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Palestine - 11 novembre 2006
Par Jamal Juma
Jamal Juma est le coordinateur de la Campagne Populaire palestinienne contre le Mur d'Apartheid
Le régime israélien déchaîne sa brutalité raciste bien au-delà des crimes du précédent régime d'Apartheid en Afrique du Sud.
Il emprisonne un peuple entier derrière des murs de ghettos, il les tue et les soumet à un blocus économique qui a amené les communautés au bord de la famine. Cependant, alors qu' il y a 30 ans, l'Assemblée générale de l'ONU réclamait de larges sanctions contre l'Apartheid en Afrique du Sud, on rappelle quotidiennement aux Palestiniens que l'occupation sioniste peut encore compter sur la cécité du monde face à ses atrocités et à ses crimes.
Jusqu'Ã quand ?
A Beit Hanoun, les Palestiniennes ont montré un autre symbole de notre résistance. Et tandis que les Palestiniens reconnaissent leur sacrifice, le reste du monde semble indifférent aux derniers crimes à Gaza en dépit des caméras qui montraient le siège.
La Bande de Gaza a été transformée en une prison infernale, - encore plus depuis qu'a eu lieu le "désengagement" - et après des jours d'assassinats et de destruction à grande échelle, soixante hommes s'étaient réfugiés dans une mosquée.
Les femmes se sont rassemblées pour sauver la vie de leurs pères, de leurs frères, de leurs fils et de leurs camarades et elles ont marché en direction de la mosquée pendant que les Forces de l'Occupation menaçaient de la démolir sur les hommes.
Elles ont continué Ã marcher alors que l'Occupant ouvrait le feu, assassinant deux d'entre elles et faisant des dizaines de blessés.
Elles ont empêché un massacre encore plus grand puisque les hommes ont échappé au siège de la mosquée.
Cependant, l'Occupant a pris les vies d'au moins 60 personnes seulement la semaine dernière.
De la même façon, les fermiers de Cisjordanie mettent leurs vies en danger, en se confrontant aux occupants aux portes qui enferment les Palestiniens et dans leurs champs isolés par le Mur d'Apartheid.
La récolte annuelle des olives représente une importante source de revenu pour les communautés agricoles et les ouvriers et ils veulent résolument garder leurs terres.
Il y a seulement deux semaines, les Palestiniens de l'ensemble de la Cisjordanie et des parties isolées de Jérusalem ont défié leur ghettoization en passant par-dessus le Mur d'Apartheid afin d'entrer dans la ville.
Des échelles et des lampadaires cassés ont été déployés pendant que les gens grimpaient sur le Mur en ciment haut de 8 mètres pour briser le siège et l'isolement de la capitale palestinienne.
Pendant ce temps, les élites politiques palestiniennes sont paralysées par les arrestations, les sanctions choquantes et les conflits internes interminables.
Dix mois après les élections de janvier, aucune direction politique efficace n'a émergé.
Aujourd'hui, Mahmoud Abbas a de facto usurpé le gouvernement tandis que le Hamas, incapable de se délier les mains, regardait et défendait son pouvoir sur une structure dans laquelle ils n'ont jamais eu la légitimité qui leur a été accordée. Le Hamas ne possède clairement aucune carte pour surmonter l'impasse.
Cependant, après 7 mois de sanctions et une grève prolongée du secteur public, un élément clé a émergé : Les Palestiniens sont capables de se débrouiller sans le dispositif d'Oslo qui donne des salaires à 160.000 familles.
Ironiquement, c'est maintenant quand aucune force politique palestinienne ne s'oppose à l'Autorité Nationale Palestinienne qu'elle s'avère être superflue pour les Palestiniens, politiquement et économiquement.
Nous pouvons continuer la charade des "gouvernements" imposés par l'occupation et la communauté internationale, que ce soit des gouvernements "présidentiel" ou "d'union nationale".
Nous pouvons même abandonner le droit à la démocratie et à l'autodétermination des structures et la direction de notre lutte contre Israël Apartheid et ses alliés et continuer à encourager les rois Bantous approuvés par eux pour administrer l'intérieur des murs des ghettos.
Ou nous pouvons constater la redondance de ces structures et passer à une période de transition qui se prolongerait entre une fin possible de l'Autorité Nationale Palestinienne et le moment où Israël serait forcé de prendre encore ses responsabilités en administrant l'ensemble de la terre qu'il occupe.
La semaine contre le Mur d'Apartheid (du 9 au 16 novembre) - qui mobilise cette année pour la quatrième fois les populations en Palestine et dans 25 pays du monde entier - nous rappelle les gens sur le terrain qui continuent la lutte, les hommes et les femmes qui n'ont pas d'autre choix que de continuer leur résistance par leur existence.
Il est temps pour eux de prendre la tête du mouvement.
Il y a 30 ans exactement, le 9 novembre 1976, l'Assemblée Générale des Nations-Unies a proclamé que "toute collaboration avec le régime raciste d'Afrique du Sud constitue un acte hostile contre les peuples opprimés d'Afrique du Sud et un défi méprisant envers les Nations Unies et la communauté internationale" et a voté un ensemble de sanctions globales contre le régime d'Apartheid en Afrique du Sud.
Aujourd'hui, les Palestiniens meurent en nombres, les murs des ghettos encerclent les communautés et le droit international est violé quotidiennement par un régime dont les moyens et les objectifs vont bien au delà de l'Apartheid en Afrique du Sud.
La création d'Israël a provoqué la plus grande population de réfugiés au monde qui sont encore aujourd'hui empêchés de revenir dans leurs maisons.
La vie des Palestiniens sous le régime israélien inclut des démolitions de maison et des appels au transfert lancés par des ministres "des menaces stratégiques" de l'Occupation – ou, en d'autres termes, la technologie démographique raciste nécessaire à garantir une majorité juive numérique.
Les Bantustans de Cisjordanie sont devenus des ghettos hermétiquements clos tandis que les missiles pleuvent sur Gaza.
Pourtant, la communauté internationale reste silencieuse.
Aucun appel pour des sanctions ou même une fin des accords préférentiels n'émane de l'ONU.
Même la décision de la Cour Internationale de Justice pour démanteler le mur et ne pas prêter aide ou assistance à la situation qu'il a créé est ridiculisée par les puissances mondiales et la communauté internationale dans son ensemble.
Au lieu de mettre clairement la pression sur Israël pour qu'il cesse de construire et démantèle le mur, le sécrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, se glorifie en prétendant établir un "registre" pour lister les dommages.
Les Palestiniens sont censés être reconnaissants qu'encore un autre bureau de l'ONU soit établi à Vienne avec un conseil "indépendant" dépendant uniquement du sécrétaire général qui, lui-même, se comporte comme une marionnette de l'administration américaine.
Oui, les Palestiniens veulent que ceux qui ont volé leur terre et leurs vies payent un prix pour cela.
Cependant, sans engagement clair de la part de l'ONU pour garantir que le mur sera stoppé et démoli, le registre, c'est trop peu, trop tard.
La Palestine et sa population ne sont pas à vendre. Une compensation avant la chute du mur n'est pas une option.
De plus, le registre tel qu'il est proposé déprécie excessivement les dommages du mur, négligeant complètement les larges effets sociopolitiques. Le mur ne concerne pas seulement les dunums de terre et le nombres de démolitions de maisons ou même la suppression de l'accès aux équipements éducatifs ou sanitaires.
Le mur signifie la ghettoisation d'une population entière, la destruction d'une économie, d'une société, des communautés et des vies.
Cependant, même le genre de "comptabilité humanitaire" proposé dans les confins étendus de la diplomatie viennoise n'est pas faite avec la décence nécessaire ou avec au moins des résultats clairs en vue.
Une quantification, et une éventuelle compensation des dommages après la chute du mur, sont soigneusement évitées.
Est évitée également toute consultation ou participation de la population affectée par le processus.
Nos voix n'ont pas été entendues et même à l'avenir, la seule tâche que nous aurons à faire sera de remplir des formulaires pour satisfaire la bureaucratie de l'ONU. C'est le même mécanisme qui s'occupe des réfugiés palestiniens depuis près de 60 ans et sera heureux de continuer à le faire pendant les 60 années à venir.
En tant que Palestiniens, nous savons que nous devons documenter les crimes et la destruction faits contre nous mais nous avons aussi appris que nous ne pouvions pas compter sur l'ONU.
Nous réclamons donc un registre national basé sur un effort collectif des organisations civiles palestiniennes et internationales et des organisations populaires ; un véritable effort pour documenter et dénoncer la dévastation du projet Sioniste de colonisation, d'Apartheid et d'expulsion provoquée par le Mur d'Apartheid.
Un registre qui sera géré par les Palestiniens allant de pair avec la véritable lutte pour faire tomber le mur et mettre fin à l'Apartheid, au racisme et à l'occupation en Palestine.
Nous croyons que les chose changeront. Les premiers signes sont clairs que les peuples et les organisations de la société civile - pas seulement en Palestine, mais également dans le monde entier - se réveillent à la réalité.
La collaboration et la complicité avec l'occupation est visée par des actions et des mesures populaires. Les syndicats, les églises et les divers groupes et organisations sociales et politiques joignent leurs efforts pour isoler Israël-Apartheid.
Pas un jour ne passe sans que quelqu'un quelque part dans le monde agisse.
Ce mouvement doit être cultivé, renforcé et développé.
A lire également, l'article de Jama Juma sur le site d'Enfants de Palestine : "Comment la Banque Mondiale favorise la dépossession et l'exclavage des Palestiniens"
Source : http://stopthewall.org/
Traduction : MG pour ISM
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Le Mur
Jamal Juma
11 novembre 2006