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USA - 31 août 2008
Par Khaled BensmaIn
Le Quotidien d’Oran, le 20 janvier 2005
S’il y a bien un sujet qui mérite d’être débattu aujourd’hui, c’est, assurément, celui qui s’adresse à la conscience de tout un chacun, particulièrement quand l’humanité nous semble t-il, traverse des moments qui vont décider de son existence. Existence menacée tant sur le plan politique, économique et social que sur celui de l’environnement où la prétention du « blanc » à asservir la nature et à s’en servir sans retenue conduit petit à petit le monde à la destruction.
Il se dégage, depuis quelques années, une impression de déjà vu ou lu. L’époque «heureuse» du capitalisme triomphant, où l’humanité meurtrie était assujettie au capital, enchaînée à ses lois d’airain.
Le profit se nourrissant du sang et de la sueur des hommes, de l’esclavage des femmes et des enfants, de la paupérisation et de la misère, de l’extermination des peuples et des cultures. C’est dans les durs combats que menèrent durant des décennies ouvriers et paysans pour plus de dignité et plus de droits ainsi que dans la lutte des peuples colonisés pour leur émancipation que se laissait percevoir une humanité qui s’accomplissait en creusant dans la douleur son sillon.
Les victoires chèrement conquises par les damnés de la terre nous laissaient croire à l’irréversibilité des acquis arrachés de haute lutte.
Même après le naufrage de l’utopie communiste, il était encore permis d’espérer que le capitalisme borné par les luttes sociales et l’évolution de la pensée philosophique serait plus humain. D’ailleurs ce concept devenu désuet semblait ne plus rendre compte des réalités auxquels est parvenue l’humanité et il lui est substitué le terme «néo-libéralisme» plus propre selon ses encenseurs, à exprimer cette fin de l’histoire qui trouve son principe final dans le marché - libéré des entraves du dirigisme étatique et anobli par la transposition qu’il opère sur le plan économique, de l’idéal de liberté - la démocratie et les droits de l’homme, étapes ultimes du mouvement de l’histoire.
Il est vrai que pour un certain nombre «d’idéalistes» ou de «réalistes», c’est selon, les Etats-Unis, après la défaite du régime soviétique, apparaissaient comme la seule puissance capable d’entraîner le monde vers un mieux être.
Le triomphe de la démocratie «libérale» sur le socialisme «totalitaire», allait annoncer la «fin de l’histoire» ou celle d’une certaine histoire marquée par les conflits de leadership et le début d’une nouvelle ère où l’humanité enfin apaisée, allait profiter du savoir et de la technologie de la seule puissance digne d’être évoquée et qui, détournée un moment de sa «mission civilisatrice» par les luttes idéologiques, allait s’acquitter de son dû envers un monde qu’elle malmena souvent en s’attelant aux formidables enjeux qui se posaient à l’homme.
L’environnement, la raréfaction de l’eau, la déforestation, la famine, les maladies endémiques, l’analphabétisme, la désertification …enfin, libérer les hommes de la misère et du sous-développement, favoriser leur épanouissement et jeter les bases d’une véritable fraternité humaine. A l’évidence un monde nouveau était en gestation et il était permis d’espérer… ou de rêver.
Mais très tôt, avant que l’acte de décès de l’Union soviétique ne fût établi, l’Amérique porta la guerre aux pays les plus faibles de la planète. L’Irak et la Somalie, l’Afghanistan et encore l’Irak.
C’est d’abord l’Irak qui va avoir le triste privilège d’apprécier le haut degré de civilisation d’une nation qui prétendait servir de modèle à l’humanité : 40 jours et 40 nuits de bombardements incessants, plus de 80.000 tonnes de bombes larguées sans discrimination sur tout un peuple. Beaucoup plus que sur l’Allemagne durant toute la guerre.
Des milliers de soldats enterrés vivants. Même ceux qui s’étaient retirés du Koweït en arborant le drapeau blanc de la reddition ne furent pas épargnés. Ils furent lâchement bombardés et mitraillés. Des armes interdites par les conventions internationales telles que l’uranium appauvri ou les bombes à fragmentation furent utilisées. Puis le pays détruit, les Américains se retirèrent en imposant un embargo des plus inhumains à une population déjà exsangue.
Plus de 1.800.000 enfants de moins de cinq ans moururent durant cette décennie du fait de la malnutrition et de l’absence de médicaments. Cancers et mutations génétiques firent leurs apparitions, conséquences de l’utilisation de l’uranium.
Les carences alimentaires et les maladies très souvent mal soignées ont condamné toute une génération d’enfants à traîner dans leurs têtes et dans leurs corps les stigmates d’une décennie de crimes contre l’humanité, perpétrés par une Amérique prédatrice et raciste, oppressive et arrogante et couverte par le silence et l’indifférence -aussi coupables que criminels- de la communauté internationale. Voilà qu’à un rapprochement des peuples par la culture et la communauté de destins, nous eûmes droit à la négation de l’Autre et à plus de destructions et à plus d’injustices et à plus de mépris.
L’Irak, depuis la fin de la deuxième guerre du Golfe, allait vivre une décennie d’horreurs faite de privations et de morts conjugués au quotidien. Son sort dépendait du bon vouloir de quelques pays de la «coalition» qui, régulièrement se réunissaient pour reconduire un embargo qui était, en lui même, un génocide.
Le prétexte de la reconduction des sanctions était que ces pays là n’avaient pas la certitude que l’Irak s’était plié aux décisions du conseil de sécurité en matière de désarmement et ils maintiendraient l’étau sur l’Irak tant qu’ils n’en auraient pas la conviction.
Le cynisme les conduisant à exiger que se soit lui qui en apporta les preuves. Or ces dernières étaient difficiles à établir et la seule manière d’y parvenir était de montrer sa disponibilité à ouvrir tous ses sites aux inspecteurs dépêchés par l’O.N.U. Ceci va, cependant s’avérer insuffisant, car malgré l’absence de toute arme de destruction massive, les Etats-Unis se sont toujours appliqués à envoyer comme responsables de ces inspections des hommes qui, à l’instar de l’Australien Butler, émargeaient à la C.I.A et qui avaient pour instruction d’établir des rapports qui maintiendraient l’embargo.
Il a fallu que l’intérêt des sociétés pétrolières américaines (Halliburton va obtenir une dérogation spéciale pour poursuivre ses activités en Irak malgré le régime des sanctions internationales) commanda la levée partielle des sanctions, pour que la formule «pétrole contre nourriture» fut votée par la commission responsable de l’embargo.
Encore que les premiers bénéficiaires de cette mesure, furent les dirigeants américains eux-mêmes et à leur tête le vice-président Dick Cheney qui, tout en faisant la guerre à l’Irak, négociait sur ce pays de fabuleux contrats. Il est évident que la réunion des bonnes consciences européennes autour des Etats-Unis servait à les déculpabiliser et à diluer leur implication dans une responsabilité collective qui devait rendre leur déni de justice moins odieux.
Tout un peuple était donc pris en otage par une poignée de dirigeants européens dominés par une administration américaine néo-conservatrice convaincue que le monde ne pouvait tourner qu’autour des Etats-Unis et de leurs intérêts. Les attentats du 11 septembre allaient servir de prétexte pour une intervention des Etats-Unis dans la région. Encore que celle-ci, en ce qui concerne l’Irak, était dans l’agenda du président Bush dès son arrivée à la Maison Blanche (1).
Il avait engagé son ministre de la défense et son commandant des opérations le général Tommy Franks de préparer un plan d’attaque contre ce pays bien avant le 11 septembre 2001.
Ce sont les attaques contre les symboles de la puissance américaine qui vont être à l’origine du changement des priorités. Ce n’est que quelques mois avant le 11 septembre que les Etats-Unis commencent à pendre leurs distances du régime de Kaboul (en janvier 2000, la Maison Blanche débloque 114 millions de dollars pour l’Afghanistan (2).
L’aventure afghane:
Les Etats-Unis qui ont soutenu durant plusieurs années le régime des Talibans décident de leur déclarer la guerre sous le prétexte qu’ils hébergent Oussama Ben Laden, désigné avant toute enquête, comme le responsable des attaques contre le Pentagone et les deux tours de Manhattan et qu’ils refusent de le livrer à la «juste vindicte» américaine. Le Président américain, dans un regain de religiosité, manipulant le prêche et l’anathème, la Bible sur le cœur et les yeux fixés sur les puits de pétrole du Moyen et de l’Extrême-Orient appellera à «une croisade du bien contre le mal». Succédant à son père qui avait déjà parlé « d’empire du mal », lors de la deuxième guerre du Golfe, il n’eut aucune difficulté à mobiliser une Amérique bigote conditionnée par un sentiment permanent d’insécurité savamment entretenu par les médias.
Encore sous le choc des images diffusées, à dessein, en continu, le monde va emprunter avec obséquiosité le pas aux Américains. Malgré les preuves qui commencent à affluer et à dévoiler que la guerre contre l’Afghanistan et l’Irak avait été programmée par l’administration Bush bien avant le 11 septembre, aucune retenue et encore moins aucune attitude, sinon critique, du moins prudente, à l’égard de ce qui paraît déjà comme une monstrueuse manipulation, n’est ébauchée.
Les déclarations de soutien pour ne pas dire d’allégeance, à l’Amérique sont régulièrement répertoriées et les gouvernements, qui sont sommés de prendre clairement position avec le nouveau « maître du monde », se hâtent de rejoindre le « bon camp ». En effet, le menaçant «qui n’est pas avec nous, est contre nous» de Georges Bush est assez dissuasif pour laisser une quelconque place à la sagesse ou à la raison. D’autant plus que la guerre qui s’annonce sordide, dégage une forte odeur de pétrole qui risque, au moment de la curée, de pénaliser tous ceux qui ont refusé de se joindre à la meute.
L’Afghanistan, où les Américains étaient partis ramener «mort ou vif» Ben Laden, chasser les Talibans du pouvoir et installer un gouvernement acquis à la «démocratie», selon les canons américains, est l’un des pays les plus pauvres du monde, mais sa position géopolitique, le prédispose aux convoitises américaines.
Situé aux marches des pays qui se présentent en rivaux potentiels des Etats-Unis (Russie, Inde et Chine) et au cœur d’une région qui «dénombre environ 75% de la population mondiale, la plus grande partie des richesses physiques, 60% du P.N.B. mondial, les six économies les plus prospères et les six plus gros budgets de la défense" (3) et à un cas près tous possèdent l’arme nucléaire. «Leur puissance cumulée dépasse de loin celle de l’Amérique. Heureusement pour cette dernière, le continent est trop vaste pour réaliser son unité politique» (4). Surtout si les Etats-Unis veille à ce que cette unité ne se fasse pas en empêchant la réunification des deux Corée, la récupération de l’île de Taiwan par la Chine, en contrôlant les immenses richesses du bassin de la Caspienne, et en assurant une présence militaire qui constituerait une menace potentielle pour les Etats qui tenteraient de remettre en question «l’équilibre» qu’ils ont décidé.
Aux nécessités géostratégiques s’additionne la cupidité des dirigeants américains tous très liés aux milieux pétroliers. Le contrôle des ressources énergétiques de la région contribue à contrôler l’expansion économique de la Chine et à affaiblir la Russie qui reste malgré la crise qui l’a mise à genoux, une puissance potentielle, mais que les problèmes économiques ont réduit à un pays fragile et peu solvable, (de nombreuses livraisons de pétrole d’Asie centrale à la C.E.I. ne sont toujours pas payées). Pour cette raison, il importait aux Etats-Unis de s’emparer de cette manne, de contourner ce pays en transportant le pétrole et le gaz turkmène par oléoducs vers les terminaux de l’Inde et du Pakistan à travers le territoire afghan. Il est évident que ce projet exigeait pour sa mise en œuvre, l’accord des Talibans. En même temps, l’occasion était trop belle pour la caste de ploutocrates qui dirige l’Amérique et qui n’hésite pas à confondre ses intérêts avec ceux de son pays, de s’enrichir sur le cadavre de dizaines de milliers de personnes innocentes, en faisant main basse sur les champs pétrolifères.
C’est finalement la réticence des Talibans à servir les intérêts américains qui va être à l’origine de la mobilisation des forces de l’O.T.A.N par les Etats-Unis contre l’Afghanistan. Il ne fut pas difficile aux Américains de mobiliser l’opposition afghane contre les Talibans et de mettre à sa disposition la logistique et les hommes nécessaires à l’entreprise de renversement du régime en place et de précipiter le pays dans le chaos. En effet, le régime renversé, les Talibans chassés de Kaboul vont reprendre le chemin des montagnes.
Malgré les intenses bombardements de ce qu’on croyait être les refuges des militants du Mollah Omar, ni celui-ci ni Oussama Ben Laden ne seront inquiétés par les troupes américaines. Comble de cynisme et de mépris envers des êtres qu’on a voulu réduire à des ventres affamés et pour qui la liberté et la dignité n’auraient aucun sens, ces bombardements étaient accompagnés de parachutages de colis de nourriture. Un gouvernement hétéroclite supposé rassembler l’ensemble des sensibilités afghanes est installé à Kaboul avec à sa tête Hamid Karzaï, un consultant de la société pétrolière américaine Unoca. D’origine Afghane installé aux Etats-Unis, il est chargé d’étendre à son pays la pax américana, et de veiller aux intérêts de ses commanditaires. Depuis l’invasion de l’Afghanistan qui était supposé n’être qu’une promenade, et malgré la présence des troupes de l’O.T.A.N., l’emploi d’énormes moyens et des élections qui n’ont été ni propres ni transparentes, le pays est loin d’être « normalisé ».
Le guêpier irakien :
Cependant, dopés par les « rapides succès » de leur campagne afghane et par les expressions de soutien exprimés par l’ensemble de la communauté internationale, les Etats-Unis vont immédiatement se lancer dans la préparation de l’opinion internationale à une guerre contre l’Irak. Ils vont tenter, sous couverts du désarmement de ce pays, de profiter de ce sentiment de solidarité, pour entraîner dans cette aventure le plus grand nombre de pays de l’O.N.U. Mais cette fois-ci, ils ne parviendront pas à faire l’unanimité autour de leur option guerrière, malgré la manipulation des preuves censées arracher l’adhésion de l’ensemble de leurs alliés.
Cet échec ne les empêchera pas d’aller seuls à la guerre, enfin presque, puisque parmi les grandes puissances ils ne seront suivis que par la Grande-Bretagne, l’Italie et l’Espagne attirés par les profits substantiels qu’ils espèrent tirer de la détresse des Irakiens. Dans leur entreprise ils seront soutenus, et d’une manière explicite, par des dirigeants politiques arabes de premier plan (5) ou d’une manière implicite par l’ensemble des gouvernements de la région, dont l’attitude servile et timorée était plus qu’un encouragement à l’agression américaine.
Des dirigeants impopulaires qui ne doivent leur survie politique qu’au soutien tout à fait intéressé des puissances qui les emploient et qu’ils se gardent de déplaire. Compromis dans des politiques contraires aux intérêts de leurs peuples, n’ayant aucune prise sur des décisions qui se prennent en leur absence et qui, néanmoins engagent l’avenir de leurs pays, ils nous renvoient l’image d’un monde arabe, désarticulé, à la dérive, inapte à faire face aux menaces et aux enjeux de l’heure.
Certes s’il est légitime de les incriminer et de les rendre responsables de la plupart de nos maux, il faudrait souligner leur absence de marge de manœuvre face à un système mondial dominé par les Etats-Unis et devant lequel ils se trouvent tout à fait désarmés. Le peu de cas qu’ils font de la volonté de leurs peuples et leur refus de les laisser assumer leurs responsabilités historiques, les réduit à être -d’une manière consciente ou inconsciente- les supplétifs de cet ordre mondial. Eux qui n’hésitaient pas au nom de la «légalité internationale» à accabler Saddam Hussein en exigeant de lui de se conformer aux décisions du Conseil de sécurité verrouillé, comme tout le monde le sait, par les Etats-Unis, observent un mutisme scandaleux sur ce qui se passe en Irak et particulièrement dans la ville martyre de Felloudja.
Les bombardements incessants, les massacres d’enfants et de femmes qui tombaient tous les jours sous les « effets collatéraux » des attaques américaines, l’usage d’armes sophistiquées contre une population qui n’a d’autre choix que celui de faire front aux attaques des troupes d’occupation décidées à détruire leur ville aux motifs, par ailleurs, assez contradictoires. D’une part, la population de Felloudja serait prise en otage par des terroristes et qu’il devenait urgent de l’en libérer, et d’autre part, cette même population était accusée de protéger Abou Mossaab Ez-Zarkaoui et qu’elle s’exposait à la destruction de sa ville si jamais elle ne le leur livrait pas. Cette exigence, qui voulait nier tout caractère endogène à la résistance irakienne, visait à sa sous-estimation et à faire tenir à Ez-Zerkaoui le rôle qu’ont joué les armes de destruction massive dans la préparation de l’opinion internationale à la guerre contre l’Irak : justifier de nouveaux carnages. 20000 soldats américains, accompagnés de centaines d’irakiens, vont, au bout d’une dizaine de jours d’un combat inégal où seront employés les gros moyens : chars, artillerie lourde, aviation qui régulièrement vont pilonner la ville, pénétrer dans une Felloudja héroïque qui est allée jusqu’au bout de son engagement à défendre sa liberté et sa dignité.
A l’arrivée des Américains il ne restait que des ruines et des morts que les Américains comptabilisaient comme autant de «terroristes». Evidemment, le mythique Az-Zerkaoui avait réussi à s’échapper.
Les hommes censés apporter la civilisation aux Irakiens et aux arabes d’une manière générale se révélèrent des hommes de sac et de corde. Pillant ce qu’il y avait à piller, tuant ou plutôt assassinant, jusque dans les lieux de culte, achevant, sous l’œil des caméras, les blessés dans les mosquées. Il est vrai que ces crimes tout comme la torture sont présentés comme des bavures commises par des individus isolés et qu’ils seront sanctionnés. Cela n’est pas sans nous rappeler l’épisode tragique de ce petit village vietnamien My Lai complètement détruit en mars 1968, par une compagnie de soldats américains.
Leurs officiers avaient parlé d’une victoire totale sur l’ennemi en dénombrant 128 tués parmi les Vietnamiens alors que la réalité dénombrait plus de 500 morts essentiellement des femmes, des enfants et des vieillards. Malgré les tentatives de l’armée de camoufler les faits, le scandale éventé par la presse, conduisit l’officier qui commandait la compagnie devant la justice qui le condamna en 1970 à la prison à vie. Mais quatre années plus tard, l’officier en question retrouva la liberté.
Aujourd’hui, les Américains ont décidé que leurs soldats ne sauraient être passibles d’aucunes poursuites judiciaires pour les crimes qu’ils ont commis ou qu’ils pourraient commettre. Ainsi, les marines, couverts par leur gouvernement et assurés de l’impunité grâce à des «conventions», qui les prémunissent contre toute poursuite pénale internationale, sont autorisés à commettre des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité que personne n’irait leur reprocher.
Ce qui se passe aujourd’hui dans la région n’est pas uniquement le fait d’une conjoncture marquée par la guerre, ou celui d’une administration dominée par ceux que l’on appelle les faucons, mais un fonctionnement qui, pour être naturel chez les décideurs américains, procède de cet état d’esprit où l’impérialisme se conjugue avec la prédication et l’amour du profit. L’occupation de l’Irak et de l’Afghanistan est pour l’Amérique bigote, un acte de foi qui s’inscrit dans la croyance en la parousie ou le retour glorieux du Christ et en même temps une bonne affaire dans le sens trivial du terme, pour les Etats-Unis et le clan des pétroliers qui composent l’essentiel de l’équipe qui gère les affaires américaines et qui entend arracher l’essentiel des marchés pour la «reconstruction» de l’une des plus vieille civilisation du monde, que leur président avait juré de ramener à «l’âge préhistorique .
La guerre qui est faite à l’Irak, à l’Afghanistan et les menaces qui pèsent sur les pays de la région, tout comme le soutien total et inconditionnel des Etats-Unis à l’Etat hébreu dans son entreprise d’extermination des Palestiniens a permit de clarifier un champ politique opacifié par des concepts vidés de leurs sens, pour ne pas dire polysémiques (tout dépend de quel côté de la frontière on se trouve) où la liberté, la démocratie, le progrès, les droits de l’homme ne signifient pas nécessairement un mieux être mais renvoient à l’occupation, au pillage, à la torture, aux privations et à la mort violente. Elle a induit, pour le moins, chez les Arabes et les musulmans, une plus grande conscience des enjeux et une meilleure appréciation de l’usage qui est fait des notions universelles, régulièrement violées par ceux là même qui s’en prévalent.
Mais cette fois-ci les Etats-Unis n’ont plus le monopole de l’information et leurs «exploits» sur les terrains d’opérations des pays les plus faibles du monde ont fait le tour de la terre. Et c’est non sans surprise et également avec horreur qu’ils nous replongent dans leur passé. Celui que lui connurent les Amérindiens exterminés par les émigrants européens, et les millions de noirs d’Afrique, déportés en esclavage dans le nouveau monde ainsi que les milliers de morts et d’handicapés d’Hiroshima et de Nagasaki victimes de la bombe atomique et enfin le Vietnam qui ne se libéra du colonialisme américain qu’après avoir subi dans sa chair toute la panoplie des crimes de guerres et des crimes contre l’humanité.
Les Etats-Unis n’ont jamais divorcés de l’univers de violence qui a été à leur origine. Nous avions tendance à occulter cet élément constitutif d’une histoire qui a fait l’Occident et qui a façonné le monde tel qu’il est et dont l’administration américaine dépourvue de toute conscience morale ne fait que perpétuer la sanglante tradition. Non pas que les Etats-Unis soient absents de l’histoire du Tiers-monde, car leurs crimes envers l’humanité ne peuvent s’extraire aisément des mémoires et des consciences, mais ils existaient surtout auprès des élites qui connaissaient peu ou prou l’histoire de ce pays. Mais avec la guerre d’Afghanistan et plus particulièrement l‘agression contre l’Irak, les Etats-Unis sont entrés brutalement et par effraction dans le quotidien des peuples arabes et musulmans.
Aux drames classiques qui accompagnent toute guerre, il faut ajouter, en ce qui concerne l’Irak, les atrocités de l’occupation. Les Irakiens ne mirent pas longtemps pour comprendre que les Etats-Unis n’étaient pas venus en Irak pour les libérer de Saddam Hussein, mais pour occuper le pays et mettre la main sur son pétrole. Presque immédiatement l’opposition à cette occupation va s’organiser et rapidement les Américains vont se trouver confrontés à une résistance à laquelle ils ne s’attendaient pas et à laquelle ils n’étaient pas préparés, persuadés qu’ils étaient que personne n’oserait les défier et s’opposer à leur puissance.
Pour faire face à une situation sécuritaire qu’ils ne pouvaient pas maîtriser et qui progressivement leur faisait de plus en plus mal, ils vont recourir aux pratiques classiques de tout colonisateur. La manipulation, la provocation, les exécutions extrajudiciaires et la torture. Toute pratique consubstantielle à une colonisation- mais que les Américains se gardent bien de reconnaître- et dont ils attribuent la paternité, dans une mauvaise foi évidente, à des auteurs isolés.
Lorsque le général Mark Kimmitt, face à la résistance irakienne, promet de «tout détruire» en Irak, il faut lui faire confiance, il sait de quoi il parle. Il ne déroge à aucune règle appliquée à la lettre par tous les colonisateurs et il n’innove en rien en matière de destruction des personnes et des biens. La torture est pour lui un élément stratégique dans sa guerre contre la résistance irakienne et celle-ci fait bien partie des traditions américaines.
L’ombre de la C.I.A.
Sans remonter à l’époque des « pères fondateurs » où des primes étaient octroyées à tout assassin d’indiens qui présentait comme pièces comptables le scalp de ses victimes et où le « nègre » fouetté et marqué au fer rouge avait le jarret coupé en cas de tentative de fuite, l’histoire plus récente de ce pays raconte les «exploits » de l’armée américaine au Vietnam et dans pratiquement tous les pays d’Amérique centrale et d’Amérique du sud. Aucun des gouvernements qui voulut mettre les richesses de son pays au service des classes les plus défavorisées ne trouva grâce aux yeux des Etats-Unis, aucun dirigeant qui voulut faire bénéficier son peuple d’un peu plus de justice, de liberté et d’une réelle démocratie ne resta assez longtemps au pouvoir pour concrétiser ces aspirations sans que les Etats-Unis n’y interviennent de la manière la plus violente qui soit.
Chaque fois que les maigres revenus d’une nation étaient mobilisés pour créer et développer les services sociaux, les Etats-Unis fomentent coups d’états et assassinats afin, disent-ils, de combattre le «communisme».
En fait, les ennemis des Etats-Unis ce sont plutôt ces mouvements d’essence populaire qu’ils soient nationalistes ou socialistes issus des milieux défavorisés et qui avaient pour objectif une plus grande justice sociale et qui avaient inscrit, pour la plus part d’entre eux dans leur programme, la distribution des terres aux paysans, l’école gratuite et obligatoire, la nationalisation des banques et des entreprises étrangères. Que ce soit le Guatemala, le Honduras, le Salvador, le Chili, le Nicaragua ou l’Uruguay, tous les pays du continent Sud-américain savourèrent les bienfaits généreusement dispensés par des dictatures particulièrement sanglantes imposées par les Américains.
Des milliers de personnes assassinées, emprisonnées dans des conditions inhumaines, torturées de la manière la plus atroce grâce au savoir-faire de la C.I.A. Ce savoir-faire, l’Agence américaine va l’enseigner, dans le cadre de la coopération militaire avec ces pays, à des agents qu’elle forme à la lutte «contre-révolutionnaire».
Le renseignement et la torture constituaient l’essentiel de l’enseignement qui était dispensé à ces «faiseurs de coups d’Etat». Fort Benning en Géorgie, va abriter la School of the Americas (S.O.A.), qui dépend du Ministère américain de la défense. Cette école forme les militaires des pays latino-américains à la lutte contre-insurrectionnelle, aux opérations de commando et à la haine de tout ce qui peut s’apparenter au «communisme» c’est-à-dire de tout ce qui ne défend pas les intérêts des Américains et de l’oligarchie qui les sert.
Si l’armée avait sa propre école de torture, la police n’était pas en reste et au milieu des années 70, le Bureau de la Sécurité Publique (O.P.S.) branche de l’agence de développement, l’A.I.D., forma plus d’un million de policiers des pays du Tiers Monde (6), destinés à réprimer la contestation populaire et à enrayer toute tentative de changement social en faveur des couches démunies.
L’enseignement assuré aux policiers était à l’image de celui dispensé aux militaires par la S.O.A, à la différence que la «compétence de ces derniers s’étendait également à la campagne. Soutirer les renseignements, n’était pas une activité dirigée par le hasard ou liée au seul savoir faire de ceux qui étaient chargés de mener les interrogatoires. Ces derniers étaient menés par des spécialistes, médecins, psychanalystes, qui avaient une connaissance de l’anatomie humaine et qui devaient par la douleur ou le stress, briser la résistance des corps et des esprits. Par souci d’efficacité, les cours étaient uniformisés et des manuels étaient rédigés et distribués aux « élèves ». En septembre 1996, sous la pression des médias, le Pentagone publia sept manuels utilisés à la S.O.A. et dans lesquels figuraient en bonne place, «la torture, l’exécution, le chantage, l’arrestation des proches de ceux qui sont interrogés»(7). Il était recommandé à ces «défenseurs du monde libre» d’amener le suspect «dans la pièce, les yeux bandés, les mains liées et il doit rester ainsi durant tout le processus…Le sujet est entièrement déshabillé…». L’humiliation ayant pour objectif d’affecter la personnalité du prisonnier et de lui saper le moral. Il est bien précisé dans le manuel d’instruction, qu’il faut que «ses vêtements lui soient enlevés, car les vêtements familiers renforcent l’identité et donc la capacité de résistance». Le sujet étant mis en condition, l’électricité sur tout le corps, l’eau savonneuse ingurgitée en quantité et rendue par l’action des soldats qui se laissaient tomber sur le ventre déformé du suspect, l’asphyxie par application de chiffons humides sur le visage et bien d’autres délicatesses, prenaient le relais de la torture morale.
Lorsque le Congrès américain, devant le scandale soulevé par ces méthodes, décida de mettre un terme à cette partie du programme dispensé par l’O.P.S., la D.E.A., brigade des stupéfiants pris la suite en septembre 1996, avec l’aide du F.B.I et du département de la Défense (8)
Les témoignages des victimes de la torture, que confirment les aveux des tortionnaires d’Abou Gherib, corroborent précisément ceux des prisonniers des autres centres de détention situés en Irak ainsi que de ceux qui sont passés entre les mains des Américains en Afghanistan. La similitude des méthodes employées dénote d’un apprentissage généralisé par un enseignement pris en charge par les services du Pentagone et dispensé aux spécialistes du renseignement.
S’il demeure quelques doutes sur l’hypocrisie de l’administration américaine qui fait mine de s’offusquer et d’être scandalisée par les agissements de sa soldatesque, il suffirait de se référer à ce que subissent comme tortures quotidiennes et atteintes aux droits humains, les détenus de Guantanamo, une base américaine à Cuba, considérée comme un territoire de non droit soustrait à toutes les lois Américaines et internationales, pour se faire une idée exacte du sens moral et des sentiments humanitaires qui animent les responsables américains.
D’ailleurs, un rapport publié en juillet 2004, met en cause le général Geoffroy Miller accusé d’avoir utilisé en Irak, les techniques de tortures expérimentées à Guantanamo. Il est rapporté que « les militaires chargés d’interroger les détenus en Irak ont employé improprement les méthodes sévères approuvées pour être seulement appliquées aux détenus de Guantanamo Bay (9).
Ce qui s’est passé dans les prisons irakiennes et en Afghanistan ne doit susciter l’étonnement et la stupeur que chez les personnes non averties des méfaits de l’impérialisme américain et d’une manière générale des pratiques des armées d’occupation. Pourtant les guerres coloniales sont riches de ces exemples où ces dernières confrontées à une résistance populaire qu’elles qualifient de terrorisme ne vont pas hésiter à s’enfoncer dans l’horreur pour « pacifier » un peuple rétif à la « liberté », au « progrès », à la « démocratie », en un mot à la « civilisation » que le colonisateur veut lui imposer par le sabre et le goupillon. Cependant ce qui aggrave les faits en Irak, c’est que les militaires, tout comme une partie de la population américaine, se croient investis d’une mission quasi divine. Croyance que conforte un président qui n’hésite pas, dans ses discours, à recourir à la Bible et à placer la guerre contre l’Afghanistan et l’Irak sous le signe d’une croisade contre le « Mal » incarné évidemment dans les Irakiens, et qui pousse ces soldats élevés dans la haine de l’«Autre » qui n’est pas soi-même et le racisme le plus abject, à emprunter, dans l’excès, le pas à leur président et à commettre les pires horreurs au nom d’une légitimité quasi religieuse qui les absous de tout crime.
Il est évident que ce n’est pas parce que ces crimes contre l’humanité sont dénoncés par l’administration et l’opinion américaines que la torture va cesser en Irak. On en avait déjà parlé pendant et après la guerre du Vietnam et également dans les dictatures d’Amérique du Sud lorsque la C.I.A. officiait aux basses œuvres de ces régimes. Mais la défaite du camp communiste allait consacrer l’omnipotence des américains sur le reste du monde. Cette nouvelle situation allait les amener à afficher sans aucune retenue leur mépris de l’opinion mondiale et de la légalité internationale.
«Le complexe militaro-industriel»
Mais c’est avec l’arrivée des néo-conservateurs au pouvoir que le caractère impérialiste des Etats-Unis apparaît plus clairement (malgré la fin de la guerre froide, le budget militaire des Etats-Unis ne cesse d’augmenter) et ne sacrifiera pas aux usages de la rhétorique. Que l’intérêt et la «sécurité» des Américains, qu’ils définissent unilatéralement, puissent dépendre de quelques lois ou conventions internationales ou qu’ils soient aliénés par des considérations humanitaires, philosophiques ou morales est inacceptable pour l’establishment américain. Il est tout à fait naturel, aux yeux des Américains, que la première puissance économique et militaire soit au dessus des lois et qu’elle soit la seule à apprécier la menace qui viserait ses intérêts et que naturellement pour y faire face, elle puisse unilatéralement déclarer la guerre et envahir n’importe quel pays si elle estime cela nécessaire. Pour se faire il lui aura suffi de détourner, à son profit, le sens de l’article 51 de la charte des Nations unies.
En effet et en opposition avec les lois et conventions internationales, les Etats-Unis vont tailler à leur mesure, une définition à l’article 51 de la charte des Nations unis, qui rappelle dans quel cas un Etat peut évoquer la légitime défense et s’en réclamer afin de se défendre contre «une attaque armée…jusqu’à ce que le conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires au maintien de la paix et de la sécurité internationales». La légitime défense implique une réponse de l’agressé contre une attaque directe sur son territoire. L’extension de cette notion par les Américains va englober la prévention et leur permettre, sous le couvert de la légitime défense, de mener ce qu’ils appellent des « guerres préventives ». On imagine aisément l’arbitraire qui présiderait aux destinées du monde si chaque pays se réclamant de ce droit décidait de sa «guerre préventive» contre un autre Etat sous le prétexte de défendre ses intérêts.
Il n’est pas difficile de comprendre que ce «souci » de la sécurité cache mal la volonté des Etats-Unis de se libérer de toute contrainte légale et de s’autoriser, s’ils décident qu’ils sont menacés, de porter la guerre dans n’importe quel pays du monde. Mme Albright n’a laissé aucun doute planer sur ce sujet, «il se peut qu’il revienne avec quelque chose qui nous déplaise, auquel cas nous nous en tiendrons à l’intérêt national» (10) parlant ainsi du Secrétaire général des Nations Unis qui venait d’annoncer qu’un accord avait été conclu avec l’Irak.
Lui emboîtant le pas le consultant juridique du département d’Etat, Abraham Sofaer, précisera l’idée. «Puisque la majorité du monde ne partage pas notre point de vue, nous devons nous réserver le pouvoir de décider comment nous agirons et quels problèmes relèvent essentiellement de la juridiction des Etats-Unis, comme le décident les Etats-Unis" (11). Le monde constituant l’arrière cour des Etats-Unis.
Il apparaît de plus en plus évident aujourd’hui, avec l’équipe Bush au pouvoir, que la finance et intimement associée à la politique et le danger pour la paix et la stabilité dans le monde s’accroît d’autant plus que la frontière, entre les intérêts des hommes d’affaires américains qui ont leurs entrées à la Maison Blanche, se confond avec ceux des Etats-Unis. «Plusieurs des principaux membres de l’administration (dont le président lui même, le vice-président Richard Cheney et la conseillère de politique étrangère Condoleezza Rice), convoitaient les ressources d’un pays potentiellement riche» (11). Ce qui est bon pour eux doit l’être forcément pour les Etats-Unis et les guerres qu’ils font mener à leur pays sont leurs propres guerres. Sans aucun scrupule et sous des prétextes fallacieux, ils n’hésiteront pas à porter la mort et la désolation là où leurs intérêts le leur commande.
On sait qu’avec l’arrivée de G. Bush à la présidence des Etats-Unis entre 1988 et 1992 c’est le clan des pétroliers qui fit son entrée à la Maison Blanche. Le président lui même siégeait au conseil d’administration de Caterair, une des filiales de Carlyle, «dont certains actionnaires étaient liés à l’industrie aéronautique et à l’industrie de défense» (12). Le fils dirigeait de 1986 à 1993 la société Harken Energy Corporation, société pétrolière texane créée par Bush père. Dans l’entourage immédiat du Président américain, une immense toile d’araignée s’est constituée et dans laquelle s’entrecroisent hommes d’affaires plus ou moins véreux, personnalités politiques aussi intéressés par le pouvoir que par l’argent, responsables militaires qui rêvent de refaire le Vietnam à moindre risque.
Au centre de cette toile et tout près du président, se trouve le chef du Pentagone, Donald Rumsfeld. L’homme multimillionnaire a su intelligemment mettre ses fonctions politiques et ses entrées à la Maison Blanche au service de ses affaires privées et de celles de ses amis. Donald Rumsfeld s’est distingué en 1977, un an après avoir quitté son poste de Secrétaire d’Etat à la défense sous le gouvernement de Gerald Ford, lorsqu’il rejoignit le groupe Searle, qui avait rencontré des problèmes, auprès de l’administration chargée du contrôle du médicament et de l’alimentation quant à «l’agrément d’une molécule, l’aspartame, que Searle espère vendre comme un substitut au sucre» (13). Malgré les soupçons de toxicité révélée par les analyses qui avaient été refaites, car celle de Searle présentaient de nombreuses erreurs, la mise sur le marché de l’aspartame est autorisée contre l’avis du comité scientifique mandaté par l’administration, et cela grâce aux nombreux amis que Rumsfeld avait su placer à des postes sensibles. Il reste à souligner que le procureur chargé de l’enquête pénale, va démissionner pour rejoindre le cabinet d’avocats de Searle. La «mission» accomplie, Rumsfeld quitte Searle en empochant au passage 5 millions de dollars (14).
En 1990 il est appelé à la rescousse d’une entreprise, la General Instrument, (G.I.) qui a de sérieux problèmes financiers. La société en question qui vient d’investir beaucoup d’argent dans la technologie de la télévision digitale s’est trouvé disqualifiée par l’autorité de régulation des télécoms qui n’a retenu pour la compétition que les projets de quatre sociétés, trois américaines et une japonaise qui répondaient au cahier de charge qui définissait les conditions d’obtention du marché. Le choix de l’autorité de régulation s’était fixé sur la technologie analogique. Rumsfeld prend la tête de G.I. et dans le même temps il se fait nommer, malgré l’irrégularité de la procédure, membre de la commission de sélection de l’autorité de régulation.
La présence de Rumsfeld dans les deux instances va lui permettre d’influer sur le choix de la commission qui revient sur sa décision quant au choix de l’analogique. La société japonaise est éliminée, les Américaines se reconvertissent au digital, G.I. prend l’essentiel du marché et Donald Rumsfeld, en quittant G.I. encaisse, pour service rendu, un pactole de 7 millions de dollars. En mars 2000, un dirigeant de G.I. révèle que sa société était la seule «à proposer du digital, mais nous avions avec nous Don Rumsfeld, qui avait ses entrées à Washington, dans l’administration». Dix ans plus tard le choix du digital est un fiasco (15).
Enfin, sa présence au Pentagone va lui permettre d’allier à ses convictions ultra-libérales son sens des bonnes affaires. Fidèle à une conception du libéralisme où la liberté dans le domaine économique ne doit souffrir d’aucune entrave, Rumsfeld va ouvrir les services du ministère de la défense aux capitaux privés.
Le maître du Pentagone qui est le «chef de file d’un réseau qui navigue entre les conseils d’administration de la corporate América et les officines gouvernementales» (16) va confier à des firmes privées, dont il n’est pas étranger, la sous-traitance des services qui ne ressortent pas du «cœur de la guerre». Du nettoyage des treillis au ravitaillement de l’armée américaine en carburant, de la location de gardes corps à la formation de policiers irakiens, depuis l’alimentation des G.I. jusqu’à la collecte des renseignements. Tout est pris en charge par des entreprises privées qui n’hésitent pas à surfacturer leurs prestations et se faire ainsi de substantiels profits sur le compte de l’armée américaine.
Lors de sa prise de fonction en 2000, il fait une déclaration de patrimoine, dans laquelle figure, bien entendu, tous les biens qu’il possède. Il lui faudra 50 pages pour y caser sa liste.
Le vice-Président, Dick Cheney, ex- directeur de la société Halliburton et principal bénéficiaire des contrats de livraison de pétrole irakien, est avec Richard Perle et Wolfowitz, la cheville ouvrière de la guerre contre l’Afghanistan et l’Irak. Alors qu’il poussait à la guerre contre l’Irak, et que la population irakienne subissait les affres de la faim et la maladie, Dick Cheney et ses comparses tiraient des plans pour mettre le pays à sac. Il bénéficiera pour sa société de contrats très juteux qu frisent le scandale financier au point où une commission d’enquête a été dépêchée par la C.I.A., pour enquêter sur les surfacturations des services d’Alliburton.
• Condoleeza Rice directrice du Conseil National de Sécurité (N.S.A.) ex-responsable du groupe pétrolier Chevron (ex-standard-oil) est membre de la Rand Corporation, club de réflexion financé par le Pentagone.
• James Baker « grand pétrolier texan, pluri millionnaire » a été à la tête de Carlyle Group.
• Donald Evans Secrétaire d’Etat au commerce, responsable à Brown-&-Root société d’ingénierie pétrolière,
• Spencer Abraham, secrétaire d’Etat à l’énergie, également responsable à Brown-&-Root,
• Cathleen Cooper sous-Secrétaire au commerce et ex-responsable chez Exxon.
• George Shulz, ex-Secrétaire d’Etat est membre du comité de conseil du Pentagone (Defense Policy Board ) et administrateur de Bechtel, l’un des principaux bénéficiaires des aides à la reconstruction de l’Irak ( sans passer par la procédure des appels d’offre, cette société a obtenu pour 1,8 milliards de dollars de contrats)(17).
• Paul Wolfowitz ministre adjoint à la défense est consultant chez Gruman Group.
• Jay Garner, premier gouverneur de l’Irak après la chute du régime de Saddam Hussein est chargé de « rétablir » la sécurité et de superviser la « reconstruction » du pays. Le général Garner est l’ami personnel du ministre de la défense Donald Rumsfeld, il est également le patron d’une société d’armement spécialisée dans l’électronique militaire la « Sy coleman ». Sa société équipe les missiles « Patriot » et grâce à ses relations au Pentagone, il a pu bénéficié, sans aucune soumission d’offre, d’un contrat de 100 millions de dollars. Par ailleurs, le général Garner a des liens très étroits avec une importante multinationale qui forme des policiers, entraîne des soldats pour le compte des Etats et loue des mercenaires. C’est dire si la guerre menée par son pays en Irak l’intéresse à tous les niveaux
La liste des personnalités qui ont d’importantes fonctions politiques dans l’administration américaine et qui siégent dans les conseils d’administration des entreprises privées est loin d’être exhaustive. Ces personnages gravitent dans l’entourage immédiat du Président américain et participe d’une manière active à la politique étrangère américaine.
Ce sont ces hommes et ces femmes qui régentent le monde, le mettant en coupe réglée n’hésitant pas à envahir et à détruire des pays, des vies et des cultures afin de satisfaire leur goût pour la puissance et le lucre. Malgré la légalité internationale dont ils se parent, ils ne sont pas loin de ressembler à un syndicat du crime ou en comparaison, les maffias traditionnelles apparaissent comme des sociétés caritatives. Ils font le malheur du monde et sur ce malheur ils font des affaires.
«El proconsul» Négroponte"
Le général Jay Garner ne restera pas longtemps en Irak. Il est rappelé au bout de trois semaines, pour être remplacé par un diplomate de carrière, Paul Bremer. A son retour aux Etats-Unis, il avouera que le but des Américains n’était « pas de libérer l’Irak, ni de le désarmer, simplement y installer des bases militaires permanentes et s’emparer des réserves pétrolières »(18).
L’absence de volonté des Américains, malgré leurs promesses, à remettre en marche les infrastructures de bases, les services de santé, d’approvisionner la population en eau et en électricité, de rétablir la sécurité des personnes et des biens corrobore parfaitement la déclaration du général Garner, et met à nu leurs véritables intentions.
Paul Bremer, ami personnel de Wolfowitz, succède à Jay Garner et avait pour objectif, le dépeçage «légal» de l’Irak. Il devait « contractuellement » livrer aux squales américains de la finance, l’économie irakienne. Il va réussir à privatiser plus de 200 entreprises publiques, banques, usines, mines…et surtout mettre l’agriculture irakienne entre les mains des multinationales de l’agro-alimentaire, avec la complicité du gouvernement irakien désigné par les Etats-Unis. Les contrats que va signer celui-ci avec les géants du commerce de grains, stipulent que le paysan irakien ne doit utiliser que des semences sélectionnées sur lesquelles, ces sociétés ont le monopole. Il est inutile de préciser que ces semences ont la particularité d’être hybrides, c’est-à-dire qu’elles ne peuvent être utilisées qu’une seule fois et ainsi en plus des substantiels profits que vont faire ces multinationales, c’est tout le pays qui est pris en otage.(19)
Pendant ce temps la résistance irakienne ira crescendo et fera subir aux troupes américaines de lourdes pertes. Après avoir réussi à dépecer le pays et à enchaîner son économie aux multinationales américaines, Bremer est rappelé pour céder la place à l’homme que les Honduriens ont surnommé «El Proconsul» Negroponte, pour les pouvoirs dont il disposait au Honduras et le rôle qu’il joua avec « succès »dans la lutte contre la « subversion ». En ce qui concerne l’Irak, il aura pour mission de « pacifier » le pays.
L’homme a été formé comme agent de renseignements dans les guerres du Vietnam et du Cambodge. Son expérience l’amènera à diriger personnellement les escadrons de la mort en Amérique centrale. Il est nommé ambassadeur au Honduras pour remplacer Jack Binns qui était encore en poste mais qui n’avait cessé, en toute naïveté, d’agacer Washington sur les méthodes -tortures et assassinats d’opposants politiques- et « l’état pathologique » de Gustavo Alvarez Martinez, général que la C.I.A. avait recruté et placé comme chef de la Sûreté nationale et commandant en chef des forces armées du Honduras. Un an à peine après sa prise de fonction, Binns qui semblait n’avoir pas compris les « nécessités » de la guerre contre la «subversion», est remplacé par Negroponte. Ce dernier avait cette particularité de ne pas être trop regardant quand aux procédés employés par l’agence américaine ou par leurs protégés au Honduras, dans leur lutte contre le « communisme » car « la dernière chose que souhaitait l’administration Reagan, c’était un ambassadeur soucieux du respect des droits de l’homme »(20).
En cela elle avait trouvé en la personne de Negroponte l’homme qui répondait à ce profil et qui devait également coordonner, à partir du Honduras, l’action contre-révolutionnaire des Contras qui visait à renverser le gouvernement sandiniste de Managua. Afin de financer cette opposition armée, il va trouver l’argent nécessaire à son action dans le trafic de la cocaïne qu’il va organiser vers les Etats-Unis. La mission de l’ambassadeur américain au Honduras fut couronnée de succès et sa nomination à ce poste «fut essentielle à la réussite américaine dans cette région du monde(21). En effet les résultats parlent d’eux-mêmes. Le Nicaragua va être obligé de détourner les rares ressources qu’il possède, et qu’il avait mise au service de son peuple, vers la défense du pays.
Confronté aux attaques extérieures des Contras et des Américains (les Etats-Unis vont miner les ports du Nicaragua), au sabotage et à l’agitation d’une droite réactionnaire soutenue par les Etats-Unis, le régime sandiniste s’écroule et aujourd’hui, le Nicaragua est le 2° pays le plus pauvre de l’Amérique latine, et 60% des enfants de moins de deux ans sont anémiques du fait de la malnutrition (22). On peut dire que ce point de vue la mission de Negroponte a été une réussite totale. Ensuite, ambassadeur au Mexique, jusqu’en 1993, il va chapeauter les services de renseignements américains qui collaboraient avec le gouvernement mexicain dans la guerre contre les « rebelles » zapatistes du Chiapas. Versé dans la vie « civile », mais toujours agent des services américains, il revient aux affaires politiques avec l’élection du président Bush. Ami de longue date de cette famille il intégra facilement le staff du président américain qui lui, avait besoin d’un homme fidèle et dont la mission serait d’entraîner l’O.N.U. dans la guerre contre l’Irak. En plus de cette mission il devait s’opposer à la moindre résolution condamnant les exactions d’Israël en Palestine.
A l’O.N.U., afin de manipuler le secrétaire général des Nations unis et le Conseil de sécurité, il n’hésita pas à se lancer dans des opérations d’espionnage des membres du conseil de sécurité et à intercepter les communications des diplomates. Par ailleurs, il parvint à « convaincre » les dirigeants mexicains et chiliens, de rappeler leurs représentants à l’O.N.U. qui ne le suivaient pas dans ses positions belliqueuses à l’endroit de l’Irak. Et c’est ce même homme qui est envoyé comme « ambassadeur » dans ce pays pour apporter la démocratie, les droits de l’homme et le progrès au peuple irakien.
Dès son arrivée à Baghdad, le nouvel ambassadeur a décidé de reconsidérer les priorités de son programme de dépense et de transférer au chapitre de la sécurité, l’argent destiné aux infrastructures de base et particulièrement à l’eau et à l’électricité.
Spécialiste des guerres de basse intensité, c’est-à-dire des guerres menées essentiellement contre les civils, Negroponte est certainement l’homme de la situation, son expérience en Amérique centrale plaide pour lui. C’est à lui que va incomber la tâche d’appliquer la décision de la Maison Blanche de tenir, malgré les conditions déplorables et un climat de violence sans précédent, les élections législatives en janvier 2005. Quelle que puisse être la situation sécuritaire, les Américains sont décidés à accélérer le processus électoral qui autorisera le nouveau gouvernement issu des « élections » à recourir à leur aide pour établir la paix et la stabilité en Irak. Ainsi les Américains ne seront plus une force d’occupation mais une armée qui n’aura fait que répondre à une demande d’assistance faite par un pays menacé par le terrorisme.
De même qu’ils ont empêché, au nom de la guerre contre le communisme et la « subversion », toute tentative des pays d’Amérique centrale et du sud, de se libérer de la misère et du sous-développement par la mobilisation, au service de leurs peuples, des ressources de leurs pays, les Etats-Unis tentent aujourd’hui, au nom de la lutte contre le « terrorisme », de mettre la main sur les richesses du monde arabe et musulman en contrecarrant toute velléité de souveraineté. Il est inacceptable pour la première puissance mondiale de tolérer la moindre résistance à sa volonté de réduire au même dénominateur, celui de sa domination, tous les espaces géographiques et aux mêmes perceptions idéologiques, tous les univers mentaux. Aujourd’hui, l’Islam est au centre de la guerre qui est portée par les Etats-Unis dans le monde. Et nous pensons que le terme « croisade » employé par G. Bush est révélateur d’un état d’esprit qui s’ancre dans la croyance que le destin de l’Amérique est de diriger le monde. Que Dieu a élu ce peuple afin de régénérer la vraie foi : le christianisme, dans sa version évangéliste. Pour les néo-conservateurs « calvinistes », le lien avec l’histoire juive est par trop évident. Persécutés en Europe du fait de leurs convictions religieuses, Dieu aurait dirigé leurs pas vers la nouvelle « terre promise » : les Amériques. Le pays où ils sont arrivés, son immensité, ses richesses, ses peuples vivant à l’état de nature était bien le signe de leur « élection » et cela les confortait dans la mission pour laquelle ils se sentaient prédestinés : la construction de la « cité de Dieu » en terre américaine, l’extermination des Indiens dans lesquels « s’était incarné le diable » et l’enrichissement sans limite.
La trahison des clercs :
Cette animalité, il n’y a pas d’autres termes pour qualifier cette régression de l’humain dans l’homme, trouve encore des plumitifs qui, sous les oripeaux d’un intellectualisme de mauvais aloi, justifient cette barbarie au nom d’un universalisme aussi douteux qu’abstrait. Comme il s’est toujours trouvé des intellectuels pour inscrire les aventures coloniales dans une «logique historique» - et aujourd’hui celle-ci se présente sous les clinquants de la modernité, de la démocratie et des droits de l’homme – la guerre contre l’Irak et l’Afghanistan a trouvé ses chantres et a réussi à convertir au même credo les « ennemis » séculaires. Ceux qu’on situait dans le camp colonialiste et qui traditionnellement s’identifiaient à la droite, et ceux qui prétendaient défendre les valeurs humaines et qui étaient parvenus, nous semblait-il, à rompre avec leur passé colonial.
Cependant, le naturel ne va pas tarder à revenir au galop sous la forme d’un raisonnement très spécieux qui cache mal la duplicité de ces intellectuels. Pour ces clercs, qui se situent le plus souvent à gauche, qui paraissaient s’être libérés de leurs a priori ethnocentristes, la démocratie et la «modernité» ne pouvait être que le dénominateur commun à l’humanité.
Le sens de l’histoire ainsi défini, il n’était plus permis de patienter qu’elles émergent à la conscience par un processus de maturation interne à la société. Il fallait l’imposer y compris par la violence des armes aux peuples « rétifs » à ces « valeurs ». Ce nouveau discours, développé dans les pays occidentaux et pris en charge par les élites du Tiers-Monde, s’avère n’être qu’un avatar d’une pensée qui, quoique généreuse dans ses objectifs, conduisit dans sa pratique au goulag et aux déceptions qu’ont provoquées, chez ces intellectuels, les mouvements d’indépendance qui auraient dû répondre à leur rêve de faire « triompher »dans leurs pays nouvellement libérés, la révolution qu’ils ne purent accomplir chez eux.
Ces concepts ou plutôt leur retraduction, marqués au coin du «réalisme» et de l’ostracisme, venus enrichir un discours qui prétendait traduire l’état du monde et les progrès enregistrés par l’humanité, s’inscrivent pour l’essentiel dans un système mondial, dominé par les Etats-Unis, qui vise à légitimer les interventions militaires, les coups d’état contre des régimes indociles, les invasions et les occupations de pays qu’on veut déposséder de leurs richesses.
Les «ingérences» chères à B. Kouchner - dont la mauvaise foi est débusquée le 24-04-2003 sur Paris Match lorsqu’il répliqua péremptoirement à ceux qui parlaient de l’armée américaine comme d’une force d’occupation «Vous parlez de forces d’occupation. Quelles forces d’occupation ? Il faut ignorer les réalités de l’Irak pour prêter attention aux quelques extrémistes qui expriment ce genre de point de vue.» - trouvent leur principe légitimant dans cette modernité qui n’est interrogée ni dans ses principes ni dans ses finalités.
Il est évident que cette référence itérative à la modernité, au progrès et à la démocratie sert plutôt à dissimuler une réalité beaucoup plus prosaïque et encore plus sordide qu’il n’y paraît. Celle qui autorise des puissances comme les Etats-Unis à dicter leurs lois aux pays les plus faibles en recourant soit à la corruption soit à la répression, n’hésitant à aucun moment à utiliser contre eux, leurs capacités militaires et technologiques, détruisant en quelques jours plusieurs décennies de sacrifices, tuant et massacrant dans l’impunité des dizaines de milliers d’innocents, commettant contre cette humanité les crimes pour lesquels elles érigèrent des tribunaux internationaux auprès desquels ils ne s’estiment pas être passibles d’y comparaître.
C’est un peu ce qu’exprime, non sans cynisme, un Arno Klarsfeld dans les colonnes du journal le Monde du 11 février 2003 quand il dit : « je suis pour la guerre contre l’Irak, parce qu’il est de l’intérêt vital des démocraties d’imposer la démocratisation du monde arabe par la force…».
Parce que l’intérêt d’Israël le commande et qu’il est important de «normaliser», de domestiquer les espaces réfractaires à cet ordre mondial qui se destine à sauver, malgré elle et contre elle une « humanité imperméable » à la modernité et à sa rationalité capitaliste et justifie, par la même, la domination, la violence et le racisme le plus primaire.
C’est avec ce sentiment nullement contenu que Jean François Revel explique les raisons de son soutien aux Etats-Unis dans leur guerre contre l’Irak : (les Occidentaux) se trouvent «devant un peuple (le peuple irakien) incapable de se gouverner lui même et qui en même temps, ne veut pas qu’on s’occupe de lui… Cette contradiction est typiquement arabo-musulmane, c’est un fait de civilisation» (23).
Malgré nos réticences à souscrire à la thèse d’un conflit de « civilisations », force est de constater que les guerres les plus meurtrières dans lesquelles se sont engagés totalement les Etats-Unis, depuis la seconde guerre mondiale et en dehors du Vietnam, sont l’Irak et l’Afghanistan- qui ne cessent de faire, tous les jours, l’expérience de l’occupation et de goûter aux douceurs de la démocratie et aux bienfaits des droits de l’homme, version américaine- et menacent la Syrie, la Libye, l’Iran et le Soudan.
Est-ce un hasard que les seuls pays visés par l’animosité des Etats-Unis soient musulmans ? Est-ce qu’il ne faudrait pas chercher ici, les raisons de ce mutisme des intellectuels européens devant ce qui ne peut être désigné que comme un génocide ?
Est-ce que la convoitise des richesses de leur sous-sol peut à elle seule expliquer la haine qui autorisa le massacre de millions de femmes et d’enfants irakiens, condamnés à subir durant plus d’une décennie un embargo des plus meurtriers,
Il n’y eut dans la tradition américaine, que les Amérindiens, «habités par le diable», qui subirent avec une telle constance cette politique d’extermination et n’échappèrent que de peu au sort qui fut celui des Tasmaniens dont le dernier représentant est exposé depuis bientôt un siècle et demi dans un musée.
Notes :
(1) Bob Woodward : Plan d’attaque, Editions Denoël, Paris, 2004.
(2) Michel Bugnon Mordant : Etats-Unis, la manipulation planétaire, Editions Favre, Lausanne, 2003, p.194.
(3) Zbigniew Brzezinski : Le grand échiquier, l’Amérique et le reste du monde Bayard édition, Paris 1997, p.59.
(4) Idem.
(5) Bob Woodward : op.cit. p. 248.
(6) WilliamBlum: L’Etat voyou l’Aventurine, Paris2002, p.103.
(7) New York Times: 28septembre 1996, page 22, in W. Blum, op. cit. p.99.
(8) Idem : 23 janvier 1975, in W. Blum, op. cit. p.103.
(9) François Cardona : in El Watan, Alger, 5 août 2004.
(10) Noam Chomsky : Les Etats voyous, Le serpent à plumes, p.29.
(11) Noam Chomsky : il manifesto, 15 septembre 2004.
(12) Ibrahim Wade : Le Monde diplomatique, mai 2004.
(13) Michel Bugnon Mordant : op. cit. p.154.
(14) Le nouvel observateur, 27 mai-2 juin 2004, p.14.
(15) Idem, p.18.
(16) Idem, p.13juste
(17) Idem, p.18.
(18) Interview à la B.B.C. de Jay Garner, 19 mars 2004.
(19) http://www.altermonde.levillage.org
(20) Peter Scowen : Le Livre noir des Etats-Unis, Mango document, Paris 2002.
(21) Idem.
(22) Noam Chomsky, op.cit.
(23) Le Figaro, 8 septembre 2003.
Source : http://www.lequotidien-oran.com/
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