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ISM France - Archives 2001-2021

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USA -

Courtiser et contrer les sionistes chrétiens

Par

Nadia Hijam est membre de l'Institut pour les Etudes Palestiniennes (http://palestine-studies.org/) et co-directeur de son bureau de Wahington. Brian Wood, assistant-chercheur de l'Institut, a suggéré le thème de cette Note politique et a participé à la réflexion et à la recherche de données.

Nonobstant leur programme apocalyptique, les Chrétiens Unis pour Israël, le tout dernier groupe pro-israélien sur la scène washingtonienne, sont courtisés par des candidats aux élections présidentielles aussi sérieux que le Sénateur John Mac Cain. Les Chrétiens évangéliques pour la paix et les Juifs s'opposent à leur programme fondamentaliste. Sont-ils proches d'Israël et de l'AIPAC ? Et quelles sont les conséquences pour le Moyen Orient ?

Courtiser et contrer les sionistes chrétiens


Réunion de Christians United for Israël (CUFI). Le révérend John Hagee au meeting de préfiguration du CUFI (7 février 2006) (photo Réseau Voltaire)

Les Chrétiens Unis Pour Israël (Christians United For Israël – CUFI) du Pasteur John Hagee ont attiré plus de 4.000 participants à leur deuxième convention annuelle, qui s'est tenue à Washington DC du 16 au 19 juillet 2007, près de 1.000 de plus qu'en 2006.

L'organisme, qui se décrit lui-même "à but unique", est la progéniture récente de relations entre les sionistes chrétiens des USA, qui sont évalués à quelques 20% des évangélistes états-uniens, et de la droite israélienne, relations qui remontent aux années 1970. Elles ont débuté en réponse aux critiques grandissantes de la politique israélienne sur les Droits de l'Homme par les principales églises protestantes, ainsi qu'à la déclaration de l'ancien président Jimmy Carter, lorsqu'il a dit en 1977 que les Palestiniens avaient besoin d'une patrie (1). Feu le Premier Ministre israélien Menachem Begin fut l'un des premiers israéliens à tendre la main aux Sionistes chrétiens US, et l'ancien Premier Ministre et actuel chef du Likud Benjamin Netanyahu a cultivé ces liens avec assiduité.

Le programme CUFI est-il proche de l'AIPAC et de la droite israélienne ?

Les CUFI disent qu'ils ne sont pas un comité d'action politique mais une "association à but non lucratif" dont les fonds servent à éduquer "la communauté chrétienne... sur les raisons bibliques pour lesquelles les Chrétiens doivent soutenir Israël."

Les observateurs des CUFI pensent que leur apparition sur une scène pro-israélienne déjà encombrée doit plus au Comité des Affaires Publiques Américano-Israéliennes (American Israël Public Affairs Committee - AIPAC ), dont le soutien a été jusqu'à imprimer le matériel de la conférence des CUFI en 2006 (2).

Le programme de lobbying des CUFI reflète celui de l'AIPAC et de la droite israélienne. Les brochures imprimées données aux participants de la Conférence 2007 listaient les questions à discuter lors des visites à leurs membres du Congrès :

* Arrêter le programme nucléaire iranien en appliquant des pressions diplomatiques et économiques et en leur indiquant que l'action militaire est une option.

* Faire pression sur les Nations Unies pour renforcer les Casques Bleus au Liban selon la Résolution 1701 des Nations Unies pour "combattre plus activement la contre bande d'armes du Hezbollah".

* Fournir de l'aide militaire à Israël.

Ces mêmes thèmes sont en exergue sur le site web de l'AIPAC . De plus, selon son directeur administratif David Brog, Netanyahu a personnellement appelé Hagee en juin dernier l'enjoignant d'initier des campagnes partout aux Etats-Unis pour désinvestir d'Iran les fonds de pension nationaux.

Qui gagne quoi ?

Le lobby pro-Israël et la droite israélienne ont tout à gagner d'une organisation comme CUFI :

* Un nouveau bloc important de votes pour parlementer avec le Congrès à un moment où de plus en plus d'Américains et de Juifs américains remettent en cause – avec une efficacité grandissante – le soutien inconditionnel à Israël qui permet de coloniser la terre palestinienne et nie les droits palestiniens (3).

* Des liens étroits avec des avocats qui représentent des circonscriptions électorales à petites communautés juifs sur lesquelles l'AIPAC a moins d'influence (4).

* Une autre source de revenus ; selon le journaliste d'investigation Max Blumenthal, la droite chrétienne a été la principale source des revenus du tourisme d'Israël.

CUFI s'est introduit dans les réseaux et le pouvoir du lobby pro-israélien dans sa quête pour hâter le Second Avènement du Messie. Les sionistes chrétiens croient que cela arrivera lorsque les Juifs se seront rassemblés sur les terres bibliques s'étendant du Nil à l'Euphrate. Comme le résume de façon acerbe M.J. Rosenberg, du Forum politique Israël, dans "Aimer Israël jusqu'à la mort", cela se produira lorsque la Bataille d'Armageddon conduira à la mort de la majorité des Juifs et au sauvetage de quelques 144.000 d'entre eux après leur conversion au Christianisme (5).

On peut penser que les événements au Moyen Orient conduiront à une telle conflagration. Par exemple, les sionistes chrétiens pensaient que le jour du jugement dernier était proche lors des attaques israéliennes au Liban en 2006, et c'est la raison pour laquelle CUFI a insisté pour retarder le cessez-le-feu (6).

Les ennemis communs incluent : "les islamo-fascistes" (mot ressassé à la Conférence CUFI) ; la Middle East Studies association (MESA) ; Sabeel, le mouvement Å“cuménique chrétien palestinien de théologie de libération ; John Mearsheimer et Stephen Walt pour "The Israël Lobby" et Jimmy Carter.

Les deux bords ont dû faire des compromis pour cimenter leur alliance. Le lobby pro-Israël et la droite israélienne minimisent les croyances eschatologiques bien qu'elles représentent des anathèmes pour la plupart des Juifs. CUFI lui-même met la pédale douce sur son discours sur 'la fin des temps" et promeut ses Nuits pour Honorer Israël comme " événement de non-conversion".

Hagee a également relativisé son inquiétude sur le fait que le processus de paix au Moyen Orient obligerait Israël à rendre de la terre aux Palestiniens et ralentirait le Second Avènement. Toutefois, le discours du Président US George Bush du 16 juillet 2007 appelant à une conférence internationale sur la question palestino-israélienne a coïncidé avec la conférence des CUFI, qui ont pensé qu'ils devaient y répondre en ajoutant un quatrième point de lobbying, à qui ils ont donné la priorité, aux trois cités plus haut : "L'Amérique ne doit pas faire pression sur Israël pour rendre des terres dans le climat actuel".

Les CUFI sont-ils puissants – et quelle est la force de l'opposition aux CUFI ?

On estime à 75 millions le nombre des évangéliques aux Etats-Unis, environ un quart de la population. Alors qu'Hagee représente près d'un cinquième de ce chiffre, c'est une minorité en pleine expansion. On dit qu'un quart des membres du Congrès sont des évangéliques, et beaucoup de députés US représentent des régions à forte population évangélique. Remarquant avec quelle facilité Hagee avait accès à la fois au Congrès et à l'Administration, Blumenthal pense que les CUFI représentent la base républicaine dans un Washington dominé par les Républicains. Les CUFI ont des sections dans les 50 Etats.

L'influence de la droite chrétienne pro-israélienne a entraîné un contre-mouvement parmi les évangéliques. Le 27 juillet 2007, 34 dirigeants évangéliques de premier ordre ont envoyé à Bush une lettre disant que les Israéliens et les Palestiniens ont "des droits légitimes", et qu'ils soutiennent la création d'un Etat palestinien (7).

Des organisations protestantes se sont élevées contre les CUFI. En juillet 2007, le Conseil National des Eglises a déclaré que "la plupart des Chrétiens ne partagent pas les objectifs des CUFI" et ont attaqué leur "calomnie permanente de l'Islam" (8).

Les Chrétiens palestiniens se sont aussi élevés contre eux, par exemple le 22 août 2006, lors d'une déclaration du patriarche et des chefs locaux des églises de Jérusalem : "Nous rejetons catégoriquement les doctrines des Chrétiens sionistes comme enseignement faux qui corrompt le message biblique d'amour, de justice et de réconciliation."

Pour l'instant, toutefois, les CUDI tiennent le haut du pavé et leur capacité à gagner de l'argent et des votes ne fait aucun doute, ce qui a poussé McCain à faire une visite impromptue à la Conférence de juillet 2007, où il fut entouré sur l'estrade par le conseil d'administration CUFI au complet.

La visite de McCain a semblé contradictoire avec sa position déclarée de faire de la paix palestino-israélienne la deuxième priorité de sa présidence, s'il était élu, étant donné la position des CUFI contre toute restitution de terre palestinienne par Israël.

Et pourtant, McCain a dit aux militants CUFI : "Dieu vous bénisse pour votre engagement". Malheureusement, McCain n'est pas le seul personnage important au Congrès, dans l'Administration et au-delà, à avoir tendu la main aux CUFI, même si ce geste condamne toutes les partis au Moyen Orient à un prochain bain de sang.

Notes de lecture :

[1] Interview avec Don Wagner, professeur et expert en sionisme chrétien. On pense également que le Rabbin Yechiel Eckstein, l'Ambassadeur de Bonne Volonté du gouvernement israélien auprès des évangéliques, a joué un rêle dans la création des CUFI.

[2] Interview avec le Rabbin Haim Belaik qui, avec Jane Hunter, a créé le site Jews on First ! pour défendre "le premier amendement contre le droit chrétien… parce que si les Juifs ne le dénoncent pas, ils penseront que nous nous en fichons." Voir la couverture totale de la Conférence de lobbying des CUFI en 2007 par Jane Hunter sur le site Jews on First !

[3] Par exemple, Stephen Walt et John Mearsheimer, qui ont apporté de nouveaux éléments sur le rêle du lobby pro-Israël dans la politique des USA dans leur essai "Le lobby israélien" annoncent un nouveau livre, à sortir le 4 septembre 2007 : "The Israël Lobby and U.S. Foreign Policy", Farrar, Straus, et Giroux. ("Le lobby israélien et la politique étrangère des Etats-Unis). Et le groupe "Voix juive pour la paix" a tenu sa première conférence nationale en Avril 2007 et a créé le site Muzzlewatch qui veut traquer "les tentatives pour étouffer un débat public sur la politique étrangère US-Israël."

[4] Jewish Journal, 30 mars 2007.

[5] Article du 27 juillet 2007.

[6] Max Blumenthal, interview avec Amy Goodman sur "Democracy Now", 15 August 2006.

[7] The New York Times, 29 July 2007. Parmi les signataires, on trouve : Gary M. Benedict, président de "The Christian and Missionary Alliance", dénomination de 2.000 églises ; Richard E. Stearns, président de "World Vision" ; David Neff, rédacteur en chef de "Christianity Today" et Berten A. Waggoner, directeur national et président de "The Vineyard USA", association regroupant 630 églises aux Etats-Unis.

[8] The Jewish Week, 20 juillet 2007.

Lire sur le même thème l'article de Thierry Meyssan, "Le CUFI : 50 millions d’évangéliques pour soutenir Israël", sur Réseau Voltaire, 14 août 2007.

Source : Zmag

Traduction : MR pour ISM

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