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Israël - 9 septembre 2008
Par George Friedman
on Stratfor (Geopolitical Intelligence Report), 8 septembre 2008
La guerre géorgiano-russe continue à générer des ronds dans l’eau, et le temps est venu de prendre un peu de hauteur. Les premiers acteurs, dans la question géorgienne, mis à part les Géorgiens, furent les Russes et les Américains.
Aux marges, il y avait les Européens, fournissant force avis éclairés et avertissements, mais d’un poids quasi négligeable. Un autre acteur, jouant un rôle bien davantage glauque, ne doit pas être oublié : Israël.
Des conseillers israéliens étaient présents en Géorgie, à côté de conseillers américains, et des hommes d’affaires entitesques faisaient du business, dans ce pays. Les Israéliens jouissaient d’un certain degré d’influence, mais il s’agissait de seconds rôles, par rapport aux Américains.
Plus intéressante, sans doute, fut la décision, annoncée à son de chofars par les Israéliens, de mettre un terme à leurs ventes d’armes à la Géorgie, tout juste UNE SEMAINE AVANT [c’est moi qui souligne, ndt] que la Géorgie n’attaque l’Ossétie du Sud.
A l’évidence, les Israéliens savaient ce qui allait arriver, et ils ne voulaient pas y être mêlés. Par la suite, contrairement aux Américains, les Israéliens firent tout leur possible pour essayer de calmer les Russes, allant jusqu’à envoyer leur Premier ministre Ehud Olmert à Moscou, afin d’y prodiguer des propos rassurants. Quelles qu’aient pu être les menées des Israéliens en Géorgie, ils ne voulaient pas d’une confrontation avec la Russie…
Il est impossible d’expliquer les motivations d’être présents en Géorgie, pour les Israéliens, sans prendre en considération la stratégie israélien générale, qu’il convient de passer soigneusement en revue. C’est à partir de cet examen que nous serons en mesure de commencer à comprendre la raison pour laquelle les Israéliens sont embringués dans des affaires situées très loin de leur zone immédiate de responsabilité, ainsi que ce qui les a amené à réagir de la manière dont ils l’ont fait en Géorgie.
Il convient de classifier les intérêts stratégiques israéliens en quatre catégories, distinctes mais en interaction :
1/ Les Palestiniens vivant à l’intérieur des frontières israéliens post-1967 ;
2/ Les pays dit «de la confrontation», frontaliers de l’entité (le Liban, la Syrie, la Jordanie et, très important, l’Egypte) ;
3/ Le monde musulman, plus largement ;
4/ Les grandes puissances susceptibles d’influencer les trois régions citées ci-dessus, et éventuellement de s’y projeter (par la force).
La question palestinienne
La chose la plus importante à comprendre, en ce qui concerne le premier point, la question palestinienne, c’est que les Palestiniens ne représentent aucune menace stratégique pour les Israéliens. Leur capacité à leur infliger des morts est certes un sujet d’irritation pour les Israéliens (même s’il s’agit d’une tragédie, pour les victimes et pour leurs proches), mais les Palestiniens ne sont pas en mesure de menacer l’existence de l’entité israélien.
Les Palestiniens peuvent imposer un certain niveau d’irritation, qui peut affecter le moral israélien, incitant les Israéliens à faire des concessions fondées sur l’évaluation réaliste que les Palestiniens en tant que tels ne risquent pas, dans un quelconque délai concevable, menacer les intérêts vitaux israéliens, quels que soient, par ailleurs, les arrangements politiques.
En même temps, raisonnent les Israéliens, étant donné que les Palestiniens ne sont pas à même de menacer les intérêts israéliens, à quoi bon faire des concessions qui ne réduiront en rien la menace des attentats terroristes ? Etant donné la structure du monde politique israélien, cette question est à la fois infra-stratégique et totalement insoluble.
Le problème est rendu encore davantage complexe par le fait que les Palestiniens sont profondément divisés. Pour Israël, c’est là un indéniable avantage, car cette division génère une guerre civile de facto entre les Palestiniens, réduisant d’autant la menace qu’ils pourraient représenter. Mais cela réduit d’autant les éventuelles pressions israéliens, ainsi que les opportunités de négocer. Il n’y a personne, du côté Palestinien, qui soit en mesure de s’exprimer, avec autorité, au nom de tous les Palestiniens.
Tout accord obtenu avec les Palestiniens, devrait, du point de vue israélien, inclure des garanties quant à l’arrêt du terrorisme. Personne n’a, à aucun moment, été en position de garantir cela – et si une chose est certaine, c’est bien que le Fatah ne saurait parler au nom du Hamas, aujourd’hui.
Par conséquent, un règlement sur un Etat palestinien [quel qu’en soit la nature] reste gelé, parce que cela ne saurait apporter un quelconque avantage palpable aux Israéliens.
Les pays de la confrontation
Le deuxième cercle est celui des pays de la confrontation (avec l’entité). Israël a conclu des traités de paix formels avec l’Egypte et avec la Jordanie. Il a eu des pourparlers informels avec Damas à propos de questions telle celle du Liban, mais l’entité n’a pas d’accord permanent avec la Syrie.
Les Libanais sont trop profondément divisés pour que des accords d’Etat à entité soient possibles, mais Israël a eu des accords avec diverses factions libanaises, à différentes époques (en particulier, des relations très étroites avec certaines des factions [dites] chrétiennes).
La Jordanie est un allié effectif d'Israël. Elle est hostile aux Palestiniens depuis 1970, époque où l’OLP tenta de renverser le régime hachémite, et les Jordaniens voient dans les Israéliens et les Américains des garants de leur sécurité nationale.
Les relations d'Israël avec l’Egypte sont moins chaleureuses, pour la galerie, mais néanmoins fort cordiales. Le seul groupe qui représente une menace sérieuse pour l’Etat égyptien, c’est les Frères musulmans. En conséquence, Le Caire voit dans le Hamas – une succursale de cette organisation – une menace potentielle.
Les Egyptiens et les Israéliens entretiennent des relations pacifiques depuis plus de trente ans, sans égard pour les hauts et les bas des relations entito-palestiniennes.
Les Syriens, par eux-mêmes, ne sont pas en mesure de déclencher une guerre contre l’entité et y survivre. Leur intérêt premier se trouve au Liban, et quand ils agissent contre l’entité, ils le font par l’intermédiaire de supplétifs, tel le Hezbollah. Mais, de leur propre point de vue, un Etat palestinien indépendant est une idée glauque, dès lors qu’ils revendiquent la totalité de la Palestine, dont ils estiment qu’elle fait partie d’une Grande Syrie – un concept pas particulièrement à l’ordre du jour, par les temps qui courent…
Par conséquent, la seule menace, pour Israël, à ses frontières, provient de la Syrie, via des supplétifs au Liban, ainsi que de la possibilité que la Syrie acquière des armes susceptibles de menacer l’entité, telles que des armes chimiques ou nucléaires.
Plus largement : le monde musulman
Quant au troisième cercle, celui du positionnement de l’entité au sein du monde musulman, au-delà des pays de la confrontation, il est bien plus sûr que l’entité elle-même ou ses ennemis ne l’admettent. L’entité a des relations étroites, de nature stratégique, avec la Turquie, ainsi qu’avec le Maroc.
La Turquie et l’Egypte sont les géants de la région, et le fait d’être en bonne intelligence avec eux garantit à Israël les fondements de sa sécurité régionale. Mais Israël a aussi d’excellentes relations avec des pays avec lesquels elle n’entretient pas de relations diplomatiques formelles, en particulier dans la Péninsule arabique.
Les monarchies conservatrices de cette région nourrissent une profonde méfiance envers les Palestiniens, en particulier avec le Fatah. En tant que membre du mouvement panarabe socialiste nassérien, le Fatah a directement menacé ces monarchies, à plusieurs occasions. A plusieurs reprises, durant les années 19870 et 1980, les services de renseignement israéliens ont fourni à ces monarchies des informations qui ont empêché des assassinats ou des insurrections.
Ainsi de l’Arabie saoudite (excusez du peu), qui ne s’est jamais engagée dans une quelconque activité anti-israélien, au-delà d’une rhétorique à trois balles. A la suite du conflit de l’été 2006 entre le Hezbollah et Israël, l’Arabie saoudite et Israël ont conclu des relations étroites, dans les coulisses, en particulier contre un Iran s’affirmant fortement – l’Iran, un ennemi commun aux Saoudiens et aux Israéliens.
L’Arabie saoudite entretient des relations étroites avec le Hamas, mais ces relations-là ont davantage à voir avec le maintien d’une position défensive – il s’agit essentiellement, pour Riyadh, de faire en sorte de ne pas avoir le Hamas et ses soutiens saoudiens sur le dos – qu’avec une politique gouvernementale. Les Saoudiens sont méfiants, vis-à-vis du Hamas, et c’est encore davantage le cas, en ce qui concerne les autres monarchies de la Péninsule arabique.
Mais entrons dans le vif du sujet : Israël entretient des relations d’affaires assidues avec ces régimes, en particulier dans le domaine de la défense. Des entreprises israéliens, travaillant pour la galerie à travers des filiales américaines ou européennes, font des affaires titanesques, dans l’ensemble de la Péninsule arabique. La nature de ces filiales est parfaitement connu, d’un côté et de l’autre, même si personne n’est enclin à le crier sur les toits. Les gouvernements tant israélien que des pays de la Péninsule seraient confrontés à des problèmes internes, s’ils faisaient savoir cela, mais une simple visite à Dubaï, la capitale des affaires dans cette région du monde, permet de rencontrer de nombreux Israéliens faisant des affaires dans tous les domaines, sous couvert de passeports de pays-tiers.
Ajoutons à cela le fait que les pays de la Péninsule arabique ont peur de l’Iran, et ces relations n’en acquièrent que davantage d’importance encore, tant pour les Arabes péninsulaires que pour les Israéliens.
L’idée intéressante est souvent soulevée que'Israël, au cas où il se retirerait des territoires occupés [en 1967 seulement, of course ! ndt] et où il créerait un Etat ‘palestinien’ indépendant, les perceptions que le monde musulman en a connaîtraient un changement radical. C’est une idée très commune en Europe, notamment. De ce point de vue, nous pouvons diviser le monde musulman en trois blocs.
Il y a les pays musulmans qui entretiennent d’ores et déjà des relations formelles avec Israël.
Il y a, ensuite, ceux qui ont d’étroites relations de travail avec Israël, et où des relations formelles ne feraient que compliquer ces relations, plutôt que les approfondir. Le Pakistan et l’Indonésie, entre autres, rentrent dans cette catégorie.
Enfin, il y a les pays qui sont absolument hostiles à Israël, comme l’Iran. Il est très difficile d’identifier un pays qui n’ait aucune relation, ni informelle, ni formelle, avec Israël, mais qui nouerait de telles relations dans le cas où un Etat palestinien viendrait à exister.
Quant aux pays qui sont hostiles Israël, ils y resteraient hostiles même après un retrait total des territoires palestiniens [comprendre : les territoires occupés militairement par Israël en 1967 ! ndt], dès lors que ce qui les défrise, c’est l’existence d'Israël [l’essence], et non pas ses frontières [les accidents]…
L’important, dans tout cela, c’est le fait que la sécurité israélienne est bien plus assurée qu’il pourrait le sembler si l’on écoute uniquement la rhétorique. Les Palestiniens sont divisés, et même en guerre entre eux.
Dans le meilleur des cas, ils ne sont pas en mesure de menacer l’existence de l’entité. Les seuls pays frontaliers avec lesquels les Israéliens n’aient pas d’accords formels sont la Syrie et le Liban, dont ni l’une ni l’autre ne sont en mesure de menacer la sécurité d'Israël. Celui-ci entretient avec la Turquie des relations très intimes, alors qu’il s’agit du pays musulman le plus puissant de la région. Il a des relations commerciales, ainsi qu’en matière de renseignement, avec la Péninsule arabique, bien plus puissantes qu’on ne le reconnaît généralement, bien que le degré atteint par cette coopération soit bien connu dans toute la région. Du point de vue de sa sécurité, Israël s’en tire remarquablement bien.
Le monde
Israël jouit aussi d’une position extrêmement enviable dans le reste du monde, notre quatrième et dernier cercle. Israël a toujours eu besoin d’une source extérieure d’approvisionnements en armes et en technologie, étant donné que les nécessités de sa sécurité nationale surpassent sa capacité industrielle propre. Sa première marraine fut l’Union soviétique, qui espérait, en la soutenant, se gagner une place forte au Moyen-Orient. Elle fut très rapidement suivie par la France, qui voyait en Israël un allié en Algérie et face à l’Egypte.
Enfin, après 1967, les Etats-Unis se mirent à soutenir l’entité ainsi qu’on sait. Washington voyait dans Israël une menace contre la Syrie, laquelle était susceptible de menacer la Turquie sur ses arrières en des temps où l’Union soviétique menaçait ce pays depuis le Nord. La Turquie était le corridor vers la Méditerranée [pour l’URSS, ndt] et la Syrie [alliée à l’URSS, ndt] représentait, de ce fait, une menace pour Israël. L’Egypte fut alignée, elle aussi, sur l’Union soviétique à partir de 1956, soit bien longtemps avant que les Etats-Unis ne se décidassent à développer d’étroites relations «de travail» avec Israël.
Pour les Israéliens, cette relation américaine a perdu de son importance. Au fil des années, le montant des aides américaines – environ 2,5 milliards de dollars annuellement – est resté relativement constant. Il n’a jamais été réajusté à la hausse afin d’absorber l’inflation, diminuant ainsi, en pourcentage, dans le PIB israélien, passant ainsi, en gros, de 20 % en 1947 à moins de 2 % de nos jours.
La dépendance d'Israël vis-à-vis des Etats-Unis s’est effondrée. Cette dépendance, tout-à-fait réelle naguère, est devenue une simple convenance marginale. Israël compte sur ces aides américaines moins pour des raisons économiques qu’afin d’entretenir le concept, aux Etats-Unis, d’une dépendance israélienne, ainsi que celui d’une responsabilité américaine en matière de sécurité. Autrement dit, il s’agit d’avantage, du point de vue israélien, de psychologie et de politique que de nécessités économiques ou sécuritaires.
Par conséquent, Israël n’est confronté à nulle menace, ni à aucun aléa sérieux, sauf deux. Le premier, c’est l’acquisition d’armes nucléaires par un pouvoir qu’on ne serait pas parvenu à dissuader d’en acquérir – autrement dit, un pays prêt à se suicider, pour anéantir l’entité avec lui. Etant donné la rhétorique iranienne, l’Iran pourrait apparaître, à de certains moments, comme un pays tel que celui-là. Mais étant donné que les Iraniens sont très loin de disposer d’une arme ‘livrable’ [eng. deliverable], et qu’au Moyen-Orient on ne saurait prendre la rhétorique de qui que se soit par trop au sérieux, la menace iranienne n’est pas une menace à laquelle les Israéliens doivent faire face, dans l’absolu immédiat.
Quant à la seconde menace, ce serait l’émergence d’une puissance majeure qui serait encline à intervenir ouvertement ou subrepticement dans la région au service de ses intérêts propres, tout en redéfinissant, ce faisant, la menace régionale pesant sur l’entité. Le principal candidat pour ce rôle n’est autre que la Russie.
Durant la Guerre froide, les Soviétiques poursuivirent une stratégie visant à saper les intérêts américains au Moyen-Orient. A cette fin, les Soviétiques activaient des Etats et des groupes qui étaient en mesure de menacer l’entité directement. Il n’y a aucune menace militaire conventionnelle pour l’entité, à ses frontières, sauf dans le cas où l’Egypte serait déterminée et correctement armée. Depuis le milieu des années 1970, l’Egypte n’a été ni l’un, ni l’autre. Même si le président égyptien Hosni Mubarak venait à disparaître et à être remplacé par un régime hostile à Israël, Le Caire ne pourrait rien faire, à moins de disposer d’un parrain capable d’entraîner son armée, et de l’armer. La même chose vaut pour la Syrie et pour l’Iran, dans une très large mesure. Sans accès à de la technologie militaire extérieure, l’Iran n’est, en gros, que le pays des conférences de presse menaçantes. Avec un tel accès, c’est l’ensemble de l’équation stratégique moyen-orientale qui serait bouleversée de fond en comble…
Après la chute de l’Union soviétique, personne n’était prêt à intervenir au Moyen-Orient de la manière dont les Soviétiques le faisaient. Les Chinois n’avaient strictement aucun intérêt à se battre contre les Etats-Unis au Moyen-Orient, qui représente le même pourcentage de fournitures pétrolières pour les Chinois et pour les Américains.
Pour la Chine, il est bien meilleur marché d’acheter du pétrole au Moyen-Orient que de s’engager dans une lutte stratégique avec son principal partenaire commercial, les Etats-Unis. Même s’il y avait un intérêt à le faire, aucune puissance européenne n’est en mesure de jouer un tel rôle, étant donné la faiblesse militaire individuelle des pays européens, l’Europe prise dans son ensemble restant un mythe géopolitique. Le seul pays qui soit à même de menacer l’équilibre des pouvoirs dans le firmament géopolitique israélien, c’est la Russie.
Israël redoute que, si un jour la Russie était engagée dans un affrontement avec les Etats-Unis, Moscou aiderait des régimes moyen-orientaux hostiles aux Etats-Unis pour s’en servir de leviers, à commencer par la Syrie et l’Iran. Bien plus menaçant encore, pour Israël, est l’idée que les Russes, jouant une fois encore un rôle occulte en Egypte, n’installent, en renversant le régime Mubarak au bout du rouleau, un régime davantage compatible avec leurs propres intérêts – un régime qu’ils armeraient. La peur fondamentale d'Israël n’est pas l’Iran. Non. Le cauchemar des Israéliens, c’est une Egypte réarmée, motivée et hostile, soutenue par une grande puissance.
Voilà qui nous ramène à ce que les Israéliens peuvent bien être en train de fabriquer en Géorgie. Ils n’essayaient pas d’y acquérir des bases aériennes, à partir desquelles ils eussent bombardé l’Iran à loisir.
Cela aurait requis des milliers d’Israéliens, présents en Géorgie, pour l’entretien, la gestion des munitions, le contrôle du trafic aérien militaire, etc. Et cela aurait vraisemblablement dissuadé Ankara de lui accorder l’utilisation libre de l’espace aérien turc, ce qui aurait été un inconvénient majeur, pour l’entité. De plus, si tel avait été le plan israélien, alors, logiquement, les Israéliens auraient dissuadé les Géorgiens [disons, pour être justes : Saakashvili, ndt] d’agresser l’Ossétie du Sud.
Non. Si les Israéliens étaient aussi massivement présents en Géorgie, c’est afin de tenter, parallèlement aux Etats-Unis, d’empêcher la réémergence de la Russie en tant que grande puissance. Les ressorts et les rouages de cet effort impliquent de soutenir des pays, dans l’ère de l’ex-URSS, qui sont hostiles à la Russie, ainsi que des individus, en Russie-même, qui s’opposent au pouvoir du Premier ministre Vladimir Poutine. La présence israélienne en Géorgie, à l’instar de la présence américaine, avait précisément pour but de faire obstacle à la réémergence de la Russie.
Dès qu’ils eurent vent d’un clash imminent en Ossétie du Sud, les Israéliens – contrairement aux Américains – changèrent de politique, retournant leur veste à la vitesse de l’éclair.
Tandis que les Etats-Unis augmentaient leur hostilité vis-à-vis de la Russie, les Israéliens mettaient un terme à leurs ventes d’armes à la Géorgie avant que celle-ci ne lance sa guerre. Après la guerre, les Israéliens adoptèrent une diplomatie visant à apaiser les craintes russes.
De fait, actuellement, les Israéliens ont bien plus intérêt à empêcher les Russes de voir en l’entité un ennemi, qu’ils n’en ont à contenter les Américains. Le vice-président américain Dick Cheney peut bien proférer de vagues menaces à l’adresse des Russes, Olmert n’a cessé de réassurer Moscou qu’elle n’a rien à redouter de la part d'Israël et que, par conséquent, elle n’a aucune raison de vendre des armes à la Syrie, à l’Iran, au Hezbollah ou à quiconque d’autre serait hostile à l’entité.
De façon piquante, les Américains se sont mis à exhumer des informations selon lesquelles les Russes seraient en train de vendre des armes au Hezbollah et à la Syrie. Les Israéliens ont, quant à eux, évité ce sujet comme la peste. Ils peuvent vivre bien plus confortablement avec l’idée d’un Hezbollah ayant une certaine quantité d’armes à sa disposition, qu’avec celle d’un coup d’Etat en Egypte, auquel ferait suite l’introduction de conseillers militaires russes dans ce pays. La première notion n’est qu’une nuisance, la seconde représenterait une menace existentielle. La Russie n’est peut-être pas en position de passer à l’action, pour l’instant, mais nous connaissons bien nos Israéliens : ce ne sont pas des gens enclins à attendre qu’une situation quelle qu’elle soit échappe totalement à leur contrôle…
Israël maintient sous son contrôle la situation palestinienne ainsi que ses relations avec ses voisins. Sa position, dans le monde musulman, set bien meilleure qu’il n’y semblerait au premier abord. Son unique ennemi, dans ledit monde musulman, c’est l’Iran, et cette menace est beaucoup moins patente que ce qu’en disent les Israéliens publiquement.
Telle est la raison pour laquelle les Israéliens ont changé du tout au tout leur politique en Géorgie, à la vitesse de l’éclair. Cela risque de générer des frictions avec les Etats-Unis. Mais, de toutes les manières, les relations israélo-américaines n’étaient déjà plus ce qu’elles furent, dans un passé récent.
Source : http://www.stratfor.com/
Traduction : Marcel Charbonnier
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