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Palestine - 30 novembre 2009
Par Haidar Eid
Haidar Eid est professeur associé de littérature anglaise à l’Université Al-Aqsa, à Gaza, en Palestine occupée. Il est un membre fondateur de l’ODSG (One Democratic State Group – Groupe pour un Etat Démocratique) et il est membre de la Campagne Palestinienne pour le Boycott Universitaire et Culturel d’Israël (Palestinian Campaign for the Academic and Cultural Boycott of Israel – PACBI).
L’un des principaux slogans de la campagne BDS repris par tous ceux qui ont souscrit à l’appel du BDS de 2005 déjà mentionné, appelle en fait à l’arrêt de la politique d’Apartheid pratiquée contre les Palestiniens depuis 1948. D’autant plus que, comme militants de l’Etat Unique, nous croyons fermement qu’on ne peut pas faire de différence entre les luttes du peuple palestinien, que ce soit en 1948 ou en 1967, c’est-à-dire en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza ou même dans la Diaspora et nous pensons que le projet national palestinien actuel ne règle pas toutes ces questions.
Dialogue : Peux-tu revenir sur l'origine de la campagne Boycott Désinvestissement Sanctions ?
Haidar Eid : L’appel du BDS remonte à 2004, quand a été lancée la Campagne Palestinienne pour le Boycott Culturel et Académique d’Israël. En 2005, le BNC, ou Comité National du BDS a été mis sur pied : il comprenait plus de 170 organisations de la société civile qui souscrivaient à l’appel du BDS. Désormais, la quasi-totalité des réseaux de la société civile palestinienne, y compris des organisations politiques nationales et Islamistes, a repris l’appel du BDS. Le BNC agit comme représentant de tous ces mouvements de la société civile qui ont souscrit à l’appel.
L’objectif premier du BDS est tout d’abord de mettre fin à l’occupation militaire de la bande de Gaza et de la Cisjordanie par Israël, de combattre la politique de colonisation et d’Apartheid pratiquée par Israël contre la population autochtone de la Palestine de 1948.
Dialogue : Tout Palestinien qui revendique le droit au retour boycotte de fait l'État d'Israël, fondé sur une politique de purification ethnique et d'épuration, que notre revue dénonce inlassablement depuis sa création (avec d'autres). Cependant, parmi les partisans du boycott (on pense aux institutions, à certains État, églises...), on trouve ceux qui veulent faire pression pour qu'Israël devienne un État démocratique. Une telle perspective est elle envisageable ? Tu es partisan de la solution d'un seul État. Comment peut-on lier la campagne BDS avec cette revendication ?
Haidar Eid : Etre partisan d’un Etat Démocratique Unique a pour corollaire, entre autres, de considérer qu’Israël est un état colonialiste et ségrégationniste et que les méthodes ou instruments de la lutte employés contre l’Apartheid en Afrique de Sud peuvent servir de modèle à notre lutte contre l’Apartheid en Israël. Faire d’Israël, État ségrégationniste constitué sur une base ethno-religieuse, une démocratie devrait être l’objectif de quiconque se prononce pour la démocratie libérale en général, et donc nous pensons que la seule solution pour mettre un terme à ce conflit généré par l’instauration d’un État raciste et ségrégationniste passe par des moyens démocratiques de désionisation de l’État d’Israël pour en faire un État pour tous, quels que soient leur race, religion, origine ethnique ou sexe.
Nous pensons que la pression de la communauté internationale exercée à travers une campagne de BDS dans le style de la campagne anti-Apartheid qui a mis un terme au régime d ’Apartheid en Afrique du Sud, pourra transformer Israël en État laïque après le retour des 6 millions de réfugiés Palestiniens qui ont fait l’objet du nettoyage ethnique de 1948, un État pour la TOTALITE de ses citoyens.
Dialogue : Le parallèle est souvent fait avec l'Afrique du Sud. Pourtant, dans ce pays, n'est-ce pas la peur d'un soulèvement populaire, d'une disparition violente du régime de l'apartheid qui a poussé les Nations Unies, et en premier chef les États-Unis à demander la réalisation des réformes pour sauver l'essentiel, c'est-à-dire le capitalisme sud-africain ? Nombreux sont les militants en Afrique du Sud qui considèrent que les négociations de Kempton Park ont sauvé le pouvoir économique des Blancs en plaçant des Noirs au pouvoir. Quel est ton point de vue là dessus ?
Haidar Eid : Je suis plutôt d’accord avec cette analyse et je pense que ce que nous avons vu en Afrique du Sud, c’est la fin de l’Apartheid politique mais malheureusement pas celle de l’Apartheid économique. Je pense que c’est aux forces progressistes d’Afrique du Sud de défendre les principes originels de la Charte de la Liberté. Malheureusement, la lutte des masses noires d’Afrique du Sud a vraiment été prise en otage par les huiles noires mais désormais, l’ordre du jour est purement social. Alors que le combat sud-africain a réussi à en finir avec l’Afrique du Sud de l’Apartheid, il a échoué pour ce qui est de garantir les droits socio-économiques de la majorité des masses noires de ce pays. En d’autres termes, oui, l’Afrique du Sud est tombée dans le piège de ce que Frantz Fanon appelle les pièges de la conscience nationale (raciale) en donnant la priorité à la race par rapport à la classe.
Dialogue : Nous posons de telles questions, parce qu’en Occident, les partisans les plus actifs de la solution des deux États (solution que nous considérons comme incompatible avec le droit au retour) reprennent à leur compte la campagne BDS. La prétendue solution des deux États implique de la part d'Israël la constitution de frontières officielles, ce qui est incompatible avec le sionisme, qui est par définition un mouvement prédateur et expansionniste. Cependant, la question du boycott ne se pose-t-elle pas jusqu'à la satisfaction des droits démocratiques du peuple palestinien - ce qui inclut les Palestiniens de 1948 - elle-même incompatible avec le sionisme ?
Haidar Eid : Absolument. Je suis tout à fait d’accord avec cette analyse et c’est pourquoi l’un des principaux slogans de la campagne BDS repris par tous ceux qui ont souscrit à l’appel du BDS de 2005 déjà mentionné, appelle en fait à l’arrêt de la politique d’Apartheid pratiquée contre les Palestiniens depuis 1948. D’autant plus que, comme militants de l’Etat Unique, nous croyons fermement qu’on ne peut pas faire de différence entre les luttes du peuple palestinien, que ce soit en 1948 ou en 1967, c’est-à-dire en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza ou même dans la Diaspora et nous pensons que le projet national palestinien actuel ne règle pas toutes ces questions. C’est pourquoi nous pensons que notre solution est la seule solution démocratique qui garantisse le droit au retour et l’égalité aux habitants de 1948, qu’ils soient Juifs, Musulmans ou Chrétiens. Le problème de l’idéologie d’Oslo, c’est qu’elle fait remonter la question palestinienne à la guerre de 1967, ce qui en fait revient à dire instituer un État Palestinien à l’intérieur des frontières de 1967, un État pour les Palestiniens musulmans et chrétiens. Nous pensons que c’est une solution raciste par excellence et par conséquent, nous pensons que l’un des principaux instruments de la lutte pour un État laïque démocratique est le BDS. Le BDS, cependant, n’est qu’une forme de résistance civile parmi d’autres, l’un des quatre piliers de la lutte que le mouvement anti-Apartheid d’Afrique du Sud défendait et définissait avec éloquence dans ses publications.
Global BDS Movement
ICI l’appel BDS en arabe, espagnol, français, italien, allemand, hébreu.
Intervention (en anglais) du professeur Eid, par vidéo-conférence entre Gaza et la Cisjordanie , lors d'un atelier sur le thème : "Promouvoir une culture de résistance", 4ème Conférence internationale sur la résistance populaire, Bili'in, mai 2009.
Source : Dialogue
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