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ISM France - Archives 2001-2021

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Jérusalem -

Mon voyage éprouvant à Jérusalem - la négation des droits religieux, même pendant le Ramadan

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Normalement, le trajet d’al-Khalil à al-Quds ne devrait pas prendre plus de 30 à 40 minutes. Cependant, pour la plupart des Palestiniens de Cisjordanie, le voyage se transforme en un épisode éprouvant de souffrances physiques et mentales à cause des restrictions israéliennes draconiennes. Au début du mois saint de Ramadan, les autorités israéliennes d’occupation ont annoncé que les Palestiniens de plus de 50 ans seraient autorisés à entrer à Jérusalem, mais seulement pour les prières de l’assemblée des fidèles du vendredi à al-Masjidul Aqsa (la Mosquée Aqsa).

Mon voyage éprouvant à Jérusalem - la négation des droits religieux, même pendant le Ramadan


La Mosquée, avec sa grande et belle esplanade, est considérée comme le troisième lieu saint islamique mondial, après la Mosquée Sacrée de La Mecque et la Mosquée du Prophète (paix et bénédictions sur lui) de Médine.

Selon les traditions, la récompense dans l’au-delà pour une seule raka’a (une unité basique de la prière rituelle) à al-Masjidul Aqsa vaut 500 fois plus que dans une autre mosquée.

Al-Masjidul Aqsa est aussi le lieu vers lequel le Prophète Mohammed (paix et bénédictions sur lui) a fait son voyage nocturne depuis La Mecque puis fut immédiatement emmené par l’archange Gabriel au trône de Dieu, au septième ciel. L’événement miraculeux est rapporté dans un chapitre spécial du Coran, nommé al-Isra’a, qui signifie « Le voyage nocturne ».

Ceci explique l’importance primordiale que les Musulmans en général et les Palestiniens en particulier attachent à ce lieu. Ceci explique aussi pourquoi des centaines de milliers de croyants veulent se rendre au sanctuaire de Jérusalem pour prier le Tout-Puissant, en particulier pendant le mois de Ramadan, au cours duquel les bonnes actions motivées par des intentions sincères sont récompensées (dans l’au-delà).

Venant juste d’avoir 50 ans, j’ai décidé de faire le voyage à la « première Qibla et Troisième sanctuaire », armé de l’espoir du croyant en la sérénité spirituelle et aussi de l’instinct du journaliste qui veut voir de ses propres yeux comment Israël métamorphose la cité à la beauté intemporelle en « la capitale d’Israël », en utilisant tous les moyens imaginables d’oppression et de nettoyage ethnique contre les citoyens palestiniens constamment pourchassés de la ville.

L'insupportable Shin Beth

Les Palestiniens de Cisjordanie ne sont pas autorisés à entrer à Jérusalem avec leurs propres voitures, à moins d’avoir un permis spécial délivré par le Shin Beth, l’agence de sécurité intérieure notoire d’Israël. Normalement, seuls les « bons gars » bénéficient de tels privilèges, c’est-à-dire ceux qui sont considérés comme « pacifiques » ou « collaborateurs ».

Ce qui veut dire que plus des 99% des Palestiniens ordinaires vivant en Cisjordanie (les Gazaouis ne peuvent même pas rêver d’aller à Jérusalem aujourd’hui) doivent subir le « contrôle de sécurité » habituellement méticuleux.

Je suis parti peu après l’aube, vers 4h20 du matin, heure locale. Une trentaine de minutes d’après, nous arrivions à l’atroce « passage frontalier » de Bethléem nord. Là nous avons débarqué, nous préparant mentalement à l’expérience cauchemardesque que nous allions devoir vivre.

Le « passage frontalier » de Bethléem est une jungle de toits de tôle ondulée, de couloirs étroits en acier, de grilles de métal, de portes à tambour, de tourniquets contrôlés à distance et de détecteurs de métaux.

L’endroit est aussi de fait une forteresse militaire, où grouillent des soldats à l’air borné et de fonctionnaires du Shin Beth. Le Shin Beth, on peut le dire sans se tromper, contrôle presque chaque aspect des vies palestiniennes, de l’obtention d’un permis de travail à celle d’un permis de voyage.

Aucun Palestinien, comme l’auteur de ces lignes, n’est autorisé à quitter la Cisjordanie sans l’accord du Shin Beth. Normalement, l’interdiction est motivée par des considérations aléatoires, comme se livrer à une opposition non violente à l’occupation israélienne. Le message est clair : les Palestiniens ne seront traités de façon humaine que s’ils sont passifs d’un point de vue politique.

Très vite, nous nous sommes retrouvés entassés dans cette allée longue et étroite qui mène aux guichets du Shin Beth, à 100-150 mètres, où les papiers d’identité sont vérifiés. L’expérience fut particulièrement cauchemardesque parce que des centaines de personnes étaient prises en sandwich entre deux grilles d’acier, et avançaient au pas de l’escargot. Les femmes passaient par une allée différente et étaient soumises à un examen considérablement moindre.

Après environ une heure de cohue, nous avons finalement rejoint une autre longue file pour le pénible contrôle de sécurité. J’ai vu quelques Palestiniens âgés, de plus de soixante ans, être refoulés pour des « raisons de sécurité ». Je n’arrivais pas à comprendre comment ces personnes âgées pouvaient constituer une menace à la sécurité d’Israël. Mais c’est un mantra dont l’invocation justifie n’importe quoi, dès qu’il est question d’Israël.

Certains de ceux qui avaient été refoulés étaient visiblement tristes de leur malchance. D’autres, dans la file, se consolaient en se disant que le Tout-Puissant les récompenserait d’avoir essayé.

J’avais moi aussi le cœur dans les talons, redoutant d’être refoulé pour des « raisons de sécurité ». Mais cette fois, j’ai à l’évidence eu de la chance puisque l’ordinateur du Shin Beth a décidé de me donner le bénéfice du doute.

Al-Quds est musulmane

J’ai été extrêmement soulagé de pouvoir finalement entré dans la Vieille Ville de Jérusalem et de rejoindre les autres Musulmans pour cet immense rassemblement dans l’un des lieux les plus saints de l’Islam.

Après que j’ai arpenté le couloir de sortie (les couloirs sont omniprésents à cet endroit !!), je suis immédiatement monté à bord d’un autobus qui allait à al-Quds. 15 minutes après, nous étions devant Bab El-Amud (Porte de la Colonne), appelée aussi Porte de Damas, une des neufs principales entrées de la Vieille Ville.

Ainsi j’ai pu marcher dans les rues et ruelles grouillantes et animées de cette ville antique dont chaque pierre et chaque recoin a le parfum de l’histoire.

Sur notre chemin, nous avons vu de nombreux immeubles rachetés ou expropriés grâce à des magouilles « légales » par les intérêts juifs coloniaux. Israël déploient toute son énergie et sa rage à confisquer et judaïser autant que possible de Jérusalem Est, usant de tous les moyens concevables de tromperie et de manipulation.

Des soldats et des gardes armés surveillent constamment les immeubles, essayant de créer « des zones de sécurité » physiques aussi bien que mentales dans le voisinage des immeubles, apparemment pour intimider les Palestiniens, dans le seul but de judaïser la ville, bâtiment par bâtiment, recoin par recoin, et même pierre par pierre.

Nous sommes arrivés à Haram al-Sharif (l’esplanade de la Mosquée Aqsa) tôt le matin, à peu près une demi-heure après le lever du soleil, pour trouver des milliers de gens se promenant sur l’arène spacieuse ou assis, immergés dans la contemplation. La plupart des fidèles venaient de la Cisjordanie , mais beaucoup également des villes et villages arabes de l’autre côté de la Ligne Verte, à l’intérieur d’Israël.

Le Haut Conseil Musulman, qui s’occupe de l’immense complexe, semble faire un très bon boulot, gardant l’endroit dans le meilleur état. C’est particulièrement visible pendant le mois de Ramadan où des dizaines de milliers de personnes viennent pour les prières du vendredi et de la nuit (tarawih).

Le Conseil emploie aussi des dizaines de gardiens armés dont le travail principal est de surveiller les éventuelles tentatives des groupes extrémistes juifs, et aussi des chrétiens évangélistes sionistes, d’attaquer et de vandaliser les lieux. De nombreux groupes juifs, certains affiliés au gouvernement israélien, disent publiquement que leur but ultime est de détruire al-Masjidul Aqsa et son autre mosquée jumelle, le Dôme du Rocher, pour construire un temple juif à leur place.

Quelques juifs messianiques croient que la destruction des lieux saints islamiques de Jérusalem accélèrera l’avènement du Messie juif, ou Rédempteur, qui assujettira le monde entier et entraînera la « rédemption » des Juifs.

De tels desseins sont pris très au sérieux par les autorités musulmanes. Les fonctionnaires du Waqf (dotation religieuse) musulman affirment de façon convaincante qu’Israël essaie très progressivement de s’emparer du Haram al-Sharif ou de le détruire, résultat d’une série de tunnels creusés ces dernières années.

Adnan al-Husseini, chef du Haut Conseil Musulman, décrit les mesures israéliennes comme faisant partie d’ « un projet dangereux de démolition de la Mosquée Aqsa. »

« Si nous voulons appeler les choses par leurs noms, nous devons considérer les desseins israéliens et les complots contre al-Masjidul Aqsa comme des actions délibérées et bien planifiées de terrorisme visant à démolir les mosquées et à judaïser ces édifices islamiques. »

Beaucoup des fidèles étaient simplement assis sur des tapis qu’ils portent eux-mêmes, récitant le Coran ou faisant leurs prières. D’autres parcouraient le lieu, inspectant les nombreux sites historiques dont beaucoup remontent à des centaines d’années.

En tout, au moins un quart de million de personne sont venues à Haram al-Sharif, et les responsables du Waqf ont dit que le nombre aurait doublé si les Israéliens avaient autorisé des gens plus jeunes à entrer dans la ville.

Comme une provocation, un hélicoptère de la police bourdonnait au-dessus de nos têtes, une manière de nous dire « nous contrôlons ». Ceci en plus d’un énorme ballon équipé d’une grosse caméra surveillant les lieux et les mouvements des fidèles. Bientôt, ce fut l’heure du khutba du vendredi (le sermon), et le docteur Sheikh Ikrema Sabri, savant musulman émérite, a remercié les fidèles à jeun, leur disant que leur présence même constituait un message à Israël, à savoir que cet endroit est, était et serait toujours islamique.

Sheikh Sabri a souligné que la foi islamique croissait partout dans le monde, pas à cause de la puissance militaire ou économique des Musulmans, mais plutôt à cause de la force intérieure, de la cohésion et de la cohérence de l’Islam. Le Sheikh a fustigé avec force ceux qui veulent reconnaître Israël en tant qu’ « Etat juif », disant que le faire équivalait à une condamnation à mort de l’importante communauté palestinienne en Israël. Sabri a aussi réitéré une fatwa antérieure, ou édit religieux, statuant que tout Musulman vendant une terre ou un bien aux intérêts juifs coloniaux n’était « plus considéré comme membre de la Ummah musulmane, ne pourrait recevoir les rites finaux au moment de sa mort ni être enterré dans un cimetière musulman. »

A la fin de la khutba et après avoir fait une rapide prière, la plupart des fidèles se sont dispersés dans la Vieille Ville, pour faire des courses et simplement pour rentrer chez eux.

Pour ma part, je n’en avais pas particulièrement envie et j’ai décidé de m’attarder un peu, peu sûr de pouvoir le refaire.

Je verrai vendredi prochain.

Source : Islam On Line

Traduction : MR pour ISM

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