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Israël -

Recherché pour crimes contre l’état

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Durant plusieurs années, Azmi Bishara était l’une des voix les plus importantes représentant les 1,5 millions d’Arabes vivant en Israël. Mais maintenant il est un fugitif, affrontant quelques unes des plus sérieuses allégations jamais faites contre un député israélien.
Qu’est ce qui s’est passé ?
Dans une rare interview, il parle à Rory McCarthy.

Recherché pour crimes contre l’état

Quand la guerre a éclaté au Liban l’été dernier, il y’a eu peu de voix dissidentes en Israël. Des sondages publics montraient un soutien public sans précédent au conflit.
Des hommes politiques et des experts remplissaient les studios de télévision pour soutenir qu’Israël se battait pour sa survie dans sa guerre pour se débarasser du Hezbollah.


Mais un député israélien voyait les choses différemment. Il a écrit que le Hezbollah était un mouvement de résistance se battant dans une guerre menée par un gouvernement israélien dirigé par "des médiocres, des lâches et des opportunistes" qui étaient responsables d’un "vandalisme barbare et du ciblage délibéré des civils".

Après une dizaine d’années comme député dans le Knesset, Azmi Bishara, politicien, auteur et académicien, s’était forgé une réputation comme étant le personnage politique le plus critique à émerger de la minorité arabe d’Israël.

Peu après la fin de guerre, Bishara et une poignée de députés de son parti politique "Balad" se sont rendus en Syrie et au Liban, deux "Etats ennemis", où il a continué à dénoncer son gouvernement. Il n’a pas eu à attendre longtemps pour une réaction : en septembre, le procureur général israélien demanda à la police de commencer une enquête criminelle.

Ce n’était pas la première enquête sur les activités de Bishara, alors il n’a pas été pas surpris quand, six mois plus tard, il a été appelé au commissariat de police de Petah Tikya, proche de Tel Aviv, pour interrogation. Par deux fois il a rencontré deux officiers de police, et puis il est parti pour ce qui était, isiste-il, une tournée de discours préplanifiée en Jordanie.

C’est seulement quand il a été parti que les enquêteurs ont laissé filtrer des détails de l’affaire à la presse israélienne.
Bien que Bishara n’ait pas été inculpé, il s’est avéré qu’il était sous enquête pour blanchissage d’argent, contact avec un agent étranger, fourniture d’informations à l’ennemi et, plus sérieusement, assistance à l’ennemi durant la guerre – une charge qui peut être sanctionnée par la peine de mort.

Ce sont quelques unes des plus sérieuses allégations jamais portées contre un député israélien et qui signifient effectivement que Bishara doit soit rester en exil à l’étranger ou rentrer pour affronter la perspective d’une condamnation à une longue peine de prison, voire pire.

Mais Bishara est aussi le plus important défenseur des droits politiques des Arabes en Israël et les investigations ont montré un clivage grandissant dans la société israélienne entre la majorité juive et la minorité palestinienne de 20%.

Bishara n’est pas retourné chez lui. En avril il a remis sa démission de la Knesset à l’ambassade israélienne au Caire. Maintenant, il vit avec son épouse et leurs deux enfants dans un appartement d’un ami à Amman en Jordanie.

"L’action symbolique de me faire venir au procès et de me condamner – ils le veulent. Je sais qu’ils le veulent," dit-il dans une rare interview au Guardian.
"Je ne vais pas les laisser réussir ; je suis toujours deux pas en avant." Il s’assoit dans le sofa, vêtu dans une chemise polo et un pantalon chinos avec ses téléphones portables posés sur la table à café. Sur un bureau derrière lui, il y a un PC portable et le brouillon d’un nouveau livre qu’il est en train d’écrire sur la démocratie dans le monde arabe.

Bishara dément l’accusation qu’on lui fait et affirme que la vraie raison de l’enquête n’est pas ses actions durant la guerre contre le Liban mais c’est son appel qu'il tient de longue date et largement diffusé pour un changement fondamental dans la nature de l’état israélien : c’est sa croyance que le pays ne doit plus être un état juif mais doit protéger les droits les Arabes et devenir un "Etat pour tous ces citoyens".

"Ils veulent condamner toute l’idéologie politique et l’utiliser comme si c'était une couverture pour un autre type d’activité qui n’est pas vrai", dit-il.

En mars, le journal très répandu Yedioth Ahronoth a publié une histoire disant que des écoutes téléphoniques ont mené le Shin Bet, les services de renseignements israéliens, à enregistrer des conversations de Bishara durant la guerre.

L’histoire racontait qu’il avait parlé à des "contacts du Hezbollah" et les avait dirigés vers des "cibles optimales pour leurs missiles".
Elle racontait aussi qu’il avait obtenu des "centaines de milliers de dollars en liquide" via des cambistes de Jérusalem Est, en utilisant des mots de code comme « livre » qui voulait dire 50000 dollars selon le journal, « anglais » qui voulait dire dollars et « hébreu » qui voulait dire shekels.

Le journal a rapporté que "les enquêteurs avaient déclaré qu’ils savaient que Bishara utilisait des mots de code parce qu’il soupçonnait qu’il était mis sous écoute ; ils avaient dit qu’ils avaient éclaté de rire quand Bishara avait placé un ordre pour un ‘demi livre en anglais’, voulant dire 25000 dollars".

Bishara insiste sur le fait que les allégations ne sont pas vraies ; Il dit qu’il n’a parlé à personne du Hezbollah durant la guerre. "Est-il vrai que j’étais au téléphone ? Oui, et les gens écoutaient. Mais parlais-je au Hezbollah ? La réponse est non".

Il a effectivement parlé à des politiciens et des journalistes en Syrie et au Liban, mais il dit qu’il n’avait aucune information secrète à donner. "Nous n’avons pas ce genre d’informations à donner à qui que ce soit," dit-il. "Qu’est ce que je pouvais dire qui n’était pas dans les médias ? C’est incroyable. Ce n’est pas sérieux du tout "

Les allégations sur le blanchissage d’argent, dit-il, sont des "sottises", et quand il a utilisé le mot "livre" dans ses conversations téléphoniques avec un cambiste, il dit qu’il parlait à propos des livres qu’ils avaient prêté l’un à l’autre. "C’était à propos de livres, vraiment à propos de livres. Il continuait à me prendre des livres et à m’en donner. C’est un vrai collectionneur de livres. Il lit. Mais c’est tout", dit-il. "Toute l'affaire n'est que la transformation d'une activité politique, idéologique et intellectuelle en une suspicion sécuritaire".

Bishara est un Catholique et un homme de Gauche, né dans une famille de petite bourgeoisie de Nazareth. Son père était inspecteur sanitaire, syndicaliste et ancien communiste, sa mère était enseignante.

Durant la guerre de 1948, quand des centaines de milliers de Palestiniens ont fui ou ont été forcés de quitter leurs maisons, la famille de Bishara est restée dans le pays qui est devenu Israël.

Bishara a étudié à Haifa et dans des universités Hébreues, et ses relations avec le Parti communiste lui ont offert la chance d'obtenir un doctorat en Philosophie à l’université Humboldt à Berlin Est dans les années 80. Comme la plupart des Arabes en Israël, il rejette les définitions de l’establishment et décrit sa nationalité comme simplement un Palestinien Arabe.

Né dans une ville israélienne huit ans après la création de l’état d’Israël, il porte la nationalité israélienne, ce qui fait de lui un membre de la minorité arabe de 20% du pays et lui donne le droit de vote et de se présenter aux élections parlementaires.

Il peut retrouver la trace de sa famille sur des centaines d’années en arrière dans un village au nord de Nazareth, dans ce qui est aujourd’hui le nord d’Israël.

Avant sa démission, son parti politique « Balad » avait quatre sièges à la Knesset dans un pays où beaucoup d’Arabes israéliens ont tendance à voter pour les partis politiques les plus importants, notamment le Parti Travailliste –participant actuellement à la coalition gouvernemental.

Même Bishara reconnaît qu’il n’y a pas de large soutien populaire pour ses idées parmi sa propre communauté. Un sondage d’opinion au début de cette année a montré que les trois-quarts des Arabes israéliens soutiendraient une constitution décrivant Israël comme un état juif et démocratique.

Cependant, ces derniers mois, cela a commencé à changer. D'abord, le racisme contre les Arabes en Israël augmente, selon au moins un récent sondage.

Dans une enquête pour le Centre Contre le Racisme, un sondage réalisé auprès des Juifs israéliens a trouvé que plus de la moitié croyait que c’est une trahison pour une femme juive de se marier avec un homme arabe ; 40% disaient que les Arabes ne devraient plus avoir le droit de vote aux élections parlementaires ; et 75% s’opposaient à ce que les immeubles d’habitation soient partagés ente les Juifs et les Arabes.

En même temps, de plus en plus d’Arabes israéliens célèbres adoptent des idées similaires à celles de Bishara et proposent un défi fondamental à la nature juive de l’Etat. Quatre documents séparés ont émergé depuis décembre, chacun présentant un cas similaire.

Adalah, un groupe pour les droits de l’homme (Adalah, ‘Justice’ en Arabe, est un groupe palestinien basé en Israël pour la défense des droits la minorité arabe en Israël, ndt.), a publié une version préliminaire de la constitution qui stipulait qu’Israël devrait être défini non pas comme un Etat juif mais comme un "état démocratique, bilingue et multiculturel".
Il appelle à mettre une fin à la Loi du Retour, qui donne la nationalité automatiquement à toute personne avec au moins un grand-parent juif, et il appelle Israël à "reconnaître ses responsabilités pour les injustices passées subies par le peuple palestinien".

Puis, en début de ce mois, dans une remarquable interview avec le journal Haaretz, Avraham Burg, un ancien porte-parole juif du Knesset et ancien Président de l’Agence Juive, a exprimé sa propre dénonciation de la structure d’Israël.

"Cela ne peut plus marcher", a-t'il déclaré. "Définir l’état d’Israël comme un état juif est la clé pour sa fin. Un état juif est explosif. C’est de la dynamite. "
Burg a aussi appelé à un changement de la Loi du Retour et a été très critique vis-à-vis de ce qu’il a appelé le "Sionisme conflictuel" d’Israël.

Pour Bishara, de tels commentaires ne font que renforcer ses opinions tenues de longue date. "Tout est dit comme s’il y avait un éléphant dans un magasin de porcelaine et personne ne veut en parler, c’est ce qu’on appelle un Etat pour tous ces citoyens ", dit-il. "Mais l’idée a gagné du terrain. Cette idée maintenant est le véritable rival de l’état sioniste. C’est la première fois qu’on a un vrai défi".

La Loi du retour, argumente-t'il, est un problème fondamental, comme c’est l’idée d’un état à la fois juif et démocratique.
"Le problème avec cet Etat c'est qu’il ne peut accorder une égalité. Il ne peut séparer la religion et l’état et il aura toujours une mission idéologique qui l’empêchera de s’intégrer dans la région ou de servir ses citoyens".
Il décrit Israël comme une "démocratie coloniale".

"La relation de base entre un Etat et ces citoyens devrait être la citoyenneté, et non une affiliation ethnique ou religieuse", dit-il. "Qui est un citoyen en Israël ? Est-ce que mon cousin au Liban qui a quitté le pays en 1948 est autorisé à rentrer ou non ? C’est basique. Mais quelqu’un qui peut prouver que sa mère est juive, de Brooklyn – il peut venir".

Cependant, la réalité est qu’il y a peu de chance pour que l’une de ces idées devienne une loi dans le proche avenir. Israël n’a pas de constitution et, bien qu’il y ait fréquemment des débats sur ce à quoi pourrait ressembler une version préliminaire, il demeure de grandes différences sur d’autres sujets au-delà des relations juives-arabes, notamment la lourde question sur la relation entre les Juifs religieux et laïcs.

Il y a eu une dure réaction à ce défi idéologique. Yuval Diskin, le chef du Shin Bet, a été cité en début d'année en mettant en garde qu’une radicalisation de la minorité arabe israélienne était une "menace stratégique à l’existence de l’état".

En mars, un député de Droite a proposé un projet de loi à la Knesset qui demanderait dans l’avenir à tous les députés de prêter serment de loyauté à Israël en tant qu'Etat juif et à son hymne national et à son drapeau.

"Nous devons tout faire pour garder Israël en tant qu'Etat juif", a déclaré Arnon Soffer, chef du département de Géostratégie à l’université d'Haïfa et un défenseur de premier plan de l’argument que les Arabes israéliens et les Palestiniens constituent une "menace démographique" pour les Juifs.
"Il est clair pour moi que devenir une minorité dans cette région est la fin du peuple juif, du rêve juif, de l’état juif
", a-t'il déclaré.
"Ils utilisent des mots comme ‘démocratie’, mais s’ils sont au pouvoir, c’est la fin de la démocratie. Nous devons arrêter d’être naïfs".

Bishara n’accorde pas de considération à ceux qui prétendent que les Arabes ont déjà suffisamment de droits en Israël – notamment une citoyenneté, le droit de vote et le droit de s’exprimer librement. Ce ne sont que des concessions, dit-il.
"Vous avez pris la terre et m’avez donné la liberté de parole ", dit-il. "Qui gagne ici ? Revoyons l’accord. Prenez votre liberté de parole et rendez-moi la Palestine. Qu’en pensez-vous ?"

Plus le conflit entre les Israéliens et les Palestiniens durera, dit-il, plus les Arabes israéliens et Palestiniens dans les Territoires Occupés vont se rapprocher et l’argument pour un seul état binational va devenir plus fort, un argument qu’il privilégie clairement.

"Si cela continue comme maintenant, à la fin les questions des Arabes en Israël et des Palestiniens en Cisjordanie et dans Gaza vont se rencontrer", dit-il.

"Binational signifie que les Arabes devraient aussi reconnaître que les Juifs sont une nationalité. Cela ne veut pas dire la destruction de l’état. Cela veut dire que deux entités politiques devront vivre ensemble. C’est un grand compromis".

Source : http://www.guardian.co.uk/

Traduction : IA

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