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ISM France - Archives 2001-2021

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Palestine -

Pari avec de gros enjeux

Par

Avec une guerre d'incitation malveillante qui empoisonne complètement l'atmosphère politique générale dans les territoires palestiniens occupés, et avec le Président de l'Autorité Palestinienne, Mahmoud Abbas, qui tâche de renforcer une "Autorité" sans véritable autorité, les différends entre le Hamas et le Fatah s'amplifient vers un point de non-retour.

L'hostilité grandissante entre les deux camps, nourrie constamment par Israël et les Etats-Unis, a un effet clairement déprimant pour beaucoup de Palestiniens et pourrait nuire de façon irréparable à leur cause nationale, au moins à l'avenir.

En effet, le Hamas et le Fatah utilisent presque toute leur énergie et leurs maigres atouts les uns contre les autres, laissant la cause nationale à la merci d'Israël, selon un analyste politique palestinien.

Indépendamment de la pure incitation, les gouvernements de Ramallah et de Gaza, qui considèrent l'autre comme illégitime, persécutent et arrêtent les partisans de l'autre camp, toujours "au nom de la loi" comme continuent de dire leurs porte-parole respectifs.

Même la plus petite des choses est utilisée et manipulée par chaque camp contre l'autre, contre "l'ennemi".

Dans la plupart des cas, les citoyens ordinaires, en particulier dans la bande de Gaza, sont ceux qui ont le plus à perdre et ceux qui souffrent plus.

Par exemple, des milliers de lycéens nouvellement diplomés dans la Bande ne savent maintenant pas quoi faire suite à une décision du Ministère de l'Education basé à Ramallah de ne pas reconnaître leurs diplômes approuvés par le Ministre de l'éducation basé à Gaza.

En Cisjordanie , les miliciens sans visage du Fatah, apparemment de mèche avec le gouvernement de l'Autorité Palestinienne, continuent à faire des rafles dans les mosquées et les maisons, et à arrêter les militants du Hamas.

Plusieurs incidents de tirs, visant la plupart du temps des partisans du Hamas, ont également eu lieu, et le système de justice de l'Autorité Palestinienne est incapable ou peu disposé à intervenir.

De nombreux Palestiniens trouvent que les différends agaçants entre les deux gouvernements sont idiots et stupides, étant donné le fait que les deux gouvernements et les deux autorités n'ont aucune véritable souveraineté puisque tous les deux se morfondent sous une sinistre occupation militaire israélienne.

Le gouvernement de l'Autorité Palestinienne à Ramallah, que l'ancien ministre israélien de la Défense, Moshe Arens, a qualifié de "création artificielle des Israéliens", dépend évidemment totalement d'Israël pour sa survie et se bat en fait contre le Hamas avec l'épée de l'occupation israélienne.

De la même façon, le gouvernement du Hamas à Gaza, avec ses environ 1.5 million de Gazéens chroniquement tourmentés et continuellement affamés, se morfond sous un blocus hermétique qui les maintient à peine en vie.

Le blocus ne permet le passage que de quelques cargaisons de nourriture, et le gouvernement du Hamas ne peut pas faire grand-chose sauf espérer et prier que la communauté internationale cède avant que Gaza devienne l'autre Somalie

Par conséquent, les différends entre le Hamas et le Fatah devraient être vus comme une confrontation entre des prisonniers qui sont constamment tués, mutilés et traqués par le surveillant de la prison qu'est Israël.

Ce qui est sûr, c'est que le Hamas a constamment invité le régime basé à Ramallah à entrer immédiatement dans des discussions sérieuses pour surmonter la crise qui fait des ravages et qui épuise la santé mentale des Palestiniens.

Cependant, Abbas, encouragé par un soutien occidental et israélien, a rejeté tous les efforts de réconciliation, en particulier ceux provenant d'Egypte, d'Arabie Saoudite, du Yémen et même de la Russie, préférant mettre tous ses oeufs dans le panier américano-israélien.

Certain de ses collaborateurs ont suggéré qu'Abbas serait apparemment arrivé à la conclusion que le divorce avec le Hamas était l'occasion tant attendue pour ranimer le processus de paix moribond et obtenir d'Israël un Etat palestinien viable en Cisjordanie .

Cela explique son refus obstiné de rapprochement avec le Hamas et son invocation persistante du mantra : aucune réconciliation avec le Hamas jusqu'à ce que "les marchands de coup d'Etat sanglant" acceptent d'annuler le "coup d'Etat" à Gaza, et "reviennent à la situation qui existait dans Gaza avant les événements de la mi-juin".

Mais le dirigeant palestinien ne veut même pas dire à son peuple comment le Hamas pourra satisfaire ces demandes condescendantes et insolentes sans s'asseoir avec eux.


Adel Samara est un remarquable intellectuel et économiste de gauche en Cisjordanie sans affiliation idéologique ou politique avec le Hamas ou le Fatah.

Dans une interview exclusive accordée au Weekly, il explique qu'il ne faut pas s'attendre à ce qu'Abbas parle avec le Hamas puisque l'homme "a abandonné son libre arbitre" aux Américains et aux Israéliens

"Il est extrèmement clair que l'Autorité Palestinienne agit sous l'influence d'Israël et des Etats-Unis, et qu'elle a perdu sa capacité à agir de façon indépendante. En fait, Abbas se trouve dans une situation où sa survie politique dépend beaucoup d'une conciliation avec Israël et l'administration Bush, puisque que parler avec le Hamas, sans parler de relancer le gouvernement de l'unité nationale, pourrait signifier pour lui un suicide politique."

En soulignant la naïveté d'Abbas, Samara explique que l'administration Bush utilise seulement le chef du Fatah comme un atout supplémentaire pour mener à bien les objectifs stratégiques des Américains au Moyen-Orient.
"Israël et les Etats-Unis l'utilisent seulement pour affaiblir l'ensemble de la cause nationale palestinienne. Ce qui m'inquiète, c'est qu'avant qu'il se réveille, la cause palestinienne sera sérieusement affaiblie".

Quan on l'a interrogé pour savoir s'il pensait qu'Abbas comptait trop sur la conférence de paix régionale parrainée par les Américains prévue en novembre, Samara a déclaré : "Abbas est trompé et dupé par Olmert".

"Si vous voulez savoir ce que pensent véritablement les Israéliens, ne pas prêtez attention à que dit Olmert, mais écoutez ce que dit (le ministre israélien de la Défense) Ehud Barak. Et il dit qu'il ne compte pas beaucoup sur Abbas."

Samara a expliqué que la crise palestinienne actuelle pourrait durer encore quelque temps à moins que les Etats Arabes, en particulier l'Egypte et l'Arabie Saoudite, se dépêchent à exercer une véritable pression sur les deux camps, en particulier sur Abbas, pour le rétablissement de l'unité palestinienne

Samara dit qu'Abbas pariait sur une reddition du Hamas, principalement en raison du blocus implacable israélo-occidental.

"Je crois que le Hamas ne se rendra pas. Au contraire, le Hamas semble être déterminé à rester inébranlable et il parie sur la désintégration du régime d'Abbas, principalement en raison de l'échec prévisible d'Abbas à obtenir des concessions politiques signicatives d'Israël."


Nasserudin Al-Sha'er, l'ancien vice premier ministre palestinien, qui a été récemment libéré d'une prison israélienne, après avoir été arrêté pour affiliation à un parti politique illégal (Hamas), est d'accord avec le pronostic de Samara.

Al-Sha'er a indiqué à Weekly que la méfiance profonde entre le Fatah et le Hamas résidait principalement dans la conviction de chaque camp que l'autre camp a l'intention de l'écraser

"A Gaza, le Hamas croit que le Fatah se regroupe et qu'il est sur le point de lancer une insurrection pour mettre fin au pouvoir du Hamas, et en Cisjordanie , l'Autorité Palestinienne pense que le Hamas essaye de faire la même chose. Dans les deux cas, des choses honteuses se produisent, y compris l'arrestation et la persécution de gens seulement pour leur affiliation avec l'autre faction."

Tout en reconnaissant l'influence israélienne sur le gouvernement basé à Ramallah, Al-Sha'er pense que le réel problème empêchant l'unité nationale palestinienne a beaucoup à voir avec des facteurs inhérents aux Palestiniens.
"Je comprends le facteur israélien, il est réel et je n'essaye pas d'en réduire son importance ; cependant, il est également vrai qu'il y a des facteurs singulièrement palestiniens qui ont à voir avec le dépouillement politique et idéologique influençant notre culture politique."

L'ancien professeur d'université dit qu'il était sûr que les Saoudiens et les Egyptiens devraient faire plus d'efforts pour redresser la situation palestinienne. "Je crois que l'Egypte et l'Arabie Saoudite réalisent l'immense importance de redresser la situation palestinienne. Ce fait partie de leur sécurité nationale."

Source : http://weekly.ahram.org.eg/

Traduction : MG pour ISM

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