Envoyer cet article
Palestine - 11 février 2005
Par Palestine Report
Cette semaine, Palestine Report Online a interviewé Saleh Abdel Jawad, professeur de Sciences politiques à l'université de Birzeit, au sujet de le sommet de Sharm Al Sheikh. Article paru le 9 février 2005 sur Palestine Report.
Sharon a besoin également d'un certain calme sur le front palestinien. Je ne lui fait toujours vraiment pas confiance du tout.
Ce que nous voyons sur le terrain, ce que nous voyons avec la question des prisonniers, est une indication que les Israéliens ne sont pas vraiment sérieux.
Mais nous ne pouvons pas dire, "ils ne sont pas sérieux et donc nous ne nous engagerons pas".
Nous devons saisir notre chance, rester vigilants et nous tenir au courant des développements de la situation.
PR : Est-ce que nous avons une chance de Paix et est-ce que tout est en bonne voie ?
Abdel Jawad : La Paix? Nous avons peut-être un cessez-le-feu sérieux. Je ne suis pas sûr que nous ayons la paix. Il y a une tentative. Je pense que les Américains ont fait une grosse pression pour arriver à ce stade. Que la paix arrive, ou qu’un processus politique aille plus loin, c'est une autre histoire.
PR : Mais les choses semblent avoir bougé très vite depuis que le Président Mahmoud Abbas a été élu président. Attribuez-vous cela seulement à la pression américaine?
Abdel Jawad : Pas seulement, bien sûr. Abbas est sérieux, il s’engage dans ce qu'il dit, et je pense que la balle est maintenant principalement dans le camp israélien.
Abbas est encore obligé de faire certaines choses du côté palestinien : il doit faire appliquer totalement le cessez-le-feu et contrôler la situation.
Les Israéliens doivent revenir à, au moins, la situation d’avant le 28 Septembre 2000.
Alors, nous pourrons peut-être avancer sur la Feuille de Route.
PR : Aussi bien le Hamas que le Jihad Islamique ont annoncé qu’ils ne pensaient pas bondir sur l’annonce du cessez-le-feu à Sharm Al Sheikh. Que pensez-vous leur position ?
Abdel Jawad : Si je comprends correctement ce qu'ils ont dit, ils vont attendre et voir ce que fera Abbas quand il reviendra. J'espère qu'ils respecteront le cessez-le-feu.
Avec tout le respect que j’aie pour la résistance, le Hamas et le Jihad Islamique ont joué un rôle important en cela, ils devraient respecter l'élection d'Abbas comme président et lui donner du temps.
Certains se sont déjà plaints que [ les Israéliens ] n'ont pas libéré les prisonniers. Je ne pense pas que les Israéliens libéreront tous les prisonniers immédiatement.
Nous devons entrer dans un processus où chaque partie prend des mesures pour installer la confiance.
D'autre part, je ne suis pas très optimiste sur le sérieux des Israéliens sur cette question. Ils parlent de libérer 900 prisonniers, mais au cours du dernier mois seulement, ils ont emprisonné environ le même nombre de personnes.
Pourquoi? Pourquoi les libérer seulement aujourd'hui ?
Ce dont nous avons également besoin, c’est, pour eux, qu’ils en finissent avec leur politique d'assassinat et, pour nous, que nous ayons une réelle souveraineté dans les territoires palestiniens et pas simplement dans les villes.
Ils disent qu'ils vont se retirer des villes, mais les villes dont ils parlent, de toute façon ils n’y sont pas.
J'espère que le Hamas comprendra la situation d'Abbas. Je ne pense pas qu'Abbas essayera de détruire ce que les Israéliens appellent "l'infrastructure terroriste".
Le Hamas et le Jihad islamique font partie de la résistance palestinienne et Abbas le sait.
PR : Certains suggèrent qu'avec son succès récent dans des élections locales, et sa tentation de participer aux élections du CLP, le Hamas a un intérêt dans un cessez-le-feu. Que pensez-vous?
Abdel Jawad : Je pense qu’en dépit de ses succès politiques récents dans les élections locales à Gaza, le Hamas affronte également des questions difficiles.
Leur crise n'est pas moindre que celle de l'Autorité.
Ils comprennent s'ils les (les actions armées) continuent maintenant, ils seront perçus comme ceux qui ont détruit l'accord de Sharm Al Sheikh et de ne pas avoir donné assez de temps à Abbas pour réussir - encore, je souligne, je ne suis pas optimiste sur le fait qu’Israël lui permette de réussir - mais le Hamas doit faire attention à ne pas être perçu comme en étant la cause.
Le Hamas comprend également que toute violence pourrait mener à une invasion générale israélienne de la bande de Gaza. Ce n'est pas dans leurs intérêts.
Je pense qu'ils ont appris les leçons de 2002 et des invasions israéliennes des villes de la Cisjordanie , qui a largement endommagé leur infrastructure et leur capacité à faire tout type d'opération militaire sérieuse.
Je pense également que le Hamas, tout comme l’OLP dans les années 70, fait face à la réalité et a tiré certaines conclusions.
La direction a montré une grande patience dans son militantisme et dans sa lutte, mais aujourd'hui ils doivent étudier soigneusement ce qui s’est passé depuis plus de quatre ou cinq ans sur la situation internationale, la situation régionale et le fait qui dans les sociétés palestiniens et israéliens, la population est fatiguée de la poursuite de la violence.
PR : Les gens parlent d'une nouvelle ère, mais nous avons toujours le premier ministre israélien Ariel Sharon. Aurait-il été transformé d'un homme de guerre en un homme de paix?
Abdel Jawad : Non, non, non! C'est pourquoi Abbas marche dans un champ de mines.
Les Israéliens et les Américains veulent qu'Abbas détruise la résistance, pour entrer peut-être dans une guerre civile. Je ne pense pas que Sharon ait changé, mais je sens une certaine pression américaine.
Mon hypothèse est qu’à chaque fois que Sharon a senti la pression américaine, il a tendance, au moins temporairement, à céder.
Mais, Sharon a besoin également d'un certain calme sur le front palestinien.
Je ne lui fait toujours vraiment pas confiance du tout.
Ce que nous voyons sur le terrain, ce que nous voyons avec la question des prisonniers, est une indication que les Israéliens ne sont pas vraiment sérieux.
Mais nous ne pouvons pas dire : "ils ne sont pas sérieux et donc nous ne nous engagerons pas".
Nous devons saisir notre chance, rester vigilants et nous tenir au courant des développements de la situation.
PR : A quel point la question des prisonniers est-elle importante et qu’est ce qui prouvera si les Israéliens sont sérieux?
Abdel Jawad : Ils ne peuvent pas venir et prendre des centaines de prisonniers juste avant un sommet et puis leur dire qu’ils vont les libérer ou d'autres qui ont seulement quelques mois à passer avant la fin de leur peine.
Nous savons qu'il y a des milliers de prisonniers palestiniens.
Ce dont nous avons besoin, c’est de la libération des prisonniers qui sont en prison depuis les années 70. Peu importe si Israéliens les définissent comme ayant "du sang sur les mains".
Tous les leaders israéliens ont du sang palestinien sur leurs mains, particulièrement Sharon, du bataillon 101 en 1948 et des dizaines de massacres à Nahalin Qibe, Qalqiliya, contre les prisonniers égyptiens en 1956 et 1967, dans la bande de Gaza dans les années 70 et à Sabra et Shatila.
Ce dont nous avons besoin, c’est une approche humaniste des deux côtés, pour essayer d'oublier le sang et la vengeance et voir les prisonniers dans le contexte d'une lutte nationale.
La question des prisonniers mobilisera des milliers, même des dizaines de milliers en faveur du processus de paix.
Si Sharon veut la paix, nous avons une occasion historique. Si Sharon veut seulement un cessez-le-feu, c'est une autre question.
Source : www.palestinereport.org
Traduction : MG pour ISM-France
Afin d'assurer sa mission d'information, ISM-France fait appel à votre soutien.
L'ISM a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Proche Orient. Les auteurs du site travaillent à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui leur seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas l'ISM ne saurait être tenu responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont il n'a pas la gestion, l'ISM n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.
9 novembre 2021
Le fait d'être désigné comme "terroristes" par Israël illustre le bon travail des ONG en Palestine9 novembre 2021
L’Art de la guerre - Les nouvelles armes financières de l’Occident5 novembre 2021
Israa Jaabis : De victime à criminelle, du jour au lendemain3 novembre 2021
La normalisation est le dernier projet pour éradiquer la cause palestinienne1 novembre 2021
Kafr Qasem reste une plaie béante tandis que les Palestiniens continuent de résister à l'occupation30 octobre 2021
Voler et tuer en toute impunité ne suffit plus, il faut aussi le silence14 octobre 2021
Tsunami géopolitique à venir : fin de la colonie d’apartheid nommée ’’Israël’’12 octobre 2021
La présentation high-tech d'Israël à l'exposition de Dubaï cache la brutalité de l'occupation9 octobre 2021
Pourquoi le discours d'Abbas fait pâle figure en comparaison du fusil d'Arafat à l'ONU6 octobre 2021
Comment la propagande israélienne s'insinue dans votre divertissement quotidien sur Netflix : La déshumanisation et la désinformation de FaudaPalestine
Interviews
Palestine Report
11 février 2005