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Europe - 27 mai 2008
Par Khaled Amayreh
Comparée au malade de la Maison Blanche, l'Europe peut sembler moins belliqueuse, moins agressive et moins déraisonnable dans son approche globale des problèmes internationaux controversés. Cependant, lorsqu'il s'agit du calvaire des Palestiniens, les USA et l'Europe ressemblent beaucoup à Dupont et Dupond.
"Je vois pas d'occupation."
"J'entends pas d'occupation."
"J'adore parler de justice !"
Dans les mois et années récentes, les dirigeants européens, Merkel en Allemagne, Sarkozy en France, Brown en Grande-Bretagne et Berlusconi en Italie, ont honteusement encouragé la sauvagerie israélienne jusqu'à embrasser sa criminalité impitoyable contre le peuple palestinien, jusqu'au nettoyage ethnique génocidaire continu dans les territoires palestiniens, en particulier dans la Bande de Gaza.
C'est vrai, le ton européen des discours sonne souvent moins odieux, en particulier si on le compare au véritable bruit de bottes qui monte de Washington. Mais en dernière analyse, le résultat, dans les deux cas, est similaire. En fait, les USA et l'Europe collaborent et sont même de connivence pour faire aboutir leurs buts malhonnêtes, souvent en jouant le vieux jeu du bon et du mauvais flic avec leurs victimes persécutées, que ce soit en Palestine, au Soudan ou en Iran.
Mais l'Europe a joué le rôle du bon flic de façon si misérable que beaucoup au Moyen Orient (je parle de gens ordinaires, pas des régimes indignes marionnettes des américains) se demandent si l'Europe, elle aussi, n'est pas contrôlée par des néocons à l'esprit guerrier.
Aucun Palestinien ni aucun Arabe ne demande à l'Europe, en particulier à un pays comme l'Allemagne, d'adopter une attitude hostile à l'égard d'Israël.
Cependant, les états européens, dont l'Allemagne, devraient, nonobstant toute autre considération, dont le lourd héritage de l'holocauste, dire clairement à Israël qu'organiser le blocus des Palestiniens, les affamer et les tuer sont des actes criminels qui vont bien au-delà de l'acceptable.
Certains responsables européens font, de temps en temps, des déclarations critiques sur les atrocités israéliennes et les manoeuvres draconiennes contre les Palestiniens sans défense. Cependant, la réticence européenne à agir selon ces déclarations suggère que l'Union n'a pas sérieusement l'intention d'adopter une approche honnête de la question palestinienne.
Si l'Europe voulait être sérieuse et honnête au regard de la conduite manifestement criminelle d'Israël en Cisjordanie , à Jérusalem Est et dans la Bande de Gaza, elle dirait au gouvernement israélien voyou que l'étranglement de Gaza est aussi méprisable que l'étranglement du Ghetto de Varsovie en 1943.
Elle dirait à Israël qu'affamer et torturer et tuer des gens innocents, sous le prétexte de punir le Hamas pour ne pas reconnaître l'Etat manifestement criminel, est incompatible avec la législation internationale et la décence humaine.
Elle dirait à Israël qu'étrangler l'économie palestinienne en Cisjordanie en érigeant plus de 500 barrages routiers néo-nazis à l'entrée de chaque ville, village, hameau et camp de réfugiés palestiniens est un crime contre l'humanité que l'Europe ne peut tolérer.
Elle dirait à Israël qu'interdire à des dizaines de milliers d'intellectuels, journalistes et écrivains palestiniens d'aller à l'étranger est inacceptable.
Israël se livre systématiquement à toutes les violations imaginables de la dignité et des droits humains palestiniens, et l'Europe est parfaitement au courant de la situation car des centaines d'observateurs, contrôleurs, diplomates et activistes européens basés dans les territoires occupés communiquent régulièrement à leurs capitales la sombre réalité de l'occupation israélienne.
En conséquence, l'inaction ou la réticence européenne à appeler un chat un chat lorsqu'il s'agit d'Israël, n'est pas due à l'ignorance de la réalité en Palestine, mais plutôt à une décision européenne volontaire de la jouer aveugle, sourde et muette et de regarder ailleurs, laissant ainsi les Palestiniens seuls face à leur sort entre les mains d'un Etat qui est un véritable crime contre l'humanité.
Au cours des semaines récentes, Israël a déclaré qu'il allait construire des milliers de nouveaux appartements coloniaux réservés aux Juifs partout en Cisjordanie , y compris à Jérusalem Est arabe occupée. Ce qui constitue une violation flagrante de la "feuille de route" parrainée par le Quartet et de l'esprit global du "processus de paix" entre Israël et l'Autorité Palestinienne.
Et alors que la décision provoque des réactions de colère de la part de certains cercles pacifistes israéliens comme Gush Shalom (le Bloc de la Paix), les capitales européennes restent totalement silencieuses.
Pour être honnête, il faut signaler que le Ministre français des Affaires Etrangères, Bernard Kouchner, qui est juif, a critiqué l'expansion coloniale lors de la Conférence pour l'Investissement en Palestine, à Bethléem la semaine dernière. Cependant, l'attitude cordiale du Président français vis-à-vis d'Israël semble avoir convaincu la direction israélienne que toutes les critiques des crimes israéliens émises par le Ministre français des Affaires Etrangères devaient être carrément prises comme une feinte de relations publiques destinée au public arabe.
Le 23 mai, les Nations Unies rapportaient que le nombre de barrages routiers israéliens en Cisjordanie avait augmenté de 7% depuis septembre dernier. Ceci en dépit des promesses et engagements répétés de l'Etat sioniste de faciliter la mobilité des Palestiniens.
Le Bureau de Coordination des Nations Unies pour les Affaires Humanitaires à Jérusalem a rapporté que le nombre total de blocages routiers et autres barrières était passé de 566 au 4 septembre 2007 à 607 au 29 avril 2008. Le rapport indique qu'Israël a démantelé 103 obstacles, mais en a construit 144 nouveaux.
A nouveau, il n'y a pas eu le moindre mot de condamnation de la part des capitales d'Europe, ces mêmes capitales qui ont boycotté le mouvement Hamas parce qu'il refuse de reconnaître la légitimité de l'occupation israélienne de la Palestine et le nettoyage ethnique génocidaire de sa population indigène.
Paradoxalement, ce silence honteux arrive au milieu de chœurs d'appels européens à revitaliser l'économie palestinienne moribonde, principalement à cause des restrictions israéliennes sur la mobilité et l'accessibilité.
Tony Blair, l'ancien premier ministre britannique incurablement malhonnête, a utilisé toutes les occasions imaginables pour faire la promotion de sa théorie de "l'économie d'abord" envers les Palestiniens, principalement dans l'espoir que les incitations économiques les allècheraient tellement qu'ils feraient des compromis sur des questions aussi primordiales et cardinales que le droit au retour des réfugiés et Jérusalem Est.
Cependant, en dépit de toutes les réunions avec les responsables israéliens et les annonces hautement optimistes, tout ce qu'il a réussi à obtenir, c'est que l'armée israélienne retire un ou deux barrages routiers sur 500.
Voilà l'homme qui s'est évertué à convaincre le monde que la construction d'une économie palestinienne prospère sous occupation israélienne néo-nazie était un choix qui valait le coup d'être exploité.
Il va sans dire qu'une approche européenne moralement incohérente envers le calvaire palestinien n'augure rien de bon, ni pour l'Europe ni pour le monde au sens large.
Si l'Europe, avec les Etats-Unis, continue de permettre aux "forces de la jungle" de déterminer la règle du jeu (les politiques internationales), alors tous les états en tireront leurs conclusions parce que la survie est primordiale pour les nations comme pour les individus. Et si la force ne respecte que la force, alors chacun devra être fort ou risquer l'extinction, ou au moins l'asservissement aux puissants.
Je dis ceci parce que ce que l'Amérique et l'Europe semblent dire aux Palestiniens, c'est que tant que vous serez faibles, vous continuerez à être tués, violés, persécutés et affamés à mort, et vous devrez vous installer dans une vie de sujétion perpétuelle au "peuple élu".
Quelques états, tel l'Iran, ont déjà reçu et intériorisé le message, et tôt ou tard, d'autres suivront.
Est-ce là le monde idéal que l'Europe veut voir ?
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Khaled Amayreh
27 mai 2008