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Palestine - 11 septembre 2008
Par Khaled Amayreh
Une nouvelle rencontre inutile entre le Premier Ministre israélien Ehud Olmert et le Président de l'Autorité Palestinienne Mahmoud Abbas a eu lieu cette semaine, générant plus de frustration et d'incertitudes, surtout du côté palestinien.
Certains commentateurs ont décrit la dernière rencontre comme "une autre réunion soulignant la futilité et la faillite du processus politique". Un responsable palestinien de Ramallah, visiblement en colère, a qualifié les négociations en cours avec Israël de "perte de temps", disant que des mois de négociations intensives avec le gouvernement Olmert n'ont pas produit "un seul iota de progrès réellement substantiel".
La dernière réunion était supposée explorer la possibilité d'atteindre une certaine concordance générale, ou "shelf agreement", sur les principales questions contentieuses, dont l'avenir de Jérusalem, les colonies juives en Cisjordanie et le droit au retour des millions de réfugiés palestiniens déracinés de leurs maisons lors de la création d'Israël il y a 60 ans. Il a été cependant vite clair qu'une division conceptuelle profonde entre les deux bords continuerait à empêcher tout espoir véritable d'agrément, que ce soit maintenant ou dans un avenir proche.
D'un côté, Abbas a concentré son argumentation sur l'invocation de la "légitimité internationale" et "la primauté de la loi internationale". De l'autre, Olmert a argué que les Palestiniens devraient cesser de faire "des demandes maximalistes". Il a ignoré le fait que l'Autorité Palestinienne a déjà cédé sur 78% de la Palestine Historique – se contentant d'un petit 22% - mas pas encore garanti – constitué de la Cisjordanie occupée, de Jérusalem Est et de la Bande de Gaza.
Contrairement aux rencontres précédentes, au cours desquelles un certain niveau d'harmonie prévalait, la dernière réunion a été visiblement tendue, le Premier Ministre israélien reprochant à Abbas "de rencontrer des assassins et des tueurs d'enfants", référence à l'ancien prisonnier libanais Samir Al-Kuntar, qu'Israël a libéré il y a quelques semaines en échange des dépouilles de deux soldats israéliens retenues par le Hizbullah. "Je ne pensais pas que vous rencontreriez de tels ignobles assassins", a crié Olmert, pendant qu'Abbas écoutait.
Réticent à rétorquer à l'attaque cinglante et peu diplomatique d'Olmert, Abbas s'est expliqué en disant que sa rencontre avec Kuntar n'avait pas été planifiée. Pas très convaincu, Olmert a crié : "Et alors ? Si vous êtes un homme de paix, vous n'avez pas à rencontrer des assassins."
Qu'Abbas ait pu sauvegarder, mais il ne l'a pas fait, sa propre dignité et celle de son peuple en disant à Olmert qu'Israël avait le taux le plus élevé au monde d'assassins et de criminels de guerre par habitant ; qu'il est difficile de trouver un soldat ou un officier israélien dont les mains ne soient pas entachées de sang innocent, semble peine perdue pour le Premier israélien aussi bien que pour le Président palestinien. Il est vrai que la survie même de l'Autorité Palestinienne dépend de la "bonne volonté" israélienne, en particulier l'année des élections présidentielles US.
Suite de la sortie humiliante d'Olmert, qui résume la posture condescendante qu'Israël adopte vis-à-vis des Palestiniens en général, dont l'AP, Abbas a trouvé approprié de remercier le Premier israélien pour la libération récente de 198 prisonniers, dont deux détenus de longue date qu'Israël considère comme "d'ignobles assassins". Il ne lui a pas rappelé que la loi internationale protège le droit à résister par tous les moyens, dont la lutte armée, contre une occupation belliqueuse, coloniale et raciste.
Selon des sources de l'Autorité Palestinienne, Abbas a demandé à Olmert de libérer davantage de prisonniers palestiniens, dont le chef du Fatah Marwan Al-Barghouti, le chef du Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP) Ahmed Saadat et, ô surprise, Aziz Duweik, le Président affilié au Hamas du Conseil Législatif Palestinien. L'armée israélienne a kidnappé Duweik il y a deux ans, en représailles à la capture, par des combattants palestiniens, d'un soldat de l'occupation israélienne près de Gaza.
Abbas aurait expliqué à Olmert que la libération de ces dirigeants éminents renforcerait sa position aux yeux des Palestiniens et priverait le Hamas d'une victoire psychologique dans le cas où Israël accepterait de les relâcher dans le cadre d'un éventuel échange de prisonniers avec le Hamas. Olmert fut évasif, arguant que la rue israélienne ne comprendrait pas la libération d'un si grand nombre de prisonniers palestiniens dans un délai aussi court, en particulier en l'absence de concessions du côté palestinien.
Par "concessions", Olmert entend que l'Autorité Palestinienne fasse des concessions politiques sur les questions relatives aux discussions de statut final. La remarque d'Olmert est la preuve de la vision israélienne à long terme, à savoir qu'Israël se sert des environ 10.000 prisonniers palestiniens comme monnaie d'échange dans les négociations avec les Palestiniens.
A la fin de la rencontre, un Abbas renfrogné a quitté la résidence d'Olmert sans parler à la presse. Olmert, d'un autre côté – impatient de présenter la rencontre comme positive – a déclaré que lui et Abbas étaient d'accord sur l'objectif fondamental de la création d'un Etat palestinien vivant côte à côte, en paix, avec Israël. Alors qu'Olmert répétait jusqu'à la nausée la même chose, les bulldozers et l'expansion coloniale rendent ce projet de plus en plus illusoire chaque jour.
Les Palestiniens sont maintenant résignés au fait que leur vieil espoir de création d'un Etat palestinien dans un futur proche revient à rêver les yeux ouverts. Cette semaine, un ancien conseiller de feu le dirigeant palestinien Yasser Arafat a appelé à un Intifada généralisé, ou soulèvement, englobant tous les territoires occupés, pour obliger Israël et la communauté internationale de mettre fin, une fois pour toutes, à l'occupation. Bassam Abu Sharif a affirmé qu'Israël ne voulait pas la paix et ne cherchait que la capitulation palestinienne devant le sionisme.
Entre temps, l'un des officiels de l'AP, Ahmed Qurei, qui a le titre de négociateur en chef, a continué à réitérer les vieilles "constantes" : à savoir la nécessité d'un retrait total israélien aux frontières de 1967 et le règlement du problème des réfugiés selon la Résolution 194 de l'Assemblée Générale des Nations Unies. Qurei a déclaré aux journalistes, à la suite d'une rencontre avec l'envoyé du Quartet au Moyen Orient, l'ancien Premier Ministre britannique Tony Blair à Ramallah, que l'Autorité Palestinienne ne signerait jamais un accord de paix avec Israël sans un retrait israélien total des territoires occupés.
A la lumière des perspectives sombres d'un Etat palestinien, le soutien à la solution à Un Etat, selon laquelle les Palestiniens et les Israéliens vivraient dans un Etat démocratique unique pour tous ses citoyens, couvrant toute la Palestine mandataire du Jourdain à la Méditerranée, prend de l'ampleur parmi les intellectuels palestiniens et les gens ordinaires.
Le soutien grandissant pour ce concept est principalement motivé par le sentiment profond que tout Etat palestinien en Cisjordanie ne serait pas viable. Avec plus d'un demi million de colons juifs vivant aujourd'hui en Cisjordanie , Israël demande en fait aux Palestiniens d'accepter un Etat déformé sur ce qui reste des territoires occupés et de rester sous occupation et apartheid israéliens perpétuels.
Dans ce contexte, beaucoup considèrent que la solution à Un Etat n'est pas seulement le meilleur moyen de garantir la justice, mais c'est la meilleure ligne de défense contre un sionisme intransigeant.
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