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Grande Bretagne - 14 novembre 2004
Par Gilad Atzmon
Gilad Atzmon est un écrivain israélien [Il est l’auteur du roman A Guide to the Perplexed, traduction anglaise de Philip Simpson, éditions Serpent’s Tail, Londres, 2002. (www.serpentstail.com). Clarinettiste et saxophoniste, il est un jazzman de réputation internationale
Durant les dix dernières journées de sa vie, le monde entier retint son souffle, assistant à ce qui semblait une bataille interminable entre un géant combattant de la liberté et l’ange de la mort. Beaucoup d’entre nous suivaient les informations avec soin ; beaucoup priaient pour la guérison du président.
Apparemment, pas tout le monde : nous avons eu aussi l’opportunité de voir certains ministres israéliens nécrophiles ne pas rater l’occasion d’en rater une : pour eux, ce fut l’occasion de s’amuser avec la fatalité : une occasion à ne pas gâcher. Ils ont tenté de nous convaincre, une dernière fois, qu’Arafat était un terroriste ; que l’idée qu’il soit enterré à Jérusalem, au milieu des « Rois juifs » était inconcevable.
Ces dirigeants israéliens ont tenu à nous dire que ce grand homme était un «ennemi de la paix». Mais il semble que leur perversité n’ait pas réussi à s’imposer.
A force, aujourd’hui, le monde est habitué aux politiciens israéliens et à leur manque total de manières, pour ne pas parler de leur manque de toute empathie. Et néanmoins, des ministres juifs et les médias israéliens ont eu la déconvenue de constater qu’une fois encore, le sadisme juif a été vaincu. A tout le moins, on a constaté qu’il était contre-productif.
Avec une couverture médiatique mondiale, sur tous les réseaux télévisés, Arafat a été enterré aujourd’hui, en dirigeant admiré d’envergure mondiale.
Arafat est sans doute le dernier « meneur de peuple » populaire. C’était un homme du peuple, qui n’était jamais devenu une marionnette américaine ni même un bureaucrate autocratique.
Trois années durant, le vieil homme vécut encerclé dans son QG bombardé et sa vie fut gravement menacée à de multiples reprises ; la Muqâta’ah, ce bâtiment où il passa la dernière année de sa vie, était à moitié démolie et elle menaçait de s’écrouler tout à fait, depuis plus de deux ans. Malgré son grand âge, sans électricité, sans eau potable, en dépit de l’humiliation quotidienne infligée par ceux qui colonisaient son pays, l’homme ne se rendit jamais.
Et néanmoins, les Israéliens n’ont jamais cessé : s’ils cessaient de le bombarder, c’est qu’ils voulaient le chasser. Mais l’homme ne capitula jamais. Offrant à son peuple le modèle exemplaire d’une dignité souveraine, il l’encouragea à résister. Ce qu’il fit.
Ce fut un choc, de se rendre compte que les politiciens et les médias israéliens ont été assez fous pour rudoyer le vieillard agonisant. Comment peut-on être à ce point dépourvu du sentiment le plus basique d’humanité ?
Les vieux sionistes travaillistes furent aussi sadiques que leurs successeurs de droite. Mais au moins firent-ils tout leur possible afin de dissimuler leurs réels motifs. Au moins ont-ils toujours prétendu être des amoureux de la paix. Il s’avère que les Israéliens aujourd’hui au pouvoir sont beaucoup plus nature.
Très semblables à leurs ancêtres des temps bibliques, ils ont opté pour l’attitude la plus vulgairement populiste : ils ont offert à leur populace le message de vengeance le plus sanguinaire qui se puisse imaginer.
L’identité israélienne est obsédée par la recherche de la notion de la revanche extrême. La sensation de s’abattre sur leurs ennemis sans défense comme une tonne de briques les remplit d’aise.
Cette philosophie plutôt étrange a mûri, fournissant la stratégie militaire et politique israélienne officielle. Le gouvernement israélien élu n’est là que pour fournir aux Israéliens le sang palestinien qu’ils réclament.
Le gouvernement israélien a fort peu de victoires à son actif sur un quelconque autre front, qu’il s’agisse de l’économie, de la sécurité sociale et singulièrement de la sécurité personnelle. Ils se spécialisent dans la fourniture à l’opinion publique israélienne d’un taux de mortalité palestinien particulièrement élevé. En termes tactiques, ils qualifient cela de « puissance de dissuasion ».
Mais, dans la pratique, une définition plus appropriée serait la soif de sang pure et simple.
A l’instar de leurs ancêtres bibliques, les Israéliens aiment voir leur ennemi battu à mort, qu’il s’agisse d’un vieil Arafat agonisant, ou d’une famille anéantie par les tirs d’un tank à Gaza. Aussi terrible cela paraisse, la douleur des autres emplit les Israéliens de joie.
C’est la seule explication possible aux activités meurtrières déployées par l’armée israélienne dans les territoires occupés. C’est la seule explication plausible pour leur rudoiement d’Arafat agonisant, alors même qu’il était évident qu’il n’en avait plus pour très longtemps. Le concept de compassion leur est totalement étranger.
Il apparaît désormais clairement que l’émancipation du peuple juif, qui conduisit à la naissance du sionisme et à son aboutissement – un Etat raciste, colonialiste et nationaliste – évolue aujourd’hui, sous nos yeux, vers son dernier avatar : une manifestation de sadisme. Israël est compromis dans la rudoiement quotidien du peuple palestinien. Quand le rudoiement devient ennuyeux, ils passent aux tueries ; quand les tueries ne les distraient plus, ils humilient Arafat mourant. Les Israéliens jouissent de leur pouvoir démesuré. Le jour venu, cela les amusera sans doute beaucoup de menacer toute la région avec leur colossal pouvoir de destruction nucléaire.
Dès lors, il n’est pas totalement surprenant que le monde occidental, et en particulier les Européens, tiquent un peu devant la dernière en date des manifestations du sionisme. Devant les événements en cours, ils ressentent une sensation de déjà-vu.
Pour les Occidentaux, la passion d’Arafat et le chemin de croix du peuple palestinien n’ont rien d’une révélation : il s’agit tout juste d’une répétition. Une répétition de la naissance de l’ensemble de l’ethos occidental, un ethos fondé sur la condamnation du sadisme et l’adhésion à l’empathie.
Israël suit le chemin inverse : il est l’incarnation narcissique de toute l’inhumanité concevable. Il est la célébration de la cruauté.
L’Histoire nous enseigne que lorsque le narcissisme sadique révèle son visage, on peut prévoir la fin. Les jours d’Israël sont comptés. Le jour où les sionistes se massacreront entre eux n’est plus très loin.
Article paru dans le Point d'information Palestine
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