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Palestine - 11 janvier 2004
Par Wadi' Awawida
Le plateau du Golan fait parler de lui ces jours-ci, après l'annonce d'un nouveau projet de colonisation le visant plus particulièrement. Nous avons visité cette semaine le plateau du Golan occupé, essayant de nous intéresser à ses sites stratégiques, sa population et son paysage. Nous y avons rencontré ses populations syriennes qui sont toujours debout, résistantes à l'occupation malgré la dureté de leurs conditions.
Le plateau du Golan est constitué de plaines au sud et d'une suite de montagnes et de plateaux volcaniques au nord, le plus élevé étant Jabal al-Cheikh (2047 mètres au dessus du niveau de la mer) situé à l'extrême nord, à la frontière libano-syrienne. Il donne à l'ouest sur la plaine palestinienne d'al-Houla, séparé de cette plaine par le Jourdain.
Il est entouré à l'est par la vallée syrienne d'ar-Rouqad et au sud par la région de Tabaraya et la Jordanie.
Dans cette partie de la Syrie occupée depuis 1967 et qui s'étend sur 1190 km2, vivent aujourd'hui 18.000 syriens dans cinq villages, le plus peuplé étant Majdel Shams, face à 15.000 colons sionistes juifs installés dans 32 colonies, la plus grande étant Katsarine.
Comme en Palestine, l'occupation sioniste a donné à ces emplacements des noms hébraïsés à partir des noms arabes.
Par exemple, Tall al Faras est nommé Har Baras, Telle abou Youssef est nommé Har Yousefat, Jabal al-Hamra est nommé Har Adom...
Comme en Palestine, Israël veut prétendre à l'ancienneté du peuplement juif dans la région, pour faciliter sa colonisation.
A cause de ses richesses et sa position stratégique ainsi que son paysage magnifique, le plateau du Golan est hautement apprécié à l'intérieur de la Syrie, ce qui a poussé Israël à vouloir l'occuper et à profiter de lui par tous les moyens en l'occupant.
Outre les 32 colonies, l'occupant a également parsemé le Golan de casernes et de camps militaires. Profitant de son élévation, l'occupant a construit des points de contrôle et de surveillance sur les sommets des montagnes, ce qui a fait dire à un premier ministre israélien que ce sont "les yeux et les oreilles de l'Etat".
Dr Umar Sa'id, géographe, explique que l'importance stratégique du Golan pour Israël réside dans plusieurs domaines, le plus important étant militaire, car le plateau syrien surplombe tous les endroits, il est proche des colonies israéliennes qui sont dans la plaine de Houla et de la région du lac de Tabaraya (Tibériade).
De plus, la richesse en eau est stratégique, étant donné qu'Israël prend 30% de l'eau de l'Etat de l'eau du plateau syrien occupé, et les eaux du Golan fournissent 610 millions de mètres cubes au lac de Tibériade.
L'intérêt économique est aussi pris en compte puisque les sionistes ont installé des fermes, ont planté des arbres uniques et utilisent le basalte. De plus, la beauté du paysage a favorisé le tourisme, des dizaines de milliers de touristes sont attirés chaque année pour visiter le plateau syrien.
Al-Ghajar, un village oublié
Al-Ghajar est l'un des cinq villages qui sont restés après la destruction de 125 villages par les forces israéliennes, avec la ville d'al-Qunaytra, après l'occupation. 2000 personnes habitent ce village situé au bord du fleuve al-Hasbani, à l'ouest du Jabal al-cheikh, près des fermes de Chabaa, occupées.
Etant donné sa situation géographique à la frontière, et du fait des barrages de l'armée israélienne à l'intérieur du village, les habitants dal-Ghajar sont empêchés de faire le moindre mouvement et ne peuvent travailler tranquillement.
La situation s'est encore aggravée lors du retrait israélien en mai 2000 du Sud-Liban, qui était occupé, les forces de l'occupation ayant coupé le village en deux, avec la ligne de partage tracée par l'ONU à partir des cartes des mandats français et britanniques.
La route principale du village est devenue la ligne de partage entre la "partie libanaise d'al-Ghajar" et la "partie syrienne d'al-Ghajar". Ainsi, les soldats de l'occupation nous ont mis en garde, après un interrogatoire long et serré, contre le fait de nous approcher des maisons situées à droite de la route, car elles sont libanaises.
Mais les deux parties sont sous occupation israélienne, la seule différence résidant dans le fait que les troupes d'occupation ne donnent plus l'eau, l'électricité, le téléphone, l'enseignement et autres services à la partie libanaise car elle serait dépendante du Liban. Mais cette partie n'a pas été remise au Liban.
Des deux côtés de la route, des vies différentes pour des familles séparées de 10 mètres.
Mais le but de ces mesures vise à pousser les gens du côté libanais à s'en aller, laissant aux sionistes des milliers de dunums de leurs terres situées dans les plaines au sud du village.
Musa al-Khatib, habitant et propriétaire d'un magasin dans al-Ghajar, a exprimé son inquiétude et la crainte des gens, affirmant leur refus de s'en aller au Liban plutôt qu'en Syrie, qui est leur patrie, notamment parce qu'un plan de colonisation se dessine avec leur départ.
Il rappelle que le village d'al-Ghajar a été occupé un mois après la guerre de juin 1967, les forces syriennes s'étaient retirées mais les troupes de l'occupation ne sont rentrées que lorsqu'elles ont réalisé que ce village ne faisait pas partie du Liban, mais de la Syrie.
Le maire du village avait à ce moment fait le déplacement en Syrie et au Liban pour demander de l'aide pour reprendre al-Ghajar, mais à l'époque, la réponse était négative, et l'occupation s'est installée.
Le pommier, le secret de la résistance au paradis du Golan
Après une expérience de 37 ans d'occupation, la population syrienne du Golan a réalisé que sans le travail de la terre et sans la plantation du pommier, ils n'auraient pu résister longtemps aux tentatives israéliennes de les briser et de les israéliser, surtout après la proclamation de la Knesset de l'annexion du Golan le 14 décembre 1981.
80% de la population des villages restants du Golan, Majdal Shams, Ayn Qynia, Baq'ata et Mas'ada vivent de la plantation des pommiers qu'ils ont réussi à développer en profitant de l'abondance d'eau et du climat froid, ce qui a donné à la pomme du Golan un goût et une forme très appréciés.
A cause de l'occupation, la population du plateau du Golan n'ont réussi à assurer leur autosuffisance alimentaire et le maintien de leurs terres qu'avec la plantation de pommiers qui demeure la colonne vertébrale de leur économie, et sans la pomme, la population ne peut s'opposer à la colonisation et l'occupation.
Conscients de l'importance d'une économie indépendante, la population du Golan n'a pas hésité à travailler la terre montagneuse, pour la rendre cultivable, afin de pouvoir la planter en pommiers, ce qui est devenu un emblème de la résistance et à l'attachement à la terre.
Comme l'olivier pour les Palestiniens, le pommier est devenu un arbre sacré pour la population du Golan occupé.
Cheikh Rabah Sulayman Abu Mahmoud, 75 ans, dit qu'il travaille la terre depuis son enfance, et il continue à l'aimer et à lui être fidèle, comme il aime ses propres enfants. "La terre et l'honneur sont deux piliers pour nous, sans l'un pas de vie".
Cheikh Abu Mahmoud est clair, et il ajoute : Grâce à la pomme, il a pu nourrir et éduquer ses enfants et ses petits-enfants, il a pu protéger la liberté de leur parole. Ils ont refusé l'identité israélienne qui leur a été proposée, par la carotte et le bâton.
Ayant réalisé l'importance des pommiers pour l'économie de la population du Golan, l'occupant israélien a essayé d'asphyxier cette économie en annexant l'eau pour la revendre à la population à des prix exhorbitants et en empêchant la commercialisation large de la pomme, mais la population syrienne du Golan a aussitôt construit des réserves d'eau aussi "élevées que le ciel".
"La terre parle arabe"
Pour garantir le maintien de l'appartenance à la Syrie et faire échec à tous les complots de l'occupant, la population du Golan ne s'appuye pas seulement sur leur autonomie économique ni sur leur attachement à l'identité nationale, mai ils ont imposé le boycott contre tous ceux qui s'allient avec l'occupant ou qui acceptent l'identité israélienne, après la loi de l'annexion de 1981.
Ce boycott est une mesure efficace entre les mains de la population druze qui peuple les villages, hormis al-Ghajar.
Tous ceux qui vont à l'encontre de l'unanimité seront exposés au boycott total de la population en ce qui concerne leur vie sociale, leur économie, les mariages, les enterrements.
Il est arrivé que la population de Majdel Shams refuse de participer au convoi mortuaire d'une personne ayant accepté la carte d'identité israélienne.
Suite à la loi israélienne de l'annexion, la population syrienne du Golan a frait une grève ininterrompue de six mois, et pour briser cette grève, les autorités de l'occupation ont empêché toutes les denrées alimentaires de parvenir au Golan, pendant six mois.
La population syrienne du Golan suit avec beaucoup d'intérêt les nouvelles du pays, et notamment les nouvelles politiques, exprimant beaucoup d'ardeur à afficher son arabité et à affirmer sonr patriotisme, tout comme elle exprime son désir à vouloir retourner dans le giron de la patrie syrienne.
Hassan Fakhr Eddine, un des militants politiques du Golan, ancien enseignant écarté par les autorités sionistes à cause de ses positions nationales, affirme que la déclaration israélienne récente à propos de la colonisation dans le Golan occupé est une déclaration adressée au président Bashar al-Assad, une sorte de chantage contre la Syrie plutôt qu'un projet politique réel, ajoutant : "le Golan était et restera syrien, le sort des colonies est leur destruction, les Israéliens s'en iront comme sont partis avant eux les Turcs et les Français, car nous sommes dans notre droit.
Notre foi en cela est aussi enracinée que Jabal al-Cheikh".
Fakhr Eddine a insisté sur l'arabisme de la population du Golan affirmant qu'ils n'accepteront jamais d'être autres que des Arabes, critiquant par la même occasion la population arabe druze de l'Etat d'Israël qui a accepté de servir dans l'armée israélienne.
Cheikh Rafiq Ali Ibrahim est un commerçant de Majdal Shams, il affirme ressentir une profonde tendresse et une envie de visiter Damas et d'autres régions de son pays, de pouvoir rendre visite à ses parents et amis dont il a été privé pendant quatre décennies.
Aujourd'hui, les Syriens du Golan se contentent pour satisfaire leurs envies de se diriger vers le mont appelé "le mont des appels", en face d'un autre mont où viennent les Syriens de toutes les régions de Syrie, pour se saluer et s'adresser des messages, entrecoupés de pleurs, par mégaphone.
Le médecin Wasif Khater, commentant les déclarations de l'occupation, affirme que l'avenir appartient aux Syriens, car "la terre parle arabe", et que pour la population du Golan, son paysage ainsi que ses traits matériels, tout l'exprime.
La Syrie n'abandonnera jamais une seule olive ou une seule pomme de ses vergers.
Source : www.arabs48.com
Traduction : R. Ousseiran
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Wadi' Awawida
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