Israël - 18 janvier 2004

Une muraille qui nous guillotine et nous annexe

Par Haaretz

Comme on l'a vu, pour les faiseurs de politique, le point essentiel, c'est de savoir comment faire pour que le mur entoure le plus grand nombre possible de colonies.
C'est ce calcul qui a dicté les principaux détours pris par le tracé du mur, qui s'éloignant largement de la Ligne Verte s'enfonce profondément dans le territoire palestinien.
Le nombre de gens concernés par le Mur augmente géométriquement. Le nombre de Palestiniens annexés au Territoire israélien parce qu'ils vivent à l'ouest du mur a aussi grossi.

Il n'y a pas de vaste projet public qui ne produise de difficultés à ceux qui vivent dans cette région ; c'est doublement vrai dans le cas du mur de séparation qui s'avère être, de fait, une frontière.

Cela a commencé avec les débuts de la construction du mur au Nord-Ouest de la Samarie. La première section a été érigée le long de la frontière dite Ligne Verte de 1967. La vie quotidienne d'un grand nombre de gens s'est transformée en une série d'efforts permanents, de frustrations et de difficultés à ces points d'accès du mur qui ne sont pas toujours habités et ne s'ouvrent pas automatiquement.

Cependant tous ceux qui ont pensé que l'idée fondamentale du mur de séparation est une solution raisonnable pour un Etat confronté aux attaques terroristes, ne pouvait que rejeter d'avance les protestations élevées par un groupe relativement restreint de gens déchirés par le mur et considérés comme moins importants que les besoins vitaux d'un plus grand nombre de gens pour lesquels la sécurité s'est accrue.

Cette logique a commencé à s'éroder au cours de la seconde étape de la construction du mur.

Comme on l'a vu, pour les faiseurs de politique, le point essentiel, c'est de savoir comment faire pour que le mur entoure le plus grand nombre possible de colonies.

C'est ce calcul qui a dicté les principaux détours pris par le tracé du mur, qui s'éloignant largement de la Ligne Verte s'enfonce profondément dans le territoire palestinien. Le nombre de gens concernés par le Mur augmente géométriquement. Le nombre de Palestiniens annexés au Territoire israélien parce qu'ils vivent à l'ouest du mur a aussi grossi.


Les dommages causés par ce mur envahissant au processus diplomatique sont immenses, comme l'est le dommage causé au prestige d'Israël dans le monde.

Un premier résultat aura été la décision de l'Assemblée Générale des Nations-Unies de porter le litige du mur devant la Cour Internationale de Justice de la Haye, un Tribunal auquel Israël sera obligé, non sans difficulté, de plaider son cas.

Dès maintenant, à la veille des débats de la Haye, le Ministère de la Défense travaille frénétiquement à terminer une autre section du mur, encore plus illogique, prévue à Jérusalem Est.

Comme le Ha'aretz l'a décrit dans son édition du vendredi, cette section du mur, qui à certains endroits est un mur de béton de huit mètres de haut, a pour fins de dépecer toutes les zones urbaines et de détruire la vie d'une foule de Palestiniens y compris celle de certains citadins possédant de cartes d'identité israéliennes.


Des zones isolées comme Azzariyeh et Abu Dis seront séparées de force de Jérusalem et se débattront dans un no man's land entre mur et désert.

Selon les plans officiels du Ministère de la Défense, l'Etat a l'intention de prolonger le mur Est jusqu'à ce qu'il entoure toute la zone de Mishor Adumim.


Si ce plan était respecté, la Cisjordanie serait effectivement découpée en deux parties. Pour aller du Nord au Sud, un voyageur devrait passer par Jéricho. Et les architectes de la politique du mur ont dans leurs tiroirs un projet pour "le mur Est" qui transformera "l'Etat Palestinien-en-devenir" en une enclave assiégée.

Les barrières élevées à Jérusalem, qui se sont métamorphosées en murs, ont apparemment pour fonction de combattre le terrorisme mais surtout d'empêcher la migration continuelle des Palestiniens de Cisjordanie vers Jérusalem.

L'ironie veut que, comme Lilly Galili le décrit dans son reportage, le mur produit, en réalité, le résultat démographique exactement opposé.

Un grand nombre de Palestiniens se hâtent de changer de lieu de résidence ou (s'ils en ont les moyens) de louer un autre appartement à l'intérieur des zones qu'entourent les nouveaux murs.

L'immense aspiration d'Israël qui est de maintenir l'unité de Jérusalem-Est totalement contredite par l'instauration des ces abominables murs.

Source : http://www.haaretz.com/hasen/spages/384044.html

Traduction : CS