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Gaza - 27 mai 2005
Par Abdel Nasser Awni Farwaneh
Abdel Nasser Awni Farwaneh : Prisonnier libéré, actif dans la défense des prisonniers et détenus, et directeur du département des statistiques au Ministère palestinien des affaires des prisonniers et libérés.
Il aurait fallu que je sois le premier à me rappeler cette date...
Mais il semble que les soucis de la vie quotidienne et l'accumulation des tâches soient devenus des poids ayant alourdi notre mémoire qui n'arrive plus à se remémorer tous ces événements dont l'histoire de la Palestine est sans conteste remplie, que ce soit par les catastrophes ou les victoires.
En ce jour comme celui-ci, le 20 mai, vingt ans auparavant, ce fut l'opération al-Jalil (Galilée) la plus importante opération d'échanges de prisonniers, en 1985, conclue entre le Front Populaire de la Libération de la Palestine - Commandement Général (FPLP - CG) et le gouverment de l'occupation israélienne, où 1150 prisonniers ont été libérés des prisons et centres de détention de l'occupation, contre trois prisonniers israéliens détenus par le FPLP-CG.
Parmi ceux qui furent libérés, figure mon père dont nous avions été séparés pendant 15 ans, qui a vécu la souffrance, transféré d'une prison à l'autre, transféré d'une cellule d'isolement à une autre collective.
A peine un collègue journaliste m'a t-il appelé, ce matin, pour avoir des renseignements sur cette occasion, tout le fil des souvenirs est remonté à la surface, avec la rapidité de l'éclair, pour me rappeler le plus beau jour de ma vie, lors de ma rencontre avec mon père.
Ce fut une rencontre non prévue et définie dans le temps, nous nous sommes embrassés sans obstacles ni barreaux, sans surveillance ou terreur. Je ne me rappelle pas avoir vécu une scène semblable au cours de mon enfance, et pourtant je me rappelle très bien la scène où les soldats ont investi notre maison, saccageant nos affaires, avec des coups de pied sur tout ce qui s'y trouvait, tout juste âgé de trois ans, à l'époque.
J'ai eu les larmes aux yeux en répondant à mon collègue, car je réalisais très précisément les significations de l'opération al-Jalil sur les plans personnel et général. C'est pourquoi je devais me souvenir de cette date et être même le premier à m'en souvenir.
L'opération al-Jalil ne fut pas la première opération d'échanges entre les organisations palestiniennes et arabes d'un côté et le gouvernement de l'occupation de l'autre.
D'autres l'ont précédée, mais elle fut la plus importante et la plus massive.
Elle a constitué un levier pour relever le moral des masses arabes et palestiniennes.
Elle a renforcé la confiance des militants dans la révolution et sa direction qui ne les avait pas abandonnés, qui n'avait pas concédé leur droit à la liberté, qui n'avait pas accepté de déchirer leur unité palestinienne, géographique et combative.
Au contraire, l'opération al-Jalil a pris une ampleur palestinienne, arabe et internationale, étant donné les militants inclus dans la liste, des militants étrangers, à leur tête le prisonnier japonais Kozo Okamoto, mais également des militants palestiniens des terres occupées en 48 et à leur tête, Daoud Turki, et des militants arabes, de divers pays arabes, ainsi que les militants palestiniens de Cisjordanie , de Gaza et d'al-Quds.
Les villes d'al-Quds, de Bethelehem, de Gaza, Rafah, al-Khalil, Ramallah, Nablus, Tulkarm, Jénine, Ariha, les villes d'al-Jalil, du Triangle, les camps de l'exil, tous ont accueilli leurs enfants, ces héros revenus victorieux dans leurs maisons et leurs villages, constituant un apport important à la révolution palestinienne et à toutes ses organisations, un apport important à la lutte nationale palestinienne et arabe.
De plus, ces prisonniers libérés ont joué un rôle distinct dans les rangs de leur peuple, à l'intérieur de leurs villages et leurs organisations, dans le processus d'encadrement, d'organisation et de mobilisation du peuple, pour de nouveau s'intégrer dans les opérations de la résistance à l'occupation. Ils eurent une influence importante sur les citoyens, ce qui favorisa l'élargissement du cercle de la résistance et assura un soutien populaire à la résistance à l'occupation.
Ils jouèrent un rôle important dans la préparation de la première intifada populaire, comme ils jouèrent un rôle dirigeant dans son embrasement, son élargissement et sa persistance.
L'opération al-Jalil constitua un gifle retentissante pour l'occupant et son gouvernement, car parmi ce grand nombre de prisonniers, 1150, la plupart d'entre eux avaient des condamnations lourdes, situées entre 10 ans de prison et la perpétuité.
La plupart avaient participé à des opérations de la résistance ayant conduit à des pertes humaines dans les rangs des Israéliens, ou selon Sharon, "leurs mains sont entâchées du sang des Israéliens".
De plus, l'occupant a été obligé de libérer des prisonniers des régions occupées en 1948, il a été obligé de les libérer et de les maintenir dans leurs propres régions, selon leurs choix, ce qui signifie que le gouvernement de l'occupation s'est soumis aux conditions de la résistance.
L'opération al-Jalil est devenue un antécédent révolutionnaire dans l'histoire de la lutte palestinienne, pour toutes ses conséquences, pour la dignité et la victoire relative.
Il est normal que lorsque les fusils se taisent, lorsque le cessez le feu est proclamé, les prisonniers doivent être libérés.
Mais il semble que les tergiversations et le durcissement de ton israéliens nous amène ou amène certains d'entre nous à réfléchir sérieusement à revoir cette politique d'accalmie et à recourir à d'autres moyens pour obliger le gouvernement de l'occupation à libérer nos prisonniers.
Dans les prisons et les centres de détention israéliens, sont détenus jusqu'à présent 8500 prisonniers, 390 d'entre eux sont arrêtés avant les accords d'Oslo, soit depuis plus de dix ans. Tous attendent l'apparition du soleil malgré le silence des fusils et l'accalmie présente.
Qui pourra les libérer ?
Avons-nous besoin d'une nouvelle opération d'échange ?
Nous rêvions d'avoir plus d'un Abou Ammar, George Habache, Abu Jihad, Abu Ali Mustafa, nous rêvions d'avoir plus d'un Yassine ou Shiqaqi, tout comme nous aimions Givara et Castro. Aujourd'hui, 20 ans après l'opération d'al-Jalil, nous sommes fiers de sa réalisation, cette opération qui fut la plus grandiose au cours du conflit arabo-israélien.
Nous souhaitons aujourd'hui avoir plus d'un Ahmad Jibril et plus d'une opération d'échanges de nos prisonniers, comme celle d'al-Jalil, pour mettre fin à la souffrance de nos prisonniers, pour libérer enfin leurs corps afin que le soleil puisse les caresser...
Ce soleil qui n'est pas encore levé... Quand est-ce que le soleil se lèvera pour nos prisonniers ??
Source : www.palestinebehindbars.org
Traduction : Centre d'Information sur la Résistance en Palestine
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