est-ce que les Palestiniens méritent moins l'attention du monde que les autres peuples opprimés, brutalisés ?
Les enfants palestiniens seront-ils superflus aussi longtemps qu'Israël déterminera que c'est dans son intérêt ?
Ce qui est particulièrement décourageant pour les Palestiniens, c'est le silence assourdissant des responsables américains, qui fournissent à Israël des armes qu'il utilise pour infliger la destruction à Gaza et la couverture diplomatique qu'il utilise pour éviter l'opprobre au niveau mondial.
Nous savons que l'Amérique a l'influence et le pouvoir de modérer Israël si seulement elle choisissait de le faire.
Nous demandons aux responsables américains d'appliquer les valeurs américaines de la justice, de la décence et des droits de l'homme.
Demander à Israël d'autoriser l'entrée dans Gaza de ravitaillements en médicaments, en matériaux de construction et en nourriture n'ébranlera pas la sécurité d'Israël.
Insister sur le fait qu'Israël reste modéré dans la destruction de l'infrastructure civile et dans son ciblage des secteurs peuplés ne mettra pas en danger la vie des Israéliens.
Persuader Israël de relâcher sa mainmise sur nos frontières et de permettre aux Palestiniens désespérément malades d'aller se faire soigner à l'étranger ne menacera pas l'existence d'Israël.
Ce sont des mesures concrètes que les responsables américains peuvent prendre pour aider à apporter la paix dans cette région en soutenant une politique qui mènera à libérer tout une population.
Source : http://imeu.net/
Traduction : MG pour ISM
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Mona El-Farra
30 octobre 2006