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ISM France - Archives 2001-2021

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Moyen Orient -

Friedman veut compromettre le roi d’Arabie

Par

Première parution le 26 mars 2007

En 2002, soit un an après les attentats du 11 septembre, et un an avant l’invasion de l’Irak par les Etats-Unis, le journaliste américain Thomas Friedman proposa au prince régnant saoudien Abdallah Ben Abdelaziz de prendre une initiative politique susceptible de rétablir les relations américano-saoudiennes habituelles, en les épurant des "impuretés" dues à la participation de ressortissants saoudiens aux attentats contre le World Trade Center.

Friedman veut compromettre le roi d’Arabie

Friedman proposa que cette réconciliation saoudo-américaine prenne la forme d’une initiative arabe de paix avec Israël. Il s’agissait en quelque sorte de parvenir à (re)conquérir le cœur de l’Amérique par la voie israélienne…

Le roi Abdullah répondit à cette proposition : écoutant les recommandations de Friedman, il lança l’initiative portant son propre nom, dans laquelle il proposait une normalisation totale avec l’Etat hébreu, en contrepartie de son retrait total des territoires (arabes) occupés.

L’initiative fut bien accueillie au sein de l’administration américaine et par ses décideurs, notamment néoconservateurs, dont la plupart sont juifs, d’autant plus qu’elle n’évoquait en rien la question du retour des réfugiés palestiniens, qui est pourtant le cœur de la cause arabe…

Thomas a écrit, samedi dernier, un article dans le New York Times, dans lequel il exhortait à nouveau le roi Abdallah à renforcer son leadership sur les deux mondes, arabe et musulman, en profitant de l’éclipse de l’étoile du Caire et de son président, en prenant une nouvelle initiative décisive, rien moins que la réalisation d’une paix réelle et définitive entre les Arabes et les Israéliens.

Friedman a résumé ainsi son projet : le roi Abdullah se rendrait en Palestine occupée sitôt terminé le prochain sommet arabe, prévu mercredi prochain à Riyadh, mettant ses pas dans ceux de feu le président Anwar al-Sadate.

Sa première étape aurait été Jérusalem Est, pour prier à la mosquée Al-‘Aqçâ, afin d’affirmer les droits des Arabes et des musulmans sur ce lieu saint, après quoi il se serait rendu à Ramallah où il aurait prononcé un discours devant le Conseil Législatif Palestinien, affirmant les principes de sa première initiative, à savoir la normalisation totale en échange d’un retrait israélien complet, puis il serait allé à Yad vaShem, où se trouve le mémorial des victimes juives de l’Holocauste afin d’affirmer sa reconnaissance de la Shoah et de s’éloigner de la position du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, qui la nie.

Enfin, il aurait conclu sa visite par sa quatrième étape, à savoir la Knesset, le parlement israélien.

Nous ne savons pas quelle sera la réponse du roi Abdullah à cette exhortation de son ami Friedman, ni s’il y répondra de la même manière qu’aux premières, voici de cela sept années : adoptera-t-il cette nouvelle initiative, ou bien refusera-t-il, cette fois-ci ?

En revanche, ce dont nous sommes certain, c’est que ce Friedman ne parle jamais pour ne rien dire ; il entretient d’étroites relations avec les décideurs de la Maison Blanche, et il n’a jamais cessé d’entretenir des relations suivies sinon avec le roi Abdullah directement, tout du moins avec un groupe de ses conseillers, en particulier avec le Prince Bandar Ben Sultan, l’homme fort de l’Arabie saoudite, qui est aussi président du Conseil de la Sécurité Nationale, et Monsieur Adil al-Jubaïr, ambassadeur saoudien à Washington.

L’exhortation de Friedman intervient en un temps où se renforcent les conjectures au sujet de rencontres secrètes entre Ehud Olmert, Premier ministre israélien, et de hauts responsables au sein de la famille régnante saoudienne.

A plusieurs reprises, le nom du Prince Bandar Ben Sultan a été cité à ce propos.
Il s’agit de rencontres auxquelles Olmert n’a apporté aucun démenti ; il les a même confirmées de manière indirecte, faisant allusion au fait qu’une de ces réunions secrètes aurait été tenue au palais royal jordanien d’Amman.


Voici les principales conclusions que l’on peut retirer des conseils ainsi prodigués par Friedman au roi Abdullah :

1) La partie américaine n’a pas cessé d’exercer des pressions sur la partie arabe précisément afin qu’elle fasse encore plus de concessions aux Israéliens ; elle se concentre précisément sur l’Arabie saoudite, le seul pays qui ait accepté de jouer un rôle dirigeant en raison de sa puissance financière (ses revenus pétroliers s’élevant annuellement à 220 milliards de dollars) et de son prestige dans le monde arabe et dans le monde islamique, en tant que pays gardien des Lieux Saints (musulmans) ;

2) La normalisation arabe avec l’Etat hébreu doit partir du principe de l’affirmation des bonnes intentions, exactement comme l’avait fait feu le président égyptien Anwar al-Sadate, après quoi on laisserait agir la "générosité israélienne", qui procéderait à l’estimation de cette initiative de normalisation arabe et qui y répondrait éventuellement.
L’important étant que la normalisation à l’initiative des Arabes précède tout retrait israélien !

3) Volonté de créer une nouvelle cassure au sein du monde arabe, et volonté de faire apparaître les Arabes comme les mous bradeurs de leur cause et normalisateurs, tandis que les Iraniens, eux, seraient ceux qui tiennent mordicus à la cause et aux droits arabes…

4) Volonté de faire exploser l’initiative arabe sous la forme retenue et validée par le sommet de Beyrouth en 2002, et, de nouveau, de nier le droit au retour chez eux des réfugiés palestiniens.
Volonté de faire e la nouvelle initiative saoudienne ainsi proposée le fondement de la solution en la reformulant fondamentalement selon la proposition de Friedman et telle que le roi Abdullah Ben Abdelaziz l’a sortie alors du tiroir de son bureau.


Le roi Abdullah n’est pas Anwar al-Sadate, et il ne doit pas l’être. Il n’a jamais fait la guerre à Israël. Il n’a pas de territoires occupés qu’il souhaiterait récupérer (comme c’était le cas du Sinaï, en ce qui concerne l’Egypte).

De plus, il est le desservant des deux nobles sanctuaires (La Mecque et Médine, ndt) ; tout du moins, c’est à ce titre qu’il se plaît à s’adresser au monde.

Si Sadate, en dépit de toutes ses concessions à Israël, dont le fait qu’il ait reçu Sharon, et celui qu’il se soit transformé en "courtier" impartial et honnête dans le conflit entre Israël et les Arabes, dont les Palestiniens, il avait refusé de se rendre officiellement dans Jérusalem occupé et de s’y adresser à la Knesseth : le roi d’Arabie devrait, lui, accepter de prendre une telle initiative ?!?

L’Arabie saoudite d’aujourd’hui n’est plus celle d’il y a seulement vingt ans. C’est une certitude ; elle est devenue l’axe principal autour duquel se structure la politique américaine dans la région.

Son gouvernement a franchi toutes les lignes jaunes, avec notamment l’invasion de l’Irak, son occupation et l’autorisation donnée aux troupes d’invasion de partir de son territoire, et la remise des terres de Mésopotamie à l’Iran et à son influence – cette livraison sur un plateau d’argent qu’elle regrette aujourd’hui en pleurant.

Nous ne serons donc nullement étonnée de la voir se soumettre aux pressions américaines, qui exigent d’elle qu’elle procède à cette nouvelle initiative conforme aux conditions israéliennes.

En effet, Olmert ne cesse de draguer l’initiative saoudienne sous sa [nouvelle] version israélienne, et de la saluer en y voyant un fondement pour des négociations, tout en notifiant ses réserves sur deux points essentiels ajoutés lors du sommet de Beyrouth par le président syrien Bashshâr al-‘Asad : le droit au retour des réfugiés palestiniens et l’interdiction de leur naturalisation dans les pays hôtes, à savoir la Syrie, la Jordanie et le Liban, en aucune circonstance.

Le prochain sommet de Riyadh sera un sommet des plus dangereux, sinon le plus dangereux qui se sera jamais réuni.

En effet, il risque de fonder la reconnaissance arabe totale d’Israël, fournissant la couverture arabe indispensable aux frappes militaires américaines attendues contre l’Iran dans les mois à venir, exactement de la même manière que le sommet du Caire, réuni en été 1990, avait salué la présence d’un demi-million de soldats américains sur les terres de la Péninsule arabique, précédent d’une coopération militaire saoudo-américaine en vue de la destruction d’un pays arabe – l’Irak – au motif de "libérer le Koweït" !

Nous retenons notre souffle, ces jours-ci, et nous redoutons d’assister à un nouveau Camp David arabe, qui risque d’enterrer la première des causes arabes afin de satisfaire aux exigences israéliennes.

En effet, Friedman ne parle jamais pour ne rien dire.

Hélas !

Source : in Al-Quds al-Arabiyy

Traduction : Marcel Charbonnier

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