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ISM France - Archives 2001-2021

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Israël -

Israel n’hésiterait jamais, mais ne peut tout faire

Par

Ameer Makhoul est directeur général de Ittijah - Union des associations civiles arabes - à Haïfa (Palestine)

Il n'existe pas un crime qu'Israël s'abstiendrait de commettre, ouvertement ou discrètement, à travers le pays ou à l'étranger.
Il n'existe pas, non plus, de limites à la décadence morale qui caractérise cet État, érigé, par un crime, comme entité coloniale ségrégationniste. Il ne peut en être autrement.
Cela dit, croire Israël capable de tout, voire le considérer comme un mythe placé au dessus des lois de la nature et de l'Histoire, est une erreur d'appréciation assez flagrante.

Israël convoite notre vaste Monde arabe et aspire à que ce dernier agisse selon un postulat bien défini : Israël est un mythe robuste, une entité légendaire, capable de tout, au courant de tout.

C'est cette stratégie défensive, cette équation basée sur la sécurité nationale israélienne - selon laquelle le Mossad peut intervenir là où il veut - que cet État a tenté de prétendre au cours de son histoire.



C'est dans ce contexte que se situent les grandes préoccupations palestiniennes et arabes quant au diagnostic de l'état de santé du président Arafat et des raisons de son décès, mais également les affabulations politiques concernant les causes de cette dégradation puis de cette disparition. Prétendre qu'Israël l'a empoisonné est plus complexe que cela.

Certes, Israël n'aurait pas hésité à commettre un tel crime, comme il l'a prouvé de par le passé, en public ou dans le plus grand secret. En tant qu'entité joignant l'officiel au populaire, Israël a exprimé ses sentiments vis-à-vis d'Arafat et du peuple palestinien par cet instinct vindicatif qui ne s'est intéressé exclusivement qu'à confirmer le décès du leader palestinien.

Durant l'attente de son décès - un décès synonyme de providence pour Israël, dans sa guerre contre Yasser Arafat et ce que celui-ci représentait - l'État, ses appareils, ses médias, son opinion publique, ont atteint un nouveau degré de bassesse et de décadence.

À travers cet instinct occupé à guetter la mort et confirmer le décès, Israël a échoué et il est apparu au grand jour que ses « experts » ne l'étaient pas en matière de « Yasser Arafat », que ceux-ci étaient bien loin de comprendre la réaction des mouvements populaires et notamment celui du peuple palestinien.



Les médias israéliens furent les plus mensongers.

Ils apparurent comme dénués de la moindre analyse sérieuse. En effet, ils agissaient en vertu du principe suivant : si Yasser Arafat n'est pas décédé lorsqu'ils l'ont eux-mêmes déclaré, une semaine plus tôt, le problème résidait alors en Yasser Arafat, aucunement en leur sincérité.

Leur libéralisme, dont le porte-flambeau n'est autre que le fameux ministre de la Justice Tomy Lapid, s'est manifesté, aux yeux de leur public qui n'hésite pas à danser sur le sang, de manière arrogante, coloniale, raciste.

Les plus libéraux d'entre eux ne se sont alors distingué en rien de ce soldat criminel qui, un mois auparavant, dans la bande de Gaza, avait vidé son chargeur dans le corps de la jeune Imane al-Hams alors qu'elle rentrait d'école, pour s'assurer, avec ses collègues, qu'elle était bien morte.



Pourtant, prétendre qu'Israël a commandité l'empoisonnement du leader palestinien est une légende qu'Israël nous invite à adopter.

Israël veut de nous, Palestiniens et Monde arabe, une énième reconnaissance de sa supériorité hors normes et notre soumission totale. Il peut, éventuellement, réussir politiquement face à des régimes arabes qui dépendent d'un soutien américain massif dans le cadre d'un redécoupage géographique sur le plan régional et d'une hégémonie encore plus prononcée sur le plan international.

L'expérience du peuple palestinien, cependant, réfute l'argument, d'un point de vue tout aussi politique que local. L'échec de l'enlèvement de Khaled Mach'al par le Mossad, en Jordanie, hante, encore à ce jour, les institutions militaires et de renseignement israéliens.

Fort de son hyper puissance militaire et technologique employée pour surveiller notre terre en Cisjordanie et à Gaza, Israël, en plus de ses revers politiques, est toujours incapable de réaliser ses objectifs sur le terrain.



Le plus important, c'est qu'Israël-tout-puissant, en dépit de ses institutions, son arsenal militaire, son alliance absolue avec toute administration américaine, a échoué à vaincre la volonté des peuples qui militent, en Palestine et au Liban.

Son mythe, auquel il a voulu nous faire croire à défaut d'y croire lui-même, s'est en cela brisé.



Qu'Israël renonce à la liquidation d'un Yasser Arafat assiégé au cours des dernières années dans sa Mouqata'a n'était pas le fruit du hasard ni signe de bonne foi de sa part. Il l'a voulu mort et craignait de le tuer.

Il savait que Yasser Arafat était le protégé d'un peuple palestinien, que celui-ci soutienne son chef historique ou s'oppose à lui, qu'il soit présent à ses côtés à Ramallah ou ailleurs, à travers le pays et la diaspora.

Tous le protégeaient, non seulement pour défendre sa personne mais pour défendre, à travers lui, l'existence palestinienne, ses revendications inaliénables, le mouvement de libération nationale, la résistance à l'occupation. Israël a tenté de prendre toutes les précautions face aux foules militantes dont Arafat avait exprimé les souffrances, les rêves de liberté, les désirs de mettre un terme à l'injustice historique.

Ce sont ces mêmes foules qui ont accueilli et honoré sa dépouille mortelle, en nom et place des millions de nos autres concitoyennes et concitoyens que les différentes occupations, depuis 1948, ont empêché de rentrer à leur pays, et, plus récemment, d'accéder à Ramallah.

Ce sont ces foules, souveraines, qui effraient un Israël qui pensait les avoir démuni, pour l'éternité, de toute volonté ou souveraineté.

L'imaginaire colonial et arrogant d'un éventuel enlèvement de la dépouille pour tenter de l'inhumer à Jérusalem s'est désagrégé ; Israël a cru à sa propre propagande et à sa stupidité.

Tel un gang de criminels, il a redouté les retombées de son crime et a mal mesuré la place que gardait le peuple palestinien pour son chef historique - un peuple résolu à mettre en ouvre un testament d'enterrer son raïs défunt à al-Aqsa, de plein jour, avec les honneurs qu'il se doit, si longue l'attente soit-elle.



Le rapport médical, qui comporte les causes du décès, concerne seuls les spécialistes.

Ce ne peut être une affaire de pronostics sur lesquelles les théories solides sont à construire. Il est tout à fait naturel, et humain, de douter de l'attitude d'Israël : Israël n'aurait pas hésité à empoisonner Yasser Arafat.

Toutefois, nous ne devons pas entretenir le mythe d'Israël en créant un «mythe Arafat», ni considérer ce leader, l'enfant et chef historique du peuple palestinien, comme a-historique ou supra-humain.



Le mythe de la personnalité d'Arafat est celui de la lutte nationale palestinienne de libération, qui a tenu tête à l'arsenal militaire le plus imposant face à une population démunie. Le parcours de Yasser Arafat est le parcours de tout le peuple palestinien.

C'est une lutte devenue un symbole mondial, axe principal des mouvements de solidarité et des défenseurs de la liberté aux quatre coins du globe.



La simplicité du débat palestinien portant sur la prédisposition d'Israël à empoisonner le président Arafat est en contradiction avec le militantisme du peuple palestinien.

Une différence existe entre faire porter à Israël la responsabilité du décès de Yasser Arafat en raison du siège auquel il a été soumis, d'une part, et affirmer qu'il est capable de l'empoisonner en dépit du fait que les cercles populaires et officiels israélien l'aient souhaité, d'autre part.



Ce qui est déroutant ici, ce sont les conséquences possibles de telles allégations sur la scène palestinienne, et notamment de persister à prétendre que le poison a été versé par des mains palestiniennes corrompues, proches de l'Autorité, ainsi de suite.

S'adonner à ce genre d'appréciations ne peut que mettre le feu à la maison palestinienne et, au lieu de s'en tenir à un désaccord dans le cadre de la pluralité politique, enfoncera notre peuple dans un conflit interne sanguinaire.

Si tel est le cas, ce sera une grande victoire pour Israël, lui qui jamais n'hésite à verser son poison dans les veines du peuple palestinien.

Nous nous devons d'empêcher de tels actes. Notre peuple est suffisamment capable de mettre en déroute cette politique suicidaire et réaliser ses aspirations de lutte pour la libération.

Source : www.arabs48.com

Traduction : El-Almawi

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