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Gaza - 22 juillet 2006
Par Ramzy Baroud
Ramzy Baroud est un auteur et journaliste américain, actuellement basé à Londres. Son dernier livre, “The Second Palestinian Intifada: A Chronicle of a People’s Struggle” (Pluto Press, London), ("Le deuxième Intifada palestinien : Une chronique de la lutte d'un peuple"), est maintenant disponible sur Amazon.com. Il est également rédacteur-en-chef de Palestine Chronicle.
Mais comment peut-on expliquer le transfert de près d'un demi-million de civils israéliens en Cisjordanie Occupée et à Jérusalem-Est - en violation de la Quatrième Convention de Genève ?
Comment une "démocratie" responsable peut-elle mettre en danger sa propre population en les plaçant dans une zone de guerre, tout en fournissant aux Palestiniens une bonne raison de chercher à se venger et à exercer des représailles pour leurs lourdes pertes face aux soldats israéliens ?
La disparité entre le récit public israélien et ses intentions réelles ne peut probablement pas être plus concret que dans l'attaque actuelle de Gaza suite à la capture par des Palestiniens d'un soldat israélien près de Gaza dans une attaque audacieuse contre un poste militaire le 25 juin.
"Toute personne qui qualifie cette opération de disproportionnée n'a aucune idée des faits sur le terrain. Nous avons été attaqués et bombardés pendant des mois et des semaines", a déclaré Yitzhak Herzog, le secrétaire du gouvernement israélien, pour répondre à ce que certains médias ont décrit comme "une inquiétude internationale croissante" en parlant de la réinvasion israélienne des parties de la bande de Gaza et du nombre élevé de morts qui en a résulté.
Peu de temps après qu'Herzog ait fait ses commentaires, le nombre de morts parmi les Palestiniens suite à l'opération israélienne a atteint 52, dont une majorité de civils.
Cependant, les chiffres peuvent difficilement décrire la crise humanitaire en cours suite au siège et aux bombardements israéliens.
Le fonctionnaire israélien a réitéré un nouveau mantra adopté par le gouvernement israélien, destiné à réduire au silence toute critique sérieuse de l'armée israélienne et de ses pratiques mortelles à Gaza.
Pourtant, une telle réfutation semble excessivement exagérée, en considérant quil n'y a 'aucune critique internationale sérieuse et ou au moins signicative au sujet des attaques israéliennes contre Gaza, surnomée "Pluie d'Eté" par la toujours poétique armée israélienne.
La guerre à sens unique d'Israël a été exaspérée par le fait que les Palestiniens avaient fait l'objet d'un long siège économique qui a encore été renforce avec l'élection au pouvoir du Hamas en janvier dernier.
La Bande de Gaza, une bande de terre qui excède à peine quelques kilomètres de longueur et est encore beaucoup plus petite dans sa largeur a toujours abrité les Palestiniens les plus pauvres, avec des conditions de vie proches de la misère totale, et ne peut être comparée qu'aux pays les plus pauvres au monde, en dépit d'une population avec un niveau d'éducation élevé.
Israël insiste sur le fait que son opération n'a pas pour but de nuire à la population civile, mais pour déraciner les prétendus éléments terroristes qui utilisent l'infrastructure civile pour attaquer les villes israéliennes voisines avec des roquettes. Il indique également qu'il ne cessera pas ses "opérations militaires" dans la région jusqu'à ce que son soldat capturé soit rendu sain et sauf et sans conditions.
Les demandes israéliennes, sans contexte approprié – semblent raisonnables. Les Israéliens et les commentateurs américains approuvent; et en général leur opinion est : Israël ne veut pas créer de précédent en encourageant les terroristes à poursuivre leurs actions terroristes, et le mantra préféré d'Israël, tout pays démocratique ferait précisément ce que fait Israël pour protéger ses citoyens.
Encore une fois, le rôle historique des médias, qui est de se reconnaître totalement et de sympathiser avec la cause israélienne, tout en méprisant régulièrement la cause indigne des Palestiniens, continue à se perpétrer avec force et ténacité.
Ainsi le seul contexte pertinent, en ce qui concerne les médias occidentaux, est le contexte donné par Israël, qui, en retour, souhaite convaincre tout le monde que les revendications ci-dessus sont effectivement les véritables raisons de son attaque sanglante sur Gaza.
Si les intentions de l'armée sont en effet "de déraciner les terroristes" comme Israël l'affirme inlassablement, alors pourquoi insister sur la poursuite des mêmes politiques préjudiciables - celles du siège, de l'isolement et du militarisme non dissimulé – qui privent les Palestiniens de tout espoir que Gaza pourrait finalement devenir un régime économiquement viable et véritablement indépendant ? Pourquoi pousser les Palestiniens désespérés - par des assassinats incessants et le ciblage des civils en plein jour – à embrasser des notions de vengeance et de violence ?
Je dis, "notions" parce que les prétendues roquettes des Palestiniens, aussi sinistres qu'elles puissent paraître à la télévision, ne sont responsables de la mort que d'un seul Israélien en un plus d'un an, alors que les soldats israéliens ont tué plus de 150 Palestiniens au cours de ces deux derniers mois seulement.
Mais que dites-vous au sujet du soldat capturé ? N'est-ce pas une raison légitime ? Ce le serait si ce n'était pas Israël qui a insisté pour créer les circonstances tout à fait périlleuses dans lesquelles il met non seulement ses soldats, mais également ses civils.
Par exemple, Gilad Shalit – peu importe s'il est inoffensif comme le montrent les photos qu'Israël a délibérément fourni de lui aux médias - participait à une mission meurtrière qui avait pour but exactement cela : l'assassinat de Palestiniens.
Au cours des sept semaines qui ont précédé la capture de Shalit, le nombre de Palestiniens assassinés par les soldats israéliens - c.-à-d. des collègues de Shalit à l'air aussi innocent – est proche de 100.
Cependant, Shalit était un soldat entrainé à supporter physiquement et mentalement des moments difficiles.
Mais comment peut-on expliquer le transfert de près d'un demi-million de civils israéliens en Cisjordanie Occupée et à Jérusalem-Est - en violation de la Quatrième Convention de Genève ?
Comment une "démocratie" responsable peut-elle mettre en danger sa propre population en les plaçant dans une zone de guerre, tout en fournissant aux Palestiniens une bonne raison de chercher à se venger et à exercer des représailles pour leurs lourdes pertes face aux soldats israéliens ?
Il est plutôt étrange que le gouvernement israélien qui donne aux médias cette image attrayante d'Israël, une nation qui se donne beaucoup de peine pour sauver la vie d'un homme, mette alors en danger la vie de centaines de milliers de personnes, tout en méprisant complètement la vie de tous les Palestiniens.
Si les actions d'Israël envoient un message, c'est un message plein d'hypocrisie et de racisme.
Mais que veut Israël exactement ? Est-ce que sa démonstration sanglante à Gaza a pour but exclusivement de renverser le gouvernement dirigé par le Hamas ?
Ou est-elle destinée à la communauté internationale pour montrer que les Palestiniens ne sont pas un partenaire de paix ?
Ou peut-être que c'est un message destiné aux Israéliens eux-mêmes, à ceux qui doutaient qu'un gouvernement civil avec peu de passé militaire - en particulier les antécédents du premier ministre Ehud Olmert et de son ministre de la défense Amir Peretz - puisse se montrer également impitoyable ?
On ne voit pas vraiment vers quoi se dirige cette expérience israélienne.
Mais ce qui est indéniable, c'est qu'en maintenant une guerre de basse intensité à Gaza, Israël crée une couverture parfaite pour que ses bulldozers de l'armée divisent le reste de la Cisjordanie et Jérusalem selon la seconde phase du plan de Désengagement d'Olmert : qui a pour but de découper la Cisjordanie en diverses enclaves sans contiguité physique, et de placer sa population sous réelle incarcération collective à durée indéfinie dans des secteurs du genre Bantustans, dont le déplacement sera autorisé ou refusé selon le bon vouloir d'un soldat israélien.
Le plan a été réalisé en un temps record, pourtant peu semblent remarquer une réalité qu'Israël tâchera de maintenir.
En dépit des événements tragiques qui se déroulent à Gaza, la vérité est que Gaza n'a jamais été et ne sera jamais probablement utile stratégiquement aux objectifs expansionnistes d'Israël.
Gaza est au mieux - comme cela a été le cas pendant des générations – seulement un terrain pour des expérimentations militaires israéliennes, et au pire, un terrain de la mort stupide, où les Palestiniens sont forcés "d'apprendre" la même leçon, maintes et maintes fois.
En effet, "l'opération" militaire israélienne actuelle à Gaza permet de maintenir les espérances.
Source : http://www.palestinechronicle.com/
Traduction : MG pour ISM
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